Le sélectionneur national de football est à nouveau sous la sellette depuis le match raté de son équipe samedi dernier à Accra contre le Togo, et peu de personnes pensent qu’il est encore l’homme de la situation.
Il croyait certainement être immunisé à vie contre toute critique, depuis qu’il a conduit les Lions indomptables à la finale de la Coupe d’Afrique des nations le 10 février 2008 à Accra, trois mois après son recrutement très controversé. Depuis l’épopée ghanéenne du reste, son équipe n’avait plus perdu de match, même si elle balbutiait visiblement son football, ce qui ne diminuait en rien l’arrogance du septuagénaire technicien allemand, qui confiait encore au journal La gazette olympique, avant de se rendre à Accra la semaine dernière pour le match Togo-Cameroun: « Avant la Can, j’ai sorti une liste qui a été très contestée. Seulement, nous sommes arrivés en finale. L’équipe du Cameroun n’est pas un parlement ».
La défaite concédée samedi dernier au stade Ohene Djan d’Accra face aux Eperviers du Togo a au moins eu le mérite de ramener le sélectionneur du Cameroun sur terre et au… Cameroun. Car l’intéressé, qui réside à la frontière germano-suisse -au grand mépris de la clause de résidence contenue dans son contrat-, avait pris l’habitude de ne venir à Yaoundé qu’à l’approche des matches à domicile des Lions indomptables, comme ses joueurs, tous puisés dans des clubs professionnels en Europe. Otto Pfister est si dédaigneux des journalistes camerounais au point de les qualifier l’année dernière de « mendiants », a compris la nécessité de venir sauver ce qui peut encore l’être au Cameroun, en se prêtant volontiers aux programmes des médias. Hélas, il n’est guère plus convaincant aujourd’hui qu’hier.
Cet homme qui a le tic de sortir la langue ne sait manifestement pas la contrôler. Lui, qui se bombait le torse d’avoir bâti la meilleure équipe du Cameroun qui a disputé la finale de la Can 2008 en dépit de l’adversité et du chahut, rejette aujourd’hui la responsabilité de la déconvenue du 28 mars dernier à ses joueurs : « Un entraîneur peut choisir une équipe, croyant que c’est la meilleure du monde et sur le terrain elle se comporte tout à fait autrement. Ce ne sont pas les entraîneurs qui jouent ; les joueurs sont donc les premiers responsables sur le terrain ».
Jusqu’à quand trouvera-t-il des esquives à ses maladresses criardes? Son incapacité manifeste à construire une nouvelle « Dream Team » capable de faire peur à ses adversaires s’est encore illustrée au Ghana contre le Togo. Cet échec a provoqué une nouvelle campagne anti-Pfister au sein de l’opinion. La commission Roger Milla mise sur pied après la défaite de samedi par la Fédération camerounaise de football (Fécafoot) a d’ores et déjà abouti à la même conclusion qu’au lendemain de la Can 2008 : « l’encadrement technique actuel des Lions n’est pas un gage de sécurité pour une équipe compétitive. » Affirme-t-elle.
Le coach à la crinière blanche affirme que personne ne l’influence dans ses choix. C’est le même qui dit qu’il n’y a aucun bon joueur dans le championnat du Cameroun; susceptible d’être appelé en sélection, que pour qu’il convoque un joueur il faut que ce dernier « soit titulaire dans son club ». Alors qu’il ne sera jamais capable de nous dire où il est allé observer les Essola Tchamba, Touomou Bayard et autres curiosités de sa liste des 23 joueurs de la Can 2008, et ce qu’ils sont devenus depuis lors alors qu’ils étaient les « meilleurs du Cameroun » il ya un an ! Il se contente de dire que Achille Emana est indiscipliné, sans dire le mal que ce garçon titulaire et brillant au Bétis Séville lui a fait, au même moment où il convoque en sélection les Kouemaha et autres Stéphane Essame, dont lui seul peut témoigner de la qualité et de la compétitivité.
Otto Pfister, en 2007, n’était que 7ème dans un casting de potentiels entraîneurs des Lions réalisé par une commission d’experts. Il a tout de même réussi à se faire nommer par le ministre des Sports Augustin Edjoa, qui laissait alors entendre que « l’Etat a pris ses responsabilités », et qui, après la défaite de samedi contre le Togo, a encore glissé : « Nous allons prendre des mesures fortes ». Mais contre qui ? Est-ce contre celui qu’il n’a cessé de couvrir d’éloges, mais dont le seul mérite est en réalité suspect : 37 ans d’expérience en Afrique (Burkina Faso, Sénégal, Kenya, Côte d’Ivoire, Egypte, Togo, Soudan) sans le moindre titre avec une sélection, même s’il se gondole à tort de la victoire du Ghana à la Coupe du monde des cadets de 1993 où il n’était que consultant auprès d’un entraîneur principal ghanéen. Le Togo s’est rendu vite compte de l’erreur d’être allé chercher Otto Pfister. Il a promis la victoire contre les Eperviers, parce qu’il les connaissait bien…Où est cette victoire?
Emmanuel Gustave Samnick, Mutations