Hier, mercredi 31 mai, dans un coin du stade de la Réunification de Douala, Emile Joël Bankoui, commandant du groupement territorial de gendarmerie de Douala a le téléphone collé à l’oreille. Bien que retiré de la foule, quelques-uns de ses éléments ont tenu à faire une ceinture afin de le tenir à distance des oreilles indiscrètes lors de sa conversation téléphonique.
Celle-ci va durer une cinquantaine de minutes. De temps en temps, son visage laissera entrevoir des signes de nervosité. Emporté dans la discussion, il va parfois hausser le ton. C’est ainsi que l’on pourra l’entendre reprendre : « Oui, son Excellence […] Non, monsieur le ministre, il s’agit d’une affaire grave avec destruction de biens publics […] J’ai fait le constat et je dois amener les responsables du stade pour besoin d’enquête et les entendre sur procès verbal », lâche-t-il d’un ton sec.
De quel ministre était-il question? « C’est sûrement du ministre des Sports et de l’Education physique. J’ai entendu le Délégué des Sports du Littoral interpeller le commandant, téléphone en main, en lui disant, c’est le ministre », lance un jeune homme au milieu de la foule compacte. Une remarque que Emmanuel Guidio, le délégué en question va tenter de démentir. Toujours est-il que la décision prise par Emile Joël Bankoui d’embarquer Grébert Mandjeck, directeur des Stades de Douala, va connaître une nouvelle orientation. Finalement, Grébert Mandjeck, au volant de son véhicule, à ses côtés Emmanuel Guidio, va sortir du stade de la Réunification suivi de deux pick-up de la gendarmerie en direction des services du préfet du Wouri sous des huées d’une foule en furie.
Vandalisme
A l’origine de ce ramdam, les malheureux évènements dont le stade de la Réunification a été l’objet. Dans la nuit du 30 au 31 mai dernier, la cuvette de Bépanda à Douala a été l’objet d’actes de vandalisme perpétrés par des individus non encore identifiés. Les poteaux qui servaient de cadre de buts ne sont plus en place. Et nulle part, à l’intérieur comme à l’extérieur du stade, l’on n’observe la moindre trace du métal endommagé. Nuitamment, ceux-ci ont été retirés et coupés à la scie. « Il était 8h30 quand M. Tombi m’annonce au téléphone la disparition des poteaux. Arrivé sur place, j’ai fait le même constat. C’est regrettable pour notre football. J’ai l’impression que l’on en veut au directeur du stade et non au football », explique Grèbert Mandjeck, directeur des stades de Douala, le visage dégoulinant de sueur.
Dans l’impossibilité de trouver une réponse aux questions des uns et des autres, les deux gardiens qui veillent de jour comme de nuit sur ces installations sportives répondent ne rien savoir sur ces actes de vandalisme. « Je suis arrivé au stade à 19h, tout était en place. Quand je reviens autour de 2h du matin, je constate que les poteaux ont disparu », explique, sans plus, l’un des vigiles aux forces de l’ordre. Par où seraient donc entrés les vandales dans un stade fermé avec des cadenas et dont aucune infraction n’aurait été constatée au niveau des portes?
Comme dimanche dernier, à l’occasion de la 16e journée du championnat national de football 1ère division, les rencontres prévues hier au stade de la Réunification de Douala ne se sont pas jouées. Faute d’éléments essentiels, les buts. Les joueurs de l’Union sportive de Douala et Sable de Batié vont sortir du stade déçus. « Plus rien à cacher, le football camerounais sombre dans le ridicule. Tout est clair qu’il s’agit là d’une histoire de gros bonnets avec au centre des intérêts qui n’ont rien à voir avec le football. Et ce sont les joueurs et les dirigeants de clubs qui en souffrent », explique Edouard Djonkam, entraîneur principal de Sable.
C’est la même déception du côté de Michel Kaham, entraîneur de Ksa, qui, à son tour, n’a pas pu recevoir Coton Sport de Garoua. Dans la mi-journée, Emmanuel Guidio, délégué provincial des Sports pour le Littoral, a signé un communiqué fermant le stade à toues les activités. « En outre, en attendant les résultats de ladite enquête, le stade de la Réunification est à compter de ce jour [31 mai 2006] fermé à toutes les activités de football », écrit-il. Dans un communiqué rendu public hier, le chef du département administratif de la Fécafoot, Thérèse Manguele, fait savoir que « les rencontres de la 17ème journée du championnat national de première division prévues [hier] au stade de la Réunification de Douala, se joueront au stade municipal de Buea le 1er juin 2006 [aujourd’hui] aux mêmes heures et avec les mêmes officiels » Une grande première pour la cuvette de Bépanda, construite en 1972 pour accueillir les rencontres de football de la 8e édition de la Coupe d’Afrique des Nations organisée par le Cameroun.
Dippah Kayessé