C’est avec un mélange de finesse, de professionnalisme et de tact que Valery Mezague a géré sa communication après avoir décliné l’appel de la France pour celui des Lions Indomptables. Le sélectionneur des espoirs français de l’époque, Raymond Domenech, entendait en faire son milieu de terrain clé. Winfrield Schaefer, son alter-ego camerounais, avait d’autres plans pour le jeune homme.
Déjà à 19 ans, il affichait une maturité hors du commun. Convoqué pour un match amical par la France qui devait le lier définitivement, il a préféré dans le même temps aller jouer un tournoi officiel avec les Lions, et y a donc bâti sa stratégie de communication.
Sans avoir signé de contrat professionnel, il avait alors déjà marqué 6 buts avec Montpellier.
Pour son premier match avec les Lions Indomptables, Valery a égayé avec son jeu dynamique. Simon Pierre Etoundi de Cameroon Tribune indiquait à l’époque que:
Et puis vint la Coupe des Confédérations en France et Schaefer sélectionne Mezague. Sa réaction?
Et tout se passe bien dans ce tournoi, jusqu’à la perte sur le terrain de Marc Vivien Foé. Et lors de la finale, Valery joue d’entrée contre son pays de naissance, la France. Le Cameroun perdra le match durant les prolongations avec la validation du but en or. Et c’est le jeune homme qui a été envoyé sur le terrain pour le remplacer numériquement et qualitativement.
Malgré le traumatisme de la perte du leader spirituel Marc Vivien Foé, le Cameroun savait qu’il avait découvert un joueur doté d’un potentiel énorme en Valery Mezague.
Un mois seulement après les émotions intenses de la Coupe des Confédérations 2003, alors que le jeune retourne à Montpellier après une visite chez ses parents, il est victime d’un accident grave de la circulation. Le cerveau est touché. Il devra d’abord se concentrer sur sa santé:
Puis vint l’optimisme après son réveil suite à une délicate opération au cerveau:
Et après son retour au jeu contre Toulouse en Novembre après six mois de convalescence.
« Sa force physique et mentale lui a permis de surmonter cette épreuve, explique Rudy Riou, son ancien partenaire à Montpellier à SoFoot. J’étais allé le voir à l’hôpital, il m’a expliqué qu’il avait eu un coup de fatigue dans une ligne droite. Il n’avait pas bu d’alcool, il rentrait voir sa famille, l’accident bête. C’était difficile de revenir pour lui, mais il y est quand même arrivé. »
Mais depuis lors, il ne retrouvera plus toutes ses capacités et son évolution a pris un coup.
« Il était diminué. Parfois, sur le terrain, il avait des absences, il déconnectait du match, comme s’il était ailleurs », témoigne Jean-Claude Plessis, bientôt rejoint par Frédéric Sammaritano, qui l’a côtoyé pendant une saison à Vannes : « Cela durait quelques secondes. Quand on jouait au poker dans le bus, on sentait des moments de flottement, comme s’il n’était plus tout à fait avec nous. »
Portsmouth, séduit par son talent trouve un arrangement avec Montpellier sous forme de prêt. Mais il ne se verra pas offrir la chance de jouer et ne bénéficie que de mémo de match.
De retour à Montpellier une année plus tard, ses dirigeants lui en veulent d’avoir accepté son précédent prêt. Il ne bénéficiera lus du même soutien. Mais même dans ce contexte, Winfried Schaefer continue à l’appeler en équipe nationale. Il sera de la sélection de la CAN2004 avec le groupe Lions.
Puis, ça allait un peu moins bien en club. Son évolution avait été stoppé par son gravissime accident. Et puis, Otto Pfister le rappelle dans les Lions alors qu’il évolue en seconde division française. Sa joie est palpable. Voici ce que nous écrivions le 12 décembre 2006 après l’annonce de la liste qui le rappelait en sélection:
Valery avait des qualités recherchées au haut niveau. Sa puissance tout en finesse, sa technique balle au pied, son sens élevé de l’anticipation, son intelligence du jeu, sa grosse panoplie tactique et sa volonté de se réaliser lui donnaient de l’avance sur les autres. Mais il avait besoin de sentir important, il avait envie de jouer, en Lions comme en club.
Peut-être est-ce la raison pour laquelle il ne s’est jamais installé durablement dans un club. Mais la grosse histoire de sa carrière demeure les blessures à répétition. Nous titrions d’ailleurs en 2011 ceci:
Forcément, derrière le footballeur, se cache l’homme, encore plus apprécié. Tous ceux qui l’ont côtoyé encensent une personnalité attachante et pleine de charme, bien que discrète et introvertie. « C’était quelqu’un de très agréable qui véhiculait une vraie joie de vivre, se rappelle Omar Daf avec émotion. Je me souviendrai toujours de son sourire… Quelles que soient les circonstances, il n’a jamais changé. » Quand Julien Cordonnier évoque « un mec exemplaire, qui se donnait toujours à 100% pour le club », Frédéric Samaritanno garde, lui, l’image d’un homme « toujours positif malgré les déboires ». Avant d’étayer au téléphone le fond de sa pensée : « Un jour, on s’était bien engueulés tous les deux pour tirer un coup franc contre Strasbourg. Finalement, c’est moi qui le tire et j’envoie une frappe pourrie largement au-dessus. Derrière, sa première réaction a été de m’encourager. C’était à son image. »
La voix triste et lancinante, le journaliste de L’Est Républicain Sébastien Daucourt poursuit l’éloge unanime : « Quand il jouait à Sochaux, il y avait une gamine de 12 ou 13 ans qui l’adorait, c’était son joueur préféré. Quand il est parti du club, ils sont restés en contact via ses parents. Il leur envoyait souvent des places pour aller voir ses matchs à Vannes ou à Châteauroux. C’était quelqu’un de très fidèle. »
Au travers de différentes interviews dans le Doubs, le journaliste de L’Est Républicain a tissé avec le Camerounais une véritable relation d’amitié. « Il y a tellement à dire. On parlait souvent de la vie en général, de tout et de rien. Il évoquait rarement son accident, mais un jour je lui ai demandé s’il voyait la vie autrement depuis son crash. Sa réponse, je m’en souviens encore : « Cet accident, si personne ne m’en parlait, je l’aurais déjà effacé de ma mémoire. Je suis passé à autre chose. Je veux simplement profiter de la vie et de chaque instant. » »
Valery ne pourra cette fois-ci pas amorcer un retour comme il l’a tant souvent fait avec les blessures. Une autopsie pratiquée sur son corps a montré que comme Marc-Vivien Foé, il a été victime d’une crise cardiaque des suites d’une cardiopathie, une malformation cardiaque.
Il repose désormais à Baleveng, dans la concession familiale au milieu de ses ancêtres.
Adieu Valery…
La Redaction