Il y a presque deux semaines, le train du 47ème championnat national de football du Cameroun est rentré en gare. En attendant le classement officiel, le titre a déjà, une fois de plus, pris la direction du Nord. Cotonsport, le club de Garoua, ne récolte-t-il pas une fois de plus les fruits d’un travail bien pensé en amont?
L’équipe porte-étendard du septentrion a acquis son 4ème sacre consécutif avec 53 points, son 7ème titre depuis depuis son accession à l’élite en 1993. Un exploit remarquable. Camfoot est allé voir la philosophie des hommes derrière ce remarquable exploit.
Créée pendant la saison sportive 1986/1987, sous le parrainage de la Société de développement du coton (Sodecoton), l’une des plus importantes entreprises parapubliques du Cameroun, Coton Sport est une équipe corporatiste qui participait au championnat de cette catégorie. De réels moments d’épanouissement, d’émulation et de divertissement pour les dirigeants et le personnel.
C’est après la descente en deuxième division de l’équipe phare de Garoua de l’époque, Etoile filante, que les dirigeants de la modeste équipe du championnat corporatif décident de l’engager dans le championnat civil. « Il n y avait plus dans le Nord aucune équipe qui nous permettait de vivre les matchs de première division. On s’est dit pourquoi on ne se lancerait pas dans le championnat civil, et on a donc affilié l’équipe qui était corpo dans le championnat civil », explique Pierre Kapténé, l’informaticien en chef de Coton Sport.
Budget
L’équipe végète pendant près de six années dans l’enfer de la D2 avant d’accéder à l’élite en 1993. Le ton est vite donné et Cotonsport est vice champion du Cameroun à sa première saison en D1 et aussi en 1995. En 1996, elle obtient son premier sacre. Le doublé coupe championnat est acquis en 1998. Dans l’opinion publique, un nouveau ténor du football camerounais est né. Le souvenir des époques glorieuses de Canon de Yaoundé, Oryx de Douala, Union de Douala et Tonnerre de Yaoundé refait surface, tout observateur espérant que le club de Garoua fera mouche sur la scène continentale.
C’est que, Cotonsport de Garoua affiche les moyens de sa politique. Sur le plan financier, son budget tourne autour d’un demi milliard de FCFA provenant en grande partie de la Sodecoton (Société de développement du Coton), qui apporte « en moyenne 300 à 350 millions de francs ». Le reste ? « L’équipe doit se débrouiller avec le soutien des prestataires des services, les cotisations des supporteurs et des membres, des placements des joueurs, etc. », précise le président de l’équipe, qui ajoute qu’au-delà de cet argent de la Sodecoton, qui « est bien géré », le champion du Cameroun en titre a une bonne organisation dirigeante.
« Tous ceux qui ont eu à diriger cette équipe depuis qu’elle existe continue à exercer soit au niveau du conseil d’administration soit au niveau du bureau directeur. Le tout premier président, en l’occurrence Madala Kami est membre du conseil d’administration jusqu’aujourd’hui. Donc, vous avez quand même une capitalisation de certaines expériences, contrairement à ce qu’on observe dans certaines équipes civiles: ceux qui partent combattent ceux qui arrivent. Ça n’arrive pas chez nous. Ce sont des passionnés qui continuent à mettre leur temps, leurs moyens à la disposition de l’équipe », assure Pierre Kapténé.
Eldorado
Les moyens financiers de Cotonsport de Garoua lui permettent de s’offrir, non seulement un entraîneur expatrié, le Sénégalais Lamine Ndiaye, mais aussi des joueurs aux talents éprouvés, ne serait-ce que localement. L’on peut puiser dans les équipes juniors et cadettes de cette formation, mais, les nouvelles faces sont généralement ceux-là même qui sont sortis du lot pendant une saison. A l’exemple d’Herman Dzumafo, l’un des meilleurs attaquants de Sable de Batié de la saison dernière qui a échoué cette saison à Roumde Adjia. Même si c’est davantage pour avoir une bonne carte pour des aventures professionnelles, la destination Garoua est devenu un Eldorado pour les footballeurs locaux.
