Il a beau affoler les filets adverses en Europe, répondre par sa présence aux défenseurs les plus rugueux du monde, Samuel Eto’o demeure une énigme en équipe nationale tant il a tendance à jouer au rythme de ses coéquipiers. Le match contre le Togo a une fois de plus prouvé la tendance.
Avec l’avantage que s’est offert le Togo avec son but de la 12ème minute, la discipline tactique a disparu du côté camerounais, Eto’o ne se faisant que la representation de cette indiscipline. Tantôt à gauche, tantôt à droite, tantôt au départ des remises en touche, de tireur de coup franc, et cerise sur le gâteau, au départ des corners, Samuel Eto’o de par ses pertes d’energie a completement raté son match.
Contrairement à Artur Jorge, l’autorité de Pfister dans l’équipe camerounaise souffre de beaucoup de contestation et plusieurs ont tendance à attribuer à Eto’o les raisons de son mauvais jugement. Et pour cause, l’emprise de Samuel Eto’o auprès des dirigeants du ministère est telle que sa seule volonté suffirait à inquiéter drastiquement son avenir. La non sélection de Emana depuis quelques temps lui est d’ailleurs fort directement attribué, tout comme la fragilité de Stéphane Mbia dans le groupe.
Pour justifier cette mise à l’écart, Otto Pfister pointe du doigt la raison legère que lui a servi Emana pour son abscence en Afrique du Sud alors que trois jours plus tard, il jouait avec le Réal Betis. Rigobert Song et Samuel Eto’o eux-mêmes avaient pourtant prétexté avoir raté leur vol de Paris alors qu’il n’en était rien.
Le résultat de cette collusion semble nous éloigner de la coupe du monde 2010 puisqu’elle met les Lions Indomptables sous pression. Ils doivent prouver dans deux mois que le 28 mars ne fut qu’un faux pas sans envergure. Sauf que l’adversaire s’appelle le Maroc, sera aussi sous pression et que les Lions Indomptables négocient bien mal leur match à domicile, du moins à Yaoundé. Pourtant, il faudra réaliser un parcours exemplaire désormais pour pouvoir se qualifier. Avec un entraîneur sans poigne, des joueurs qui ne jouent pas toujours en club, et des jeunes qui ne peuvent pas s’exprimer à leur guise, est-ce soutenable ?
Samuel Eto’o devait être celui par qui nos succès post Lauren, Womé et surtout Mboma allaient arriver. Il était presenté comme le leader dont avait fortement besoin les Lions. Cependant, il faut chercher longtemps pour le voir tenir la dragée haute et faire gagner à lui tout seul son équipe nationale, à l’instar aujourd’hui de Michael Essien, Didier Drogba, Emmanuel Adebayor. C’était pendant la coupe des confédérations en France. Et là encore, le Cameroun avait tout à prouver, puisqu’il sortait d’une désastreuse coupe du monde en Corée un an plus tôt.
C’était aussi le moment du passage de temoin puisque plusieurs cadres, et non des moindres à l’instar de Patrick Mboma qui avait décidé de prendre un break pour protester contre les tracasseries administratives dont les Lions font toujours l’objet, étaient absents. Il s’agissait aussi d’une période de lutte pour le leadership, le capitaine Rigobert Song étant contesté de l’intérieur même et son brassard mis en jeu. Les choix du sélectionneur de l’époque, Winfrield Schaefer, faisaient aussi les manchettes.
Samuel Eto’o, de par son talent, était celui qui incarnait la nouvelle génération de lions affamés qui se devait de relancer le label Lions Indomptables. Y est-il parvenu ?
Les histoiriens feront certainement le bilan. Ce qui semble préoccupant est la possibilité que les Lions Indomptables puissent rater une autre fois la coupe du monde 2010 si rien n’est fait. L’on se doit de revoir de fond en comble les processus de sélection des entraîneurs, de veiller à ce que les entraîneurs ainsi choisis respectent leur cahier de charge. Mais le plus important sera pour les dirigeants des deux instances du football camerounais que sont la fédération et le ministère de décider rapidement s’il garde leur confiance en Otto Pfister.
En ce qui me concerne, Pfister ne mérite pas de conserver son poste. Qualitativement, il n’a rien apporté au jeu de l’équipe nationale, au contraire. Il a gaspillé le capital de discipline qu’avait instauré en son temps Artur Jorge.
Mais il vaudrait peut-être mieux déjà se préparer, si rien ne bouge, à ce que le Cameroun rate sa deuxième coupe du Monde consécutive.
Correspondance particulère de Marcel Andzé Abé à Paris.