La scène vécue mercredi à la tombée de la nuit au stade municipal de Nk’ovos avait l’air d’une scène de film. Alors que la deuxième rencontre de la journée entre Achille Fc de Yaoundé et Dynamic de Ngaoundéré venait de s’achever, le stade de Nko’ovos se vide puisque la nuit tombe sur Ebolowa. Samuel Taku membre de la Commission Centrale d’Arbitrage (CCA) à la Fecafoot en pleine conversation dans un coin du stade avec Francis Yong, président de l’équipe qui porte son nom, le Yong Sports Academy.
La conversation va durer plus de 45 min, même la présence de l’administrateur Etienne Claude Tamo ne va pas ébranler Samuel Taku puisqu’il lui dira d’ailleurs quand ce dernier l’interpellait, d’attendre.
Pendant que Francis Yong s’entretient avec Samuel Taku, les arbitres du match Yong Sports Academy contre Diables Rouges de Maroua attendent au portail. La position de Mandeng Bakali, Bekolo Angoula et Mouandjo Kalla respectivement arbitre, arbitre assistant numéro 1 et assistant numéro 2 qui ont achevé leur match depuis 16heures est suspecte. Après près de 45 minutes de conversation, Taku va se rapprocher des arbitres. C’est à ce moment que nous l »avons interpellé pour lui demander ce qu’il peut discuter avec un président de club engagé dans la compétition dans le noir alors qu’il est membre de la commission chargée de designer les arbitres. Pris de panique, il lâche comme réponse à notre question, » je suis un fonctionnaire de finances depuis 25 ans, je suis à l’abris du besoin. Je ne peux pas me livrer à ce genre de jeu. La corruption n’existe pas dans mon vocabulaire « . Après insistance, il dira : » je suis entrain de préparer un stage d’arbitrage dans le Sud-Ouest et comme Francis Yong est un ancien arbitre et mon parrain dans l’arbitrage, c’est ce que j’étais entrain de lui dire « . Malgré cette réponse peu convaincante le doute et l’embarras se lisent sur son visage. Samuel Taku et les arbitres remontent vers le carrefour » Tamzou » pour emprunter le bus dans une agence pour le retour sur Yaoundé.
L’entraîneur de YOSA Joseph Monthé menace
Ce jeudi matin, les différents correspondants des radios privés de la capitale venus couvrir la compétition à Ebolowa évoquent dans leurs différentes tranches d’antenne matinales la scène vécue mercredi à Nk’ovos. Vers 10heures, nous décidons de joindre le président Francis Yong pour avoir sa version des faits. Le rendez-vous est pris à l’hôtel de la Vallée où sont logés les joueurs de Yong Sports, trente minutes après notre coup de fil. Francis Yong sera d’ailleurs très ponctuel, et nous passe la parole pour lui expliquer les faits. Avant toute chose, il monte inviter son entraîneur Joseph Monthé à la discussion.
L e président de YOSA va dans un premier temps nier qu’il a eu un entretien à la fin du match avec Samuel Taku. C’est lorsque nous lui dirons que nous l’avons personnellement vu entrain de s’entretenir avec le sieur Taku qu’il dira que » la corruption est une mauvaise pratique. Je ne peux pas corrompre les arbitres parce que j’ai été arbitre moi-même et pendant que j’arbitrais, personne ne m’avais corrompu « .
Embarrassé, il va se mettre à parler de tout et de rien, notamment de ses investissements et biens dans le Nord-Ouest. C’est à ce moment que Joseph Monthé va intervenir : « foutez le camp. Mon président n’a corrompu personne. C’est une méthode pour déstabiliser mon équipe. Nous allons appeler notre avocat, est-ce que c’est la Fecafoot qui vous a mandaté d’enquêter sur la corruption dans le football ? « .
La Fecafoot se saisit du dossier et permet de mieux comprendre
Tombi A Roko Sidiki, le président de la commission Centrale d’Arbitrage prend sur lui de connaître la vérité dans cette affaire. C’est ainsi qu’il décide d’interroger les arbitres de la rencontre. Ils vont effectivement décrire la scène. On apprendra ainsi qu’avant la rencontre Yong Sports Academy contre Diables Rouges de Maroua, Samuel Taku est allé rencontrer le président de Yong Sports, pour lui demander de lui remettre 500.000 francs CFA pour les arbitres afin que ces derniers lui facilitent la tâche, ce qu’il aurait fait.
Pour rassurer les dirigeants de Yong Sport, Samuel Taku s’asseyera sur la table du commissaire du match durant toute la rencontre. Il dira à ce dernier pour justifier sa présence sur la table qu’il a été désigné par la Fecafoot comme superviseur des arbitres. Personne ne le contredira puisqu’il est membre de la CCA. Mais il se passe que pendant le match, les arbitres qui apparemment n’étaient pas informés des négociations de Samuel Taku vont effectivement faire leur travail. La rencontre va se solder par la victoire des joueurs de Bamenda.
A la fin du match, les dirigeants de Yong vont demander à Samuel Taku de rembourser l’argent au motif qu’ils n’ont pas été soutenus par les arbitres tout au long du match. C’est donc de cela que le président Francis Yong et Samuel Taku discutaient à la tombée de la nuit la veille au stade municipal de Nko’ovos.
Pendant la fameuse scène, alors que Francis Yong répond à un coup de fil, Samuel Taku va se déplacer et viendra dire aux arbitres au portail de répondre par l’affirmative si jamais Francis Yong leur demandait s’ils ont perçu la somme de 500.000 francs CFA. Taku va finir par convaincre Francis Yong qu’il a remis de l’argent aux hommes en noir. Mais Francis Yong qui n’était pas convaincu va appeler les arbitres au téléphone avant de les retrouver à l’agence de voyage Bucavoyages où ils attendaient le départ. Il leur dira de rembourser l’argent puisque son équipe n’a bénéficié d’aucun soutien de leur part. Il sera surpris d’entendre que les arbitres n’ont rien reçu de son entremetteur.
Vexé, Francis Yong rattraperera Samuel Taku, qui pris de honte, va rembourser l’argent.
Samuel Taku, un récidiviste
Samuel Taku qui est originaire du Sud-Ouest a choisi sa cible : les clubs Anglophones. On apprendra d’ailleurs que samedi dernier lors de la première journée de ce tournoi interpoules il aurait contacté le président Charles Eteki Dikongue de Tiko United pour lui proposer les mêmes services. Le coach Alain Wabo a demandé à son président de ne pas se prêter à ce jeu, parce que « l’équipe qu’il entraîne est capable de gagner sur le terrain ».
La balle est du côté de la Fecafoot qui devra enquêter sérieusement sur cette affaire afin d’établir les responsabilités et de prendre les sanctions appropriées à cette pratique et ce fléau qui a la peau dure dans ce milieu où circule beaucoup de liquidités.
Guy Nsigué à Ebolowa