Le tout nouveau président de la ligue de football professionnelle, Pierre Semengue, était hier au ministère des Sports et de l’Education physique, le lendemain même de sa nomination. Juste retour d’ascenseur pour le général, qui a été coopté par le ministre Michel Zoah.
Quelques heures après le texte du ministre des Sports lu sur les ondes de la Crtv, s’exprimant chez nos confrères de Cameroon tribune, Pierre Semengue a dit toute sa gratitude à Paul Biya et au ministre des Sports. « Je suis surpris par cette nomination, a-t-il dit. Je pense qu’on a dû consulter le président de la République pour le faire. Puisque nous sommes à sa disposition, il a dû donner son accord. Je le remercie pour cela. Je remercie le ministre des Sports qui a pensé que je pouvais aider à la promotion du football camerounais. »
Pas un seul mot de remerciement à l’endroit du président de la Fédération camerounaise de football, Iya Mohammed. Or, la rhétorique consacrée voudrait que le général Semengue ait été nommé « sur proposition du président de la Fécafoot ». Faux. Toutes les propositions faites par Iya Mohammed ont été balayées d’un revers de la main. « L’Etat est en train de nous émasculer sous nos yeux », a réagi un vice-président de la Fécafoot.
La nomination de Pierre Semengue a jeté un coup de froid sur certains dirigeants de la Fécafoot qui voient leur filer entre les doigts, un grand enjeu de pouvoir : la ligue de football professionnel. C’est la ligue qui va désormais diriger et organiser les championnats Mtn Elite One et Two. Il reviendra donc à ses dirigeants de négocier les juteux partenariats avec les sponsors, de recruter du personnel, de gérer une manne financière qui devrait avoisiner le milliard par an (la subvention de l’Etat, celle de la Fécafoot, etc.).
Trafics, corruption, détournements
Autant dire que les chantiers qui attendent Pierre Semengue à la tête de la ligue sont nombreux. Mission impossible ? Non, mais difficile. Le premier des chantiers consiste à redonner vie au football des clubs, moribond, qui n’attire plus grand monde dans les stades, du fait de la mauvaise image que trainent les dirigeants de la Fécafoot.
Autre mission, convaincre les sponsors, qui, jusqu’à présent, traînent le pas et refusent de s’engager avec la Fécafoot. Il faut déployer des tonnes d’énergie pour convaincre Mtn, principal soutien des championnats Mtn Elite One et Two de poursuivre son soutien. Selon certaines sources, échaudé par l’incompétence et le peu de crédit des dirigeants de la Fécafoot, Mtn ne manifestait plus beaucoup d’enthousiasme à sponsoriser un championnat pour lequel il avait une visibilité quasi nulle, mis à part son nom de baptême.
Pour une vraie professionnalisation du football camerounais, les dirigeants de la ligue doivent imposer un minimum d’organisation aux clubs et trouver le moyen de pallier l’absence de stades de football dignes de ce nom, qui fait qu’aujourd’hui, on joue encore sur des terrains nus.
Le général a-t-il le profil de l’emploi ? Difficile de répondre à cette question par l’affirmative ou par la négative. Les principales critiques que l’on entend pour l’instant portent sur son âge : 76 ans. Il lui revient donc de transformer ce « handicap », pour certains, en atout. On le dit humble, mais autoritaire et rigoureux. Il doit s’entourer de nouveaux hommes, animés d’un nouvel esprit, rien à voir avec les dirigeants actuels de la fédération, passés maîtres dans l’art « des trafics, de la corruption et des détournements », ainsi que le dénonce leur propre président d’honneur, Roger Milla.
Jean-Bruno Tagne