A juste titre. Les primes de signature y avoisinent les 6 voire 7 millions de francs Cfa. Avant le 5 de chaque mois, les joueurs ont droit au salaire, dont le minimum serait de 100 000 francs. Les primes de matches, en baisse cette année, sont de l’ordre de 30 000 par joueur. Selon l’enjeu du match, elles peuvent atteindre le taux du salaire minimum suscité, voire plus pour les matches des compétitions africaines.
Contrairement à certaines équipes locales, on parle rarement d’arriérés de primes de match à Roumde Adjia. Le problème matériel n’est, à vrai dire, pas une préoccupation dans Cotonport. « Pas que nous roulons sur de l’or, loin de là, précise Pierre Kapténé souriant. Mais, les joueurs eux-mêmes savent que lorsqu’ils se mouillent, ils ont toujours un retour juste ou la juste motivation ». Cela ne s’arrête pas là. Côté médical, les joueurs sont aux bons soins de l’équipe médicale que dirige le kinésithérapeute Jean Jacques Yapélé. Les problèmes d’intendance du club sont réglés au quotidien, avec rigueur, par la direction sportive que coordonne Ahmadou BOubakary.
Malheureux africain
On peut bien comprendre pourquoi les joueurs de Cotonsport de Garoua se défoncent sur les aires de jeu, notamment sa pelouse du stade omnisports de Roumde Adjia, à côté du lycée technique de Garoua, où les matches perdus à domicile depuis sa création se comptent sur le bouts des doigts. Cette année seulement, Coton Sport n’a perdu aucun match à domicile, même si les bruits de couloir accusent plutôt la torride température qui prévaut dans le coin et les des difficultés liées aux transports par route ou par train. Contrairement à l’équipe de Garoua, peu d’équipes du championnat ne peuvent s’offrir le luxe du voyage aérien.
Tout n’est pas non plus si rose pour le géant du Coton. Les dirigeants et les joueurs subissent régulièrement les railleries et la haine d’une certaine opinion publique qui estime que l’équipe de Garoua fait du surplace en compétition africaine. Peut-être avec raison puisque, depuis la saison 1994-1995, soit une année après son accession en D1, elle a toujours participé aux compétitions organisées par la CAF. Son meilleur résultat reste cette finale de la coupe de la Caf perdue en 2003 devant Raja de Casablanca. Cette année encore, l’équipe de Garoua a été éliminée en 16èmes de finales de la ligue des champions par la modeste équipe de Saint Eloi Lupopo de Lumumbashi.
La performance de Cotonsport durant la phase aller de cette saison 2005-2006 n’a pas été aussi brillante qu’à l’accoutumée. Le titre symbolique de champion de la phase aller a été arrachée de rude lutte, n’obtenant le titre qu’après la victoire de l’Union de Douala sur son dauphin immédiat, Les Astres de Douala.
L’équipe est restée séreine malgré le départ de leur coach et mentor Lamine Ndiaye en cours de saison. Gabriel Haman, qui a pris le relais, connaissait bien les joueurs ayant été auparavant entraîneur adjoint du coach démissionnaire. Le résultat? sur 30 matches disputés, 14 matches gagnés, 11 nuls, 5 défaites, 50 buts marqués, 22 encaissés pour 53 points. Mieux donc que Canon, Astres, et Fovu, de potentiels prétendants au titre cette saison.
Repères
A-Championnat national
– Saison 1992/1993 : accès en première division
– 1993/1994 : Vice champion
– 1994/1995 : Cinquième place
– 1995/1996 : Vice champion
– 1996/1997 : Champion du Cameroun
– 1997/1998 : Champion du Cameroun
– 1998/1999: Vice champion
– 1999/2000 : Vice champion
– 2000/2001 : Champion du Cameroun
– 2001/2002 : Vice champion
– 2002/2003 : Champion du Cameroun
– 2003/2004 : Champion du Cameroun
– 2004/2005 : Champion du Cameroun
– 2005/2006 : Champion du Cameroun
B-Coupe du Cameroun
– Saison 1993 1994 : Quart de finale
– 1994 1995 : Huitième de finale
– 1995 1996 : Demi-finales
– 1996 1997 : Quart de finales
– 1998 1999 : Finaliste
– 1999 2000 : Quart de finales
– 2000 2001 : 16ème de finale
– 2001 2002 : 16ème de finale
– 2002 2003 : vainqueur de la coupe
– 2003 2004 : vainqueur de la coupe
– 2004 2005 : Demi finale
– 2005 2006 : en cours