L’échec répété en deux éditions des Lions Indomptables à se qualifier à la coupe d’Afrique des nations, pose très clairement, le problème de la qualité des joueurs appelés en sélection nationale. Par une habitude de facilité qui a fini par s’installer et à devenir la règle, les différents sélectionneurs qui se sont succédé à la tâche, ont fait de cette qualité, l’apparente condition sans laquelle, il était impossible de rejoindre la tanière ou à tout le moins, d’en être un élément important. Mais aujourd’hui devant la désolation et le rendu médiocre des prestations de cette cuvée de joueurs là, de sérieuses interrogations s’élèvent.
Etre professionnel hors du pays et n’importe où pour n’importe quelle performance, suffit-il toujours? Et a contrario, mener une brillante carrière locale tout en forçant le respect de ses pairs et entraîneurs, est-il une damnation qui contraint et contraindra peut-être encore à jouer les seconds rôles ou les faire-valoir des sélections secondaires pour compétitions de seconde zone? Le débat, devant l’essai en cours de professionnalisation du football local, mérite discussion. Car qu’inventera-t-on encore quand tout le monde arborera la fameuse étiquette? Sauf à établir une hiérarchisation vraiment subjective du professionnalisme, il semble en l’espèce que l’on devra se résoudre à revenir au basique, à ce qu’on n’aurait jamais dû négliger de prendre en compte et qui a pour nom tout simplement, la compétence.
Par elle, on entend ici en matière de football, l’exceptionnalité développée par un joueur à son poste. Une exceptionnalité reconnue de tous, indiscutée du public parce que appréciable de visu à travers les compétitions ou, consacrée par les observateurs avertis qu’on peut suivre à travers les médias.
Revisiter les fondamentaux
Jusqu’ici, ce critère n’a pas toujours brillé par son application. Evacué voire étouffé dans son exigence, par la commune et fallacieuse présomption de performance attribuée à chaque quidam qui franchissait la frontière et réussissait à se trouver un club. La logique du raisonnement établi est toute simple mais toute aussi puérile. Elle tient du postulat selon lequel « qui réussit à s’exiler et arrive à jouer après tant d’adversité et de difficultés supposées, est forcément bon ». Postulat qui tient la route dans certains cas exceptionnels mais n’est plus valable devant la surenchère actuelle du prix du footballeur.
Les clubs de moyens et faibles budgets sont nombreux et pour étoffer leur effectif, recrutent à moindre coût et ce, à tour de bras des joueurs perfectibles sur un marché africain où le rêve de l’exil est aussi celui d’une forme de consécration sociale et de réussite. Et non comme on serait tenté de le croire, celui de l’aboutissement d’un talent.
L’exil est plutôt une piste comme une autre de recherche de la réussite. D’où, l’éparpillement actuel de nos jeunes talents aux quatre coins du globe pour beaucoup plus, une amélioration de leur condition de vie que toute autre chose. Si la reconnaissance en équipe nationale suit, alors tant mieux. Sur cette méprise donc, perdure les erreurs de casting qui nous valent la déchéance.
Tout observateur averti du championnat local, conviendra que comparaison faite, il y a pour des postes précis en équipe nationale, du répondant sur place qui nous aurait épargné du bégaiement produit par certains joueurs dits professionnels. Que des Mandjeck, Kwekeu, Bong et autres consorts du même acabit dont les noms ne me reviennent plus, obstruent l’avenir de joueurs prometteurs comme les Ebah Tobie, Ngando Mbiala, Babanda, Ashu Tambe, Faï Collins, Tchoubia et j’en oublie, est une injustice inacceptable.
N’oublions pas que la sélection nationale camerounaise ne s’est bien portée qu’autant qu’elle réussissait l’alchimie joueurs du terroir/ professionnels. Le brassard pour la petite histoire revenant toujours à un joueur local. C’est de ce mélange traversé par la mentalité nationale de non renonciation, qu’est né l’esprit conquérant des Lions Indomptables.
La grande équipe qui bat l’Argentine en coupe du monde 1990 et nous sert de référence à tous les coups, compte ce 08 juin au stade Giuseppe Meazza, 6 joueurs non professionnels sur 11 qui ont pour nom Tataw le capitaine, Ebwelle Bertin, Massing Benjamin, Ndip Aken Victor, Mbouh Emile et Libih Thomas qui rentrera en cours de jeu à la 66e minute en lieu et place de Louis Paul Mfédé. Kunde Emmanuel et Kana-Biyick ne sont pas très éloignés de ce statut là. L’énorme Milla ne rentre en jeu qu’à la 82è minute pour faire tenir le résultat. C’est tout dire.
Le tout professionnel qui semble nous obséder est une fausse option. Il est encore temps de bien regarder les talents qu’on laisse dépérir sur place.