Il y a quelque chose de pathétique dans la mort désormais programmée de l’Union sportive de Douala. Pourtant, nous ne nous sommes guère fait d’illusions qu’une poignée de semaines – celles écoulées entre le dernier tournoi interpoules new-look et le début du nouveau championnat de 1ère division – pour comprendre qu’il serait difficile à l’Usd, tôt ou tard, de se détourner de l’issue fatale, destin prévisible d’un club qui a autant rassemblé que défait, durant sa longue histoire.
Quand on entend le bruit des casseroles venant d’une cuisine, c’est que l’intimité du couple a pris un coup. Vous n’avez donc pas besoin d’être dans la cuisine des Nassaras kamakaï pour savoir que, tous comptes faits, c’est bien d’une prise d’otage dont il s’est agi, et dont il s’agit. Otages libres, obligés, précieux, fortunés comme Michel Zouko et Michel Kamdem qui ont profité du système destiné à bâtir sur du sable, pierre par pierre, une pyramide de fric, de puissance et de gloire dont le sommet aurait la forme d’un tremplin et les fondations, celle d’un cercueil. Et puis l’otage suprême, c’est le football, devenu prétendûment économiquement fort. En s’aidant du silence complice ( ?) des supporters et sympathisants qui ont décidé ces derniers jours de laisser entendre leur voix, comme s’ils vomissent un repas désormais trop indigeste.
Un d’eux nous laissait entendre, dans les tribunes du stade de la Réunification dimanche dernier, à l’issue d’une autre défaite de leur équipe à Foumban : “ On trouvera encore rapidement le bouc-émissaire, en la personne de l’entraîneur. On va le limoger pour prendre un autre, pour les mêmes résultats. Quand on perd la guerre, c’est le général qui est mauvais. Alors qu’il faut se demander, s’il fallait aller ou non à cette guerre. Mais je peux déjà vous dire que cela ne changera rien ”. Un autre, visiblement plus inspiré, nous avouait : “ Nous avons essayé tout genre de médecine, pour curer le mal qui nous ronge : nous avons essayé la moderne, la traditionnelle, la chinoise et même la japonaise. Mais on ne pouvait pas guérir, car on ne savait pas déjà le mal qui a changé au club, sauf les dirigeants principaux. Que Zouko et Kamdem démissionnent, on saura qu’ils aiment l’équipe. C’est là le mal dont souffre l’Union de Douala ”.
La pathétique situation est là
Etienne Sonkeng, Roger Feutmba, Léa Eyoum, Doumbé Bosso, Isaac Sinkot, Ntoungou Mpilé, Bonaventure Djonkep, tous ces techniciens de renom et j’en oublie certainement, se sont succédés à la direction technique de cette équipe, pour un même résultat. Victimes ou otages de la politique du pire, celle de la fuite en avant des dirigeants, ils ont été chargés, depuis quelques années d’assumer la responsabilité des mauvais résultats de l’équipe. Echappatoire de fortune, trouvé par ces dirigeants dont le dépôt de bilan serait la solution miraculeuse, inéluctable devant laquelle il ne faudrait plus reculer ; une sorte de point d’achèvement, pour être en phase avec l’actualité.
Pathétique comme les supporters de l’Usd, dont on a longtemps voulu nous faire croire qu’ils étaient unis pour le meilleur et pour le pire, indissociables, comme des “ Témoins de Jéhovah ” eux qui sont seulement des amoureux du football. Rien au-delà. Eux qui deviennent de plus en plus raisonnables, et qui nous ont (2 d’entre eux) livré – plus haut -, des mots assez lourds de conséquence pour permettre aux autres, à tous les autres, de reprendre leurs esprits. Peut-être ont-ils découvert, à ce moment, le ridicule de la situation, eux qui savent que le football, à l’Union de Douala et ailleurs, n’a jamais gagné à se faire violer par deux seuls hommes, fussent-ils énormément puissants en apparence. Peut-être ont-ils compris que ce jeu, de toute façon, est éternel à l’opposé des mirages.
Pathétique comme les deux maigres points récoltés par les vert et blanc de Douala, pour les six dernières rencontres de championnat livrées. Deux points sur les dix-huit possibles. Une performance qui ne peut que gonfler le moral des futurs adversaires, en même temps qu’elle encouragera bon nombre des fanatiques, à rester à la maison. Et, contribuera à coup sûr à vider davantage le stade de la Réunification, dernier espoir – bien que vétuste et sous la menace d’une suspension, qui continue tout de même à réunir au moins une fois par semaine, les inconditionnels du ballon rond que nous sommes.
Il y a quelque chose de pathétique dans la mort de l’Union sportive de Douala. Comme le symbole déchiré d’une tranche de jeu où se sont cognés des rêves et des cauchemars.
Pourvu que la bonne solution soit vite prise, car cette année, il n’y aura plus une compétition salvatrice comme les interpoules de l’année dernière.
Par David EYENGUE NZIMA (Eto’ogol) Correspondance particulière