L’ex international camerounais et entraîneur de football décrypte le jeu des Lions indomptables, évoque les tares de l’encadrement technique après deux défaites face au Japon et au Danemark.
Qu’est ce qui explique que l’élimination du Cameroun au 1er tour ?
Pendant les matches de préparation, il y a eu pas mal de croisements, de formules qui ont été expérimentés. Il faut un peu de temps aux joueurs pour que tout ça puisse marcher et que l’équipe retrouve une certaine solidité défensive et retrouve ses marques en attaque. Aujourd’hui, on est obligé d’aller avec ce qu’il y a de mieux, qui a marché pendant les tests. Les entraîneurs ont justement rappelé certains anciens pour avoir une certaine maîtrise et une assise défensives. Avec les jeunes à qui on a fait confiance trop tôt, il faut chercher le juste équilibre. Paul Le Guen doit composer avec des certitudes, je veux dire des joueurs qui ont de la maturité. Si vous mettez sur le terrain une équipe qui n’est pas expérimentée, ou qui n’a pas de niveau le jeu, vous aurez beau vous battre, vous n’y arriverez pas. Il faut une équipe composée pour tenir la distance. Ça se prépare durant les matches amicaux. On aborde la compétition avec des joueurs sûrs. On ne vient pas faire des essais en phase finale de Coupe du monde. C’est trop risqué.
Les gardiens de buts ne rassurent pas vraiment. Pourquoi sont-ils en baisse de régime ?
Vous avez raison. C’est un problème que Paul le Guen n’arrive pas à résoudre depuis la Coupe d’Afrique des nations en Angola. Et il est trop tard pour faire quoi que ce soi. Il faut faire confiance à l’un ou l’autre. Même si l’on ramenait Kameni, après avoir fait une mauvaise Can, il ne reviendrait pas à son meilleur niveau. A tout point de vue, notre équipe est très fragilisée. Il faut donner des conseils à ces enfants qui ont besoin de se rassurer. Et je l’ai fait en toute responsabilité. J’ai donné un conseil de supporters avisé.
Pensez-vous que l’ambiance délétère, à savoir des tensions, des clans et guerres de leadership entre joueurs, a contribué à affaiblir l’équipe?
En 1990, lors que les Lions indomptables ont atteint les quarts de finale en Italie, l’ambiance n’était pas vraiment pas bonne. Je vous dirais même qu’elle était aussi pourrie que cela. Mais il y avait un corps, un encadrement technique hautement qualifié, qui se mettait largement au-dessus des clans, tranchait sur des bases purement techniques. Il n’y a rien de plus grave quand un footballeur a l’impression qu’il n’est pas aligné, qu’il ne joue pas simplement parce qu’un autre l’en empêche. Pour avoir de bons résultats, il faut mettre tout le monde sur la même balance. Il faut savoir gérer cela, anticiper, mais surtout mettre sur le terrain la meilleure équipe possible.
Pourquoi certains joueurs n’arrivent pas à s’imposer en équipe nationale ?
Je ne peux pas vous le dire. En club, c’est un amalgame de joueurs qui viennent de différents horizons. L’équipe nationale à ses réalités. Mais, il faudrait faire en sorte que tous les joueurs qui l’intègrent soient performants. Rappelez-vous, le Ghana a laissé sur le banc Ali Muntari, l’une de ses pièces maîtresses, un joueur qui a gagné la ligue des champions en Europe. Les entraîneurs camerounais doivent mettre l’accent sur une discipline interne qui consiste à ne mettre sur le terrain, que ceux qui sont performants en équipe nationale. Et pour être performants, il faut jouer son jeu et jouer juste.
En six participations en Coupe du monde, le Cameroun n’a franchi le 1er tour qu’en 1990 et n’a plus remporté de matches depuis 2002. Qu’est ce qui peut être à l’origine des déboires de l’équipe nationale ?
On a même fait pire en 2006, quand nous n’étions pas qualifiés pour la phase finale de la Coupe du monde en Allemagne. Je pense que le football camerounais est en pleine reconstruction. Actuellement, une génération est en train de s’en aller. Il faut travailler dans l’optique d’assurer la relève, pour avoir une nouvelle équipe nationale du Cameroun, forte et conquérante. On ne peut pas se dire malheureux quand on voit dans quels clubs jouent ces jeunes là. Il faut maintenant se donner le temps de reconstruire sur des bases solides en s’appuyant sur ce qui a fonctionné par le passé.
Entretien réalisé à Durban, par Jean Robert Frédéric Fouda