Les promesses électorales n’engagent que ceux qui y croient. Cette boutade attribuée à un ancien homme d’Etat français ne s’est jamais aussi bien illustrée que lors de la récente élection à la présidence de la Fédération camerounaise de football ( Fecafoot). Bien que probable, la victoire de Samuel Eto’o a quelque peu surpris de nombreux observateurs dans la mesure où le match semblait gagné d’avance. Et ce d’autant plus que le président intérimaire, candidat à sa propre succession, affichait une sérénité qui pouvait laisser croire que le résultat était connu d’avance.
Cette apparente confiance pouvait s’expliquer par les promesses de vote clairement exprimées, photos à l’appui, par certains électeurs. On a ainsi vu des délégués de 6 régions sur 10 parapher des documents accordant par anticipation leurs suffrages à Seydou Mbombo Njoya. Ce dernier semblait donc bien parti pour remporter largement le scrutin.
Dans le camp d’en face, on redoutait un vote très serré où la différence pourrait se faire sur une ou deux voix. D’où des soupçons de fraude ayant débouché sur le débat houleux concernant la légalité ou non du mandat accordé au candidat Jules Denis Onana en tant que représentant du Syndicat national des footballeurs (Synafoc). Le résultat issu des urnes a balayé toutes ces appréhensions. Considéré au départ comme un challenger, Samuel Eto’o a gagné assez nettement par 43 voix contre 31 pour son adversaire. Il établi par ailleurs le record rare d’un ancien joueur devenu président de fédération. Ailleurs en Afrique, certains joueurs de renom comme l’ivoirien Didier Drogba ont échoué dans un tel projet.
Avec le recul, on constate qu’un tel exploit n’aurait pas été possible sans les 13 voix supplémentaires dont a bénéficié l’ancien capitaine des Lions indomptables et qui lui ont permis de faire la différence. A supposer que les voix promises au départ par les 30 délégués régionaux ainsi que la voix du candidat rallié soient allées au candidat sortant (5 voix par région), les 31 voix n’auraient pas visiblement suffit pour l’emporter. A contrario, le président élu qui n’avait jusque-là bénéficié officiellement que du soutien d’une région ainsi que du ralliement de 3 candidats l’a emporté finalement avec plus de 10 voix d’écart.
Comment expliquer ce retournement de situation ? Il se raconte qu’avant le début des opérations, chacun des deux principaux protagonistes aurait pris des dispositions pour s’assurer du respect des promesses pré-électorales. Toujours est-il qu’en pareil cas, une ou plusieurs défections de dernière minute ne sont pas à exclure. Quelques voix peuvent donc basculer dans un camp comme dans l’autre en fonction des motivations des votants. Globalement, ce qui apparaît aux yeux de certains comme un exploit inédit, voire un mystère pourrait donc s’expliquer par certains ralliements de dernière minute en provenance du camp d’en face. Il n’est pas exclu que le nouveau président ait par exemple bénéficie du vote sanction des représentants de certaines régions en état d’instabilité (Extrême-Nord et Sud-Ouest notamment) et surtout des suffrages des représentants des corps de métier (championnats Élite 1 et 2, arbitres…), tous soucieux de l’amélioration de leurs conditions de travail en cas de victoire de SEF dont les nombreuses promesses en matière de relance du football camerounais sont bien connues.
En dehors d’autres paramètres moins visibles, le triomphe de Samuel Eto’o s’explique surtout par la volonté de changement qui animait la plupart des délégués et les amoureux du football en général.
Jean Marie NZEKOUE, éditorialiste