La qualification pour la prochaine Coupe du Monde n’a pas été compromise ce dimanche et c’est bien l’essentiel à retenir de la semaine internationale qui vient de s’écouler. La révolution attendue par tout un peuple n’a pas eu lieu et cette journée a confirmé que quelques mesures spectaculaires ne pouvaient résoudre les maux de notre équipe nationale. La blessure est profonde et il faudra encore beaucoup de travail pour retrouver le sommet du continent.
Le début de la phase retour des matchs éliminatoires jumelés Coupe du Monde/ CAN 2006 a été terrible pour le Cameroun. Non seulement en raison du score sec de notre rencontre, mais également en raison des résultats comparés des principaux favoris du continent africain. Car ce week-end a été marqué par la reprise en main des « gros », le Nigeria, la Tunisie, le Maroc, le Sénégal ont gagné et marqué les consciences en améliorant leur différence de buts. Et dans notre poule, l’ogre ivoirien n’a fait qu’une bouchée des Ecureuils béninois.
Autant dire que cette victoire étriquée des partenaires de Rigobert Song fait vraiment désordre dans la course à distance qu’ils se livrent avec les Eléphants. Deux victoires difficiles à Yaoundé, sur le même score (2-1) contre des adversaires qui n’ont pas pesé bien lourds à Abidjan (ndlr : 0-5 pour le Soudan et 0-3 pour le Bénin). Des victoires qui valent certes trois points, mais qui ne marquent pas le territoire, qui n’inspirent pas la peur aux adversaires au moment de se déplacer, qui relativisent l’importance des matchs à domicile. Et comme dans le même temps, on ne rattrape pas ces points à l’extérieur…
Une défaite de plus dans notre lutte à distance, heureusement que dans le même temps, une victoire égyptienne nous a permis de reprendre la seconde place du groupe à la Libye. Une Côte d’Ivoire qui domine largement ses matchs à la maison et rapporte des résultats de ses déplacements. Et qui complique sérieusement la tâche des Lions Indomptables, qui plus que jamais, devront gagner tous leurs matches pour espérer participer à la campagne allemande de l’été prochain. Et compter sur un adversaire pour faire trébucher l’ogre ivoirien. La mission s’annonce donc ardue pour nos protégés, surtout au regard de leurs propres insuffisances, le match contre le Soudan ayant mis en évidence leurs carences. Imprécisions techniques, manque de liant entre les lignes, manque de rythme, peu de répondant tactique, le contenu du match n’avait rien de reluisant. Abusant de longs ballons, avec une mauvaise utilisation des couloirs, nos protégés n’ont jamais semblé maître de leur sujet.
Devant une telle copie, il faut se poser les bonnes questions et ne pas se réfugier derrière de faux semblants. L’état du terrain, l’ambiance au sein du groupe, l’organigramme d’encadrement ne peuvent pas tout expliquer. Les Lions n’ont pas su trouver la solution adéquate pour percer le verrou des soudanais venus à l’évidence pour ne pas encaisser de but.
On peut déjà se demander pourquoi une équipe censée faire le jeu et mettre du rythme à une rencontre aligne huit joueurs à vocation défensive. De même, pourquoi évoluer sans attaquant de fixation, avec deux joueurs ayant le même profil et dont on a déjà vu que l’association était boiteuse ? Pourquoi le bloc-équipe était-il situé si bas, en général à quarante mètres de nos buts ? Pourquoi avoir aligné un milieu de terrain avec un profil si défensif ? Pourquoi avoir conservé une défense à quatre après que les soudanais aient été réduits à dix ?
Ce « petit » match est donc aussi à imputer à la gestion de son effectif par le sélectionneur dont le jeu frileux est aux antipodes de l’attitude conquérante que devraient avoir les Lions dans cette opération commando. Des remplacements inadaptés à la physionomie du match. Pourquoi avoir attendu si longtemps avant de sortir Atouba qui visiblement était mal à l’aise durant toute la rencontre ? Pourquoi avoir choisi de laisser Geremi sur le terrain alors qu’il était à court physiquement ? Pourquoi faire rentrer un joueur de rupture comme Ngom Kome à cette position alors qu’à ce moment du match, on joue à cinquante mètres du but adverse ? A ce niveau, par ses dribbles, il ralentit le jeu, alors que ses qualités aux abords de la surface sont plus dangereuses pour l’adversaire. Pourquoi avoir attendu si longtemps avant de faire rentrer Achille Webo, attaquant axial, au bon jeu de tête pouvant permettre une diversité dans les attaques ?
La première copie officielle du sélectionneur n’aura donc pas été exempte de tout reproche. Mais, il n’est pas le seul fautif, tant on a assisté à un ballet malsain ces dernières semaines. Les années passent, les dirigeants changent, mais le système perdure avec un ministre des Sports qui se prend pour le super manager des Lions Indomptables. S’affichant par-ci, promettant les primes de matchs par là, alourdissant la structure d’accompagnement avec des nominations régulières, on en oublie que cet homme a la responsabilité de plusieurs sports, et pas seulement la pratique de haut niveau.
La structure fédérative n’est pas exempte de reproches elle non plus.
Le stade Ahmadou Ahidjo n’a pas fait le plein, la faute à une politique de prix en dépit du bon sens. Comme toujours, c’était au public de payer pour le réaménagement du stade qui a vu sa capacité d’accueil officiellement diminuer, pour voir un match international. Ce public sevré de rencontres de haut niveau, en raison de l’indigence de notre championnat et des piètres performances de nos équipes en compétitions africaines ne méritait-il pas un coup de pouce ? Pour pouvoir communier avec ces héros qu’ils ne voient qu’à travers le petit écran, pour se changer d’un quotidien rendu tout aussi difficile?
On peut tous espérer que la prochaine rencontre permettra à chacun des acteurs de notre football d’améliorer sa partition et remercier la FIFA pour avoir légiféré sur le temps additionnel. Car si le Cameroun est encore en vie dans cette campagne éliminatoire, il le doit à la combativité et l’esprit de révolte des joueurs, qui ont su prendre des points lors justement des temps additionnels.
Une analyse de François Djomo