Toute la semaine dernière, la rumeur du non déroulement des matches de la 16ème journée du 47ème championnat d’élite de football, telle une traînée de poudre, a terriblement empoisonné l’atmosphère dans la capitale économique.
De nombreuses réunions secrètes se sont tenues, tant à Yaoundé qu’à Douala, avec des officiants bien connus de la scène footballistique camerounaise. Aux premiers rangs desquels : des membres dissidents du comité exécutif de la Fédération camerounaise de football (Fécafoot) dont les dernières sorties médiatiques (conférences de presse tenues à Yaoundé) continuent à faire l’objet de nombreux commentaires, des membres de la ligue provinciale de football du Littoral radiés de toutes les activités de la Fécafoot par l’assemblée générale de l’instance faîtière du football camerounais, des cadres du ministère des Sports et de l’éducation physique (Minsep) et quelques présidents de clubs de deuxième division du Littoral.
Ces hommes brandissaient d’ores et déjà la menace du boycott des rencontres comptant pour la 1ère journée de la phase retour de la compétition d’élite de football en cours. A Douala comme ailleurs où, dans l’ensemble, huit matches étaient au menu. Si dans la capitale économique, au stade de la Réunification, le plan machiavélique a été mis à exécution avec succès, la montagne a accouché d’une souris dans les autres stades de la République qui ont bien abrité les matches programmés : Canon de Yaoundé – Fédéral du Noun au stade omnisports Ahmadou Ahidjo de Yaoundé, Sable de Batié – Racing de Bafoussam et Fovu de Baham – Cotonsport de Garoua au stade municipal de Bamendzi à Bafoussam, Foudre d’Akonolinga – Union de Douala au stade Marc Vivien Foé d’Akonolinga, Mount Cameroon de Buea – Aigle de la Menoua au Molyko stadium de Buea, Espérance de Guider – Bamboutos de Mbouda au stade municipal de Guider.
Sale dimanche à Douala
Le spectateur qui arrive au stade de la Réunification dimanche 28 mai pour assister aux matches Ksa de Douala contre Sahel de Maroua à 14 heures et Les astres de Douala contre Impôts de Yaoundé à 16 heures se heurte à une première surprise à l’entrée. Les cerbères et autres vendeurs de tickets de circonstance sont incroyablement absents. Impossible de s’acheter son billet d’accès au stade. Déduction logique et sans effort, l’entrée est donc libre et gratuite. Sur l’aire de jeu, l’on franchit allègrement le rubicond de la bêtise sportive. Le stade, contre toute attente, est occupé, non pas par les joueurs attendus de la Ksa et Sahel, mais bien par de vulgaires footballeurs anonymes dont on apprendra quelque temps après qu’ils sont sociétaires de A.s. Babimbi et Bao F.c d’Edéa. Tout le monde tombe des nues. Question aux occupants du stade : “ que faites-vous là alors qu’il y est programmé deux matches de la D1 ? ” Réponse : “ Nous jouons un match amical ”. L’histoire commence à être à la fois rocambolesque et vraiment compliquée. Les athlètes des deux équipes attendues sont déjà exténués par une partie d’entraînements sans fin.
Le public supporte mal la mise en scène et, las d’attendre le coup d’envoi de la rencontre Ksa – Sahel, se déchaîne. Les spectateurs les plus déterminés veulent se faire justice. En un temps record, ils sont légion à exiger sur l’aire de jeu, la sortie des clandestins et des hors-la-loi. Ils seront bientôt rejoints par des éléments du Groupement mobile d’intervention (Gmi) n° 2 qui obtiendront le départ des fauteurs de troubles sans scrupules. Comble de ridicule. Alors que l’on croit la solution à l’équation enfin trouvée, des collaborateurs du directeur des stades débarrassent le stade des poteaux de quatre points de corners et retirent les filets accrochés sur les buts. Ces matériaux sont gardés à la direction des stades. Grébert Mandjeck, le directeur des stades, est injoignable. Son téléphone portable ne répond pas. A en croire des sources dignes de foi, le principal responsable du stade de la Réunification aurait reçu des instructions de sa hiérarchie, le Minsep. Ce dernier avait déjà instruit son représentant provincial du Littoral d’interdire toutes les activités de la ligue provinciale de football du Littoral, à la veille des rencontres comptant pour le deuxième tour éliminatoire des préliminaires de la coupe du Cameroun édition 2006.
Le meilleur perdant de l’imbroglio vécu dimanche 28 avril à Douala est le football. Une discipline sportive aujourd’hui sacrifiée à l’autel des intérêts égoïstes. Sinon, comment comprendre que des individus en quête de leurs seuls intérêts sacrifient le sport-roi au Cameroun et les jeunes qui le pratiquent ? Ces fauteurs de troubles pensent-ils seulement aux dépenses effectuées par les équipes pour préparer un match ? Pour arriver à Douala, les Sahéliens de Maroua ont investi au bas mot 10 millions de nos francs. Ce seul exemple suffit pour mieux comprendre les pertes subies. Et, l’avenir du football camerounais n’est-il pas du même coup à la dérive ? La complicité des autorités administratives crève l’écran. Dans le Littoral, toutes restent bouches cousues depuis le début de la crise. Le chef de l’Etat doit-il partir d’Etoudi pour venir résoudre les problèmes sportifs parce que les hommes qu’il a nommés sont défaillants ? Là est toute la question. Jusqu’à quand jouera-t-on à qui perd gagne ?
Par Honoré FOIMOUKOM