En avril 2004, l’interruption du processus électoral à la FECAFOOT instruite par le Secrétaire Général de la Présidence de la République était assortie d’une prescription, à savoir la « relecture des textes de la FECAFOOT ». Suite à cette intervention qui faisait écho aux revendications de certains acteurs du football camerounais, la FIFA avait accepté d’organiser une réunion tripartie FIFA-MINJES-FECAFOOT à Zurich le 05 novembre 2004. Les conclusions de cette réunion qui s’imposaient à toutes les trois parties avaient été consignées dans un compte rendu visé par la FIFA en date du 08 novembre 2004.
Au cours de cette réunion tripartite, la première priorité du MINJES (aujourd’hui MINSEP) qui avait justement mené des consultations était l’annulation du droit de vote accordé à des personnes physiques au sein de la FECAFOOT. Ce point avait été examiné en premier et malgré l’insistance des représentants de la FECAFOOT, la FIFA avait tranché en faveur du MINJES. D’où le premier point du compte rendu de cette réunion qui précise que « La FECAFOOT et le MINJES acceptent que les personnes physiques ne soient pas membres de plein droit de la fédération. Les personnes physiques, quel que soit leur statut ou leur fonction, ne pourront assister à l’assemblée générale qu’à titre consultatif (pas de droit de vote) ».
Dans la pratique, cet accord relatif à l’interdiction du droit de vote aux personnes physiques n’a été mis en œuvre que partiellement, au niveau fédéral à travers l’article 22 alinéa 1 des Statuts de la FECAFOOT. Cependant, dans la perspective des élections de 2009, l’Assemblée Générale de la FECAFOOT a adopté le 07 mai 2005 le Statut spécial des ligues régionales, départementales et d’arrondissements qui, en son article 4 alinéa 1 fait des membres des conseils sortants à titre individuel, des membres de plein droit des assemblées régionales, départementales et d’arrondissement (électeurs et éligibles) à la fin de leur mandat. Ceci en violation de l’accord ci-dessus.
Plus concrètement, les membres des conseils régionaux et départementaux, soit 1080 personnes physiques au total, qui ont été élus en avril 2000 sont automatiquement reconduits dans leurs mandats respectifs tous les quatre ans. La principale conséquence de cette situation est que la quasi-totalité des exécutifs élus en 2000 restent en poste. A titre d’exemple, c’est comme si on décrétait que les membres du bureau de l’Assemblée Nationale du Cameroun sont automatiquement reconduits en leurs qualités de députés à la fin de chaque mandature, sans l’obligation d’aller se représenter devant les électeurs.
Il est aujourd’hui évident que l’adoption du statut spécial des ligues décentralisées de la FECAFOOT dont la FIFA ignore l’existence, avait pour unique but de contourner l’application du premier accord de la tripartite de Zurich. Au cours des différentes séances de travail relatives à ses textes que la FECAFOOT a eu avec la FIFA ces dernières années, elle a toujours pris le soin de mettre en avant ses Statuts tout en dissimulant l’existence du Statut spécial.
L’article 4 alinéa 1 du statut spécial accorde donc illégalement, depuis huit ans le droit de vote à 1080 personnes physiques composant les 58 conseils départementaux (15 personnes par ligue départementale) et les 10 conseils régionaux (21 personnes par ligue régionale), empêchant ainsi toute alternance à tous les niveaux au sein de la FECAFOOT.
La persistance de la FECAFOOT à organiser à tout prix les élections dans les ligues décentralisées sur la base de ce statut spécial en l’état s’explique par la certitude absolue de la reconduction systématique des exécutifs en place depuis maintenant 13 ans. Une fois cela acquis, l’élection au niveau fédéral ne sera qu’une formalité sans aucun enjeu, comme en 2005 et en 2009.
Dans la situation actuelle, seul le Ministère des Sports et de l’Education Physique est en mesure d’interrompre le processus électoral en cours à la FECAFOOT, en impliquant la FIFA à travers les conclusions de la tripartite du 05 novembre 2004.
Pour cela, il suffirait de se baser sur les conclusions de cette réunion tripartite qui a juridiquement valeur de contrat entre les trois parties. La FECAFOOT a d’ailleurs fait valoir ces conclusions pour annuler la convention qui la liait au ministère privant le trésor publique de plusieurs milliards de francs CFA de quote-part. Elle a également fait valoir ce compte rendu pour refuser de recommencer les élections dans les ligues décentralisées garantissant une victoire sans faille au président sortant à l’élection fédérale de mai 2005.
Si la FECAFOOT peut faire valoir ce compte rendu, il est évident que le MINSEP peut en faire autant, notamment en ce qui concerne l’application du premier accord relatif à l’interdiction du droit de vote aux personnes physiques qui – à travers l’article 4.1 du Statut spécial des ligues régionales, départementales et d’arrondissement – est aujourd’hui la revendication principale de tous les vrais acteurs du football camerounais qui se sont vus dépouillés de leurs pouvoirs au profit des personnes physiques qui n’ont pour la plupart aucune implication réelle dans les activités du football. Une situation qui peut justifier que quel que soit la médiocrité du bilan des dirigeants en place, la majorité des membres de l’Assemblée Générale leur accorde systématiquement son soutien.
Sans risque d’une quelconque ingérence, le Ministère des Sports et de l’Education physique en tant que partie prenante de la réunion tripartite de Zurich du 05 novembre 2004 est donc fondé pour saisir la FIFA et exiger qu’elle amène la FECAFOOT à respecter les engagements pris depuis 9 ans dans le cadre de cette réunion. Elle est d’autant plus fondé à le faire que le compte rendu de ladite réunion mentionne « qu’en cas de problème, il faut qu’un dialogue soit immédiatement établi avec la FIFA pour trouver rapidement des solutions adéquates respectueuses de la loi nationale et des principes sportifs internationaux ».
ABDOURAMAN HAMADOU