Dans le vestiaire des lions indomptables, Patrick Mboma a solennellement annoncé sa retraite (…) son départ sonne la fin d’une époque dorée et le Cameroun pourrait connaître des jours moins enchanteurs si des changements salutaires n’interviennent pas rapidement. Depuis deux ans et demi, Winfried Schäefer, le sélectionneur allemand du Cameroun n’a jamais bossé sur le fond malgré une CAN remportée (2002) et une finale de Coupe des Confédérations (2003). Les lions tournaient sous son règne avec 13 ou 14 joueurs.
Cela a perdu cette équipe, tendu ses relations internes. Comment expliquer qu’il continue à faire une confiance aveugle à Lucien Mettomo alors que le défenseur sortait tout juste d’une opération d’un ménisque et fragilisait l’équilibre défensif? C’est lui qui a commis la faute amenant le coup franc et l’égalisation d’Okocha. Pas question de montrer du doigt le défenseur, très bon lors de la Coupe des Confédérations -même si Schäefer a insisté sur cette erreur après le match- mais la mine de ses remplaçants potentiels ne trompait pas. Ils se sont sentis exclus comme la plupart des équipiers en survêtement. Au sein du groupe, le poids de l’entraîneur s’est effrité, tout comme son pouvoir de séduction. Le manque de dialogue, sa volonté de ne pas apprendre le français ou l’anglais, ont fini par lasser certains. Sa méconnaissance des joueurs et des caractères aussi. Ainsi que ses entraînements trop poussés en pleine compétition…
Son coaching inexistant prêtait encore à confusion. Hier il a d’abord remplacé Bill Tchato certainement le défenseur le plus solide, par Idrissou, faisant reculer ainsi Atouba , moins serein derrière, en position de latéral gauche: est ce un hasard alors, si personne n’était présent sur la montée d’Utaka amenant le second but? Et l’allemand n’a laissé que 15 minutes à Ndiefi pour montrer sa forme. Trop peu pour l’ancien sedanais, pourtant très en jambe selon ses partenaires…
En se passant d’atouts comme Epalle ou Emana, en refusant de s’intéresser aux locaux, d’ouvrir réellement son monde et en se contentant de chercher le défi physique permanant, Schäefer a montré ses limites. Pourquoi ne jamais avoir imaginé de nouveaux systèmes de jeu? Hier devant le Nigeria, les doubles champions d’Afrique ont surtout affiché une technique d’une pauvreté rare. Les joueurs sont évidemment responsables de cette sortie prématurée. La défense (longtemps la force locale) n’est qu’une ombre (6 buts encaissés). Les camerounais vont devoir travailler en profondeur, et cette élimination peut les aider à entamer un travail de détection. Mais ce n’est pas une certitude. Schaefer a resigné pour deux ans, jusqu’à la coupe du monde 2006. Puma, son pourvoyeur, voudra t-il se passer de son homme de confiance?
Quant aux joueurs, une remise en cause est nécessaire. Geremi, Atouba, Idrissou, les jeunes Mbami et Djemba ne peuvent se contenter de si peu. Contre le Nigeria, Mbami n’a pas existé, Djemba guère plus. Et les hommes de couloir oublient que le football n’est pas la force basque. Avec le départ de Mboma, il faudra trouver en plus un homme capable de fédérer. Song sera t-il celui là? Eto’o unique buteur lors de ce quart de finale devra s’investir encore plus dans le groupe. Une nouvelle phase s’annonce avec son lot d’incertitudes et de troubles. Les éliminatoires de la coupe du monde arrivent et il n’est pas sur que l’Egypte et la Côte d’Ivoire, principaux adversaires des lions indomptables, les craignent aujourd’hui autant que par le passé.
Hervé Penot