Les amoureux du football se demandaient en effet qui de Caïman Akwa club de Douala ou de Unisport de Bafang allait arracher le précieux ticket de la première division. Pour avoir le cœur net, pas moins de 25 000 personnes, malgré l’interminable averse qui a arrosé la capitale tout au long de la matinée, se sont déplacées en masse ce dimanche, en direction du stade militaire de Yaoundé, pour vivre en direct, l’empoignade en guise de finale de la poule B, opposant les deux principaux favoris à égalité de points au coup d’envoi.
C’est à la 79e minute de la partie. Une explosion de joie déchire le ciel de la capitale camerounaise, comme dans les années 80 où l’ancien champ de tir de la caserne servait de cadre aux rencontres du championnat national et même pour certaines matches internationaux de clubs ou de l’équipe nationale, les Lions indomptables. Le rêve du reptile sorti du fleuve Wouri à Douala vient de se briser. La faute à un certain N°12 des « sang et or« . Martial Poungoue libère enfin des centaines de personnes parties de leur Ouest natal en général et particulièrement du chef-lieu du département du Haut-Nkam. Le but égalisateur intervient ainsi sur une action des plus confuses dans la surface de réparation de Caïman Akwa club de Douala. L’excellent gardien Ngande Kouebou, masqué à la fois par ses défenseurs et les attaquants adverses, assiste impuissant à la scène.
Un but un peu chanceux, mais largement mérité par Unisport de Bafang, qui n’a jamais cessé de multiplier des raids dans le camp du représentant de la province du Littoral dès l’entame de la seconde mi-temps. Mais, les nombreuses offensives de Duvalier Ngako, Bertin Sadeu, ou du capitaine Jacques Noubiocheu sur l’aile gauche étaient chaque fois enrayées par le jeune gardien de Caïman. La joie des supporters et joueurs du flambeau de l’Ouest est donc légitime. « La deuxième division, c’est la mort! Nous avons trop souffert. Dieu merci, Unisport retrouve la première division, et sa véritable place sur l’échiquier national », lance, euphorique, Jacques Noubiocheu, porté en triomphe par des dizaines de fans, pour le remercier d’avoir réussi, au moment où les plus pessimistes commençaient à douter, à arracher ce précieux point du match nul, synonyme d’une place en D1 !
Caïman Akwa club de Douala joue sa dernière chance mercredi prochain, sur le même stade, contre Dynamique de Ngaoundéré, surprenant deuxième de la poule A basée à Ebolowa, le chef-lieu de la province du Sud. Le capitaine Biyaga et ses coéquipiers auront à coeur de se racheter devant leurs malheureux supporters. Bardées de t-shirts, survêtements, casquettes, foulards… aux couleurs rouges-blancs de leur club, ils étaient tout aussi nombreux, excités, soucieux et surtout, impatients d’en finir avec Unisport de Bafang. Durant quatre vingt minutes, c’est eux qui ont donné de la voix, galvanisés par la courte avance prise dès la huitième minute, grâce à l’artificier Eric Yopa. Le longiligne attaquant ouvrait le score, d’un lobe de la tête, à la suite d’une mésentente entre le gardien Lucien Eyili et ses défenseurs.
A la pause; malgré les conseils d’un aîné, Eugène Ekeké, ancien Lion indomptable appelé en renfort aux côtés de l’entraîneur principal Bile Tanga, Caïman, secoué de toutes parts, ne sut conserver son avance, à défaut d’aggraver le score, un deuxième but qui l’aurait mis totalement à l’abri de mauvaise surprise. En raison de ses intrusions répétées sur la ligne de touche, presque sur l’aire de jeu, l’expulsion de Eugène Ekeké à la 53e, par l’arbitre central, fût le premier signe d’une déchéance qui se profilait à l’horizon, après de nombreux incidents produits avant le coup d’envoi.
En effet, une forte odeur de mysticisme planait sur cette rencontre capitale. Des évènements qui se passent encore de tout commentaire. Transpirant à grosses gouttes, deux supporters habillés aux couleurs de Unisport, font irruption sur l’aire réservée à l’échauffement des joueurs, à proximité des vestiaires, transportant un sac de riz de 25 Kg. Les deux individus ne se feront pas prier pour répandre la précieuse denrée dans tous les sens, pour, disaient-ils, « chasser les esprits maléfiques et annihiler toutes les pratiques obscures » de leurs adversaires devenus le temps d’un match de football, des ennemis.
Côté Caïman, la réplique ne s’est pas faite attendre. Un « gourou » venu des rives du Wouri a été chargé d’arroser l’endroit d’une potion qui était elle aussi censée combattre les esprits du mal. Tension d’avant match, xénophobie affichée par des supporters dont l’enjeu de la rencontre a fait perdre toute raison, ou tout simplement rivalité sportive? Toujours est-il que les vingt-deux acteurs ont poussé le bouchon un peu trop loin, en refusant catégoriquement de se serrer la main, devant près de 25 000 personnes et des officiels stupéfaits. C’est de bonne guerre.
Jean Robert Frédéric Fouda
A Yaoundé
Réactions
Daniel Ikoumba, Unisport
Nous allons fêter ça. Les joueurs le méritent bien. Le match a été très difficile, et lorsque vous prenez un but d’entrée face à Caïman, la suite de la rencontre devient très compliquée. Après plusieurs tentatives vaines, nous avons obtenu l’égalisation qui vaut de l’or. C’est tout à fait mérité. D’ailleurs, tout le monde misait d’abord sur Unisport, avant de pronostiquer en faveur de Caïman. Je salue leur bravoure. Et leur souhaite bonne chance face mercredi face Ngaoundéré (Dynamique, ndlr). En plaçant deux équipes en première division prouvera que notre poule était effectivement la plus relevée.
Serge Bakang, Caiman
Je suis amer et en veut surtout à ce faux remplacement qui a causé un trou sur le flanc droit de notre défense. Ils sont passés par là pour égaliser. Nous avons payé cher. C’est toute l’équipe qui endosse la responsabilité alors que nous étions à 10 minutes de la D1. C’est une terrible désillusion. Maintenant, étant donné que nous sommes dos au mur, il va falloir jouer le coup à fond mercredi, lors des barrages. Et là, nous savons très bien qu’aucune erreur ne nous sera plus pardonnée. Tout le monde à Douala attend cette victoire.
Unisport
1- Eyili, 13- Nguegom ( puis Woukoue), 2- Ikoumba, 7-Sagong, 4- Kuipou, 3- Kinkeu (puis Seumo), 5- Hemadeu, 10- Sadeu, 6- Noubiocheu, 12- Poungoue, 14- Ngako. Remplaçants : 15- Ngongue, 17- Souffo, 9- Sami, 11- Onana, 16 – Kameni.
-Coach : Nguegom Pierre et Chameni Zeggi.
Caïman
1- Ngande, 3- Atangana, 4- Diboa, 8- Mouen ( puis Babakalack), 11- Wadyoh, 7- Mbella, 15- Bweniack, 18- Bakang, 10- Biyaga (cap), 13- Doualla (puis Mbarga), 21- Yopa. Remplaçants : 6- Tobbo, 5- Bane, 16- Engono, 14- Bidias, 9- Edjenguele.
-Coach : Bile Tanga et Eugène Ekeké.
AC : Mohamadou Mal Souley
A1 : Abdoulaye Gambo
A2 : Dombol Jean Claude
A4 : Bekolo Angoula