Les deux premières rencontres de la campagne éliminatoire de la CAN 2008 donnent quelques indications sur les méthodes du nouveau sélectionneur des Lions Indomptables. Camfoot a effectué le décryptage du système Haan : son système de jeu, ses hommes de bases, ce qui a changé, les gagnants et les perdants du changement…
Système tactique : le choix du 4-3-3
Winnie Schäffer n’avait pas de religion sur le sujet, son équipe usa différents systèmes (à trois ou quatre défenseurs, un à trois attaquants), Artur Jorge avait clairement une préférence pour un 4-4-2 immuable avec un double pivot pour protéger la défense et des milieux offensifs excentrés. Arie Haan, lui a décidé d’aligner ses équipes en 4-3-3 à l’hollandaise. Une défense à plat, un milieu en triangle avec en phase offensive une pointe basse ( Saïdou ou Wamfor) tandis qu’en phase défensive, un double pivot (Nguémo- Saïdou ou Wamfor) couvre la défense avec une pointe plus haute (Makoun). L’attaque comprend deux ailiers qui servent un avant-centre. Avec une vraie volonté d’utiliser les ailes. Malheureusement, l’animation offensive souffre du fait que notre sélection ne possède pas de vrais joueurs d’aile. Salomon Olembé n’est plus le perforateur de défense du début de la décennie et assure plus qu’il ne provoque. Et à droite, Feutchiné et Douala ont joué blessés, on ne peut donc pas les condamner. Mais le fait est que l’avant-centre s’est bien souvent retrouvé seul devant, le système ressemblant d’avantage à un 4-5-1 avec un milieu renforcé et une pointe. D’autre part, la blessure d’Eto’o a modifié le profil de l’attaquant de pointe, Webo étant d’avantage un point de fixation. Le retour de blessure du Pichichi sera de ce point de vue intéressant pour voir s’il gardera le même système de jeu à Yaoundé où les conditions du terrain obligent souvent à passer par les airs. Sacrifiera-t-il son système en passant à deux attaquants axiaux ou favoriser-t-il malgré tout le jeu au sol que notre Ballon d’Or préfère ?
L’importance du coaching :
Artur Jorge était réputé pour sa fidélité à un onze type qu’il ne modifiait que rarement. Pour Arie Haan– qui a répété au cours des points presse de la semaine dernière, qu’il fallait s’armer de patience dans le match- les rencontres se gagnent à quatorze. Il est vrai que les circonstances (blessures de Douala et Feutchiné) l’ont aidé dans ce sens, mais le Batave est un adepte du coaching. En modifiant le profil de son équipe (plus athlétique en fin de rencontre contre la Guinée avec les entrées en jeu de joueurs à plus 1,85m), en déplaçant ses joueurs sur le terrain (Olembé de gauche à droite) ou en donnant des instructions différentes (Idrissou qui devait venir au second poteau quand le ballon était à droite). Et pour l’instant, ses choix se sont révélés payants puisque sur cinq des six buts inscrits depuis qu’il est aux commandes, un joueur venu du banc avait une contribution directe (but ou passe décisive). Cette impression se confirme lorsque l’on constate que l’ouverture du score intervient généralement après le premier changement.
Une hiérarchie légèrement remaniée :
Il avait prévenu dans sa première interview, il voulait « rajeunir l’équipe ». Arie Haan a commencé son œuvre en se démarquant des choix de ses prédécesseurs. Tout d’abord en donnant sa chance et sa première sélection à Landry Nguémo contre le Rwanda. Ensuite en titularisant Justice Wamfor et Eric Matoukou contre la Guinée Equatoriale. Mais ses décisions les plus « médiatiques » ont été le rappel (finalement avorté) de Pierre Womé et la non sélection de Saïdou qui était devenu un cadre. Le Batave veut imposer sa marque, tout comme il a fait le choix de ne pas sélectionner Bikey en manque de compétition. Mais, malgré tout, son management des hommes peut être contesté. D’abord, pour appliquer à deux situations identiques des mesures différentes : ainsi Olembé qui ne joue pas ou peu en club est titulaire en sélection, tout comme Ateba l’était avant la rencontre de Kigali. De même, sa gestion du cas Emana est désastreuse : pourquoi avoir appelé le toulousain, absent de sélection depuis la dernière CAN pour ne même pas l’aligner sur la feuille de match ? Et quid du cas Mettomo ? Invité surprise du stage, le joueur de Lucerne avait été annoncé comme suppléant numérique de Womé. Pour être finalement cantonné en tribune.
Meyong Ze grand perdant
Les choix du nouveau sélectionneur ont fait des heureux. Landry Nguémo s’est installé avec succès dans l’axe du milieu de terrain dans un registre de relayeur à l’ancienne. Justice Wamfor semble s’installer dans les petits papiers du coach, qui l’a fait rentrer à Kigali avant de le titulariser face aux Equato- Guinéens. Matoukou pourrait s’installer dans l’axe, il part en tout cas avec de l’avance par rapport à Bikey son concurrent le plus sérieux, à moins de revoir Geremi dans l’axe, même comme la complémentarité avec Song n’a pas sauté aux yeux. Feutchiné semble se rapprocher des titulaires avec deux matchs joués. Idrissou rappelé de dernière heure a inscrit deux buts et a eu une sortie à l’opposé de celle de son dernier match à Yaoundé. Carlos Kameni a retrouvé sa place de numéro 1 perdue depuis juin 2005.
Certains font les frais de ce changement. Saïdou a perdu son statut de cadre puisqu’il a suffi d’une seule rencontre pour que le coach le condamne. Bikey semble payer son manque de temps de jeu, mais la présence d’autres joueurs dans le même cas semble indiquer qu’il s’agit d’avantage d’un choix du sélectionneur puisqu’il avait déjà été sacrifié au Rwanda. Achille Emana semble toujours ne pas trouver grâce auprès du sélectionneur. Le plus grand perdant de cette rotation semble quand même être Albert Meyong Ze. Le système avec un seul attaquant axial semble le condamner à de longues heures sur le banc de touche. Surtout qu’entre-temps, Idrissou lui est passé devant. En difficulté à Levante, le meilleur buteur du dernier championnat portugais semble payer un profil non polyvalent d’attaquant axial. Il fait désormais partie du troisième choix, lui qui mettait la pression sur Webo pour occuper le second poste d’attaque bien que ses caractéristiques soient très proches de celles de Samuel Eto’o.