On savait Rigobert Song très impliqué dans la gestion du quotidien des Lions Indomptables du Cameroun. Le Team Manager des Lions Indomptables se laisse entretenir de la préparation du match de dimanche prochain contre la Lybie. En même temps que nous avons fait le tour d’horizon des problèmes qui ont souvent plombé les performances en équipe nationale. Magnang rassure.
On est à quatre jours pour préparer le match crucial de dimanche prochain. Est-ce que le fait pour l’équipe du Cameroun de n’avoir pas disputé de matchs lors des périodes Fifa ne peut pas avoir un impact négatif sur sa performance ?
Honnêtement, en jouant des matchs amicaux, c’est toujours intéressant. Vous savez, on n’a jamais pu établir un programme pour les matchs amicaux lors des périodes Fifa, comme ça se passe ailleurs. C’est un véritable souci. Mais, lorsqu’on n’arrive pas à avoir des matchs, il faut passer au plan B. le plan B, c’est au moins se regrouper, même si au bout, il n’y a pas de match, c’est l’occasion de se rencontrer et de parler d’un peu de tout et s’entraîner ensemble. C’est l’occasion pour l’entraîneur de se référer au dernier match sur ce qui a été positif et ce qui ne l’a pas été. A cette période-là, on n’a pas eu la chance d’avoir un match. Il y avait quelques difficultés au niveau de la Fédération, et l’entraîneur et moi, avons convenu qu’il fallait absolument, ne serait-ce que se regrouper d’abord. En faisant ce stage de quatre jours, on parvient à se corriger par rapport à ce qui a marché au dernier match et ce qui n’a pas marché. Ce n’est pas suffisant, mais je tiens à vous dire qu’il y a quelques temps avec Arthur Jorge, on était toujours dans la même situation, sans véritable match de préparation, comme tout le monde le souhaitait. Moi, j’ai joué des matchs de préparation contre des équipes de Cfa de Paris, pour aller disputer une Coupe d’Afrique. Ça ne nous a pas embêtés autant que ça. L’important, c’est de pouvoir créer une cohésion ; ce qui nous a manqué depuis quelques temps. Il faut que les gars se remettent, parce qu’il y a eu une période où on n’arrivait même pas à s’asseoir en famille. C’est déjà cette famille-là et nous comptons maintenant sur le talent des joueurs qui sera au service de l’équipe. Quand on regarde l’équipe de la Lybie, si on prend au niveau du talent, joueur par joueur, les nôtres sont capables de faire la différence. Mais, comme le football ne se joue pas qu’individuellement, notre but est d’abord de remettre les joueurs ensemble, pour qu’il y ait cette cohésion afin de faire le match qu’il faut.
Et pendant ce temps, l’adversaire, la Lybie se prépare depuis …
Nous sommes obligés de nous soumettre au programme de la Fifa. Or, les Libyens n’ont aucun joueur qui joue en Europe, ou alors ils ne sont pas nombreux s’il y en a. le gros de notre effectif est en Europe et on est obligé, à un moment donné, de respecter le calendrier Fifa. La chance qu’ils ont aujourd’hui, c’est que, aux, du jour au lendemain, peuvent arrêter leur championnat et faire leur stage et travailler plus. Ils ont eu deux mois de stage alors que nous ne pouvons pas. Nous avons aussi bien envie. Mais, nous sommes limités par la réglementation de la Fifa en matière de libération des joueurs. Mais, je pense que c’est un souci. Mais, nous comptons encore sur les qualités des joueurs que nous avons. Et comme je le dis, nous devons respecter cette équipe Libyenne. Nous avons perdu le match aller. Mais, nous pensons que nos joueurs étant en club, lorsqu’ils arrivent et qu’on accepte d’être tous ensemble, d’essayer de savoir pourquoi nous sommes là, c’est une bonne chose. On a tout de même vu lors du dernier match, même si on n’a pas gagné, sur le plan personnel, j’étais satisfait, parce que, nous avons vu l’esprit, le refus de perdre, l’envie de ne pas encaisser de but. On a vu des joueurs, chacun dans tous les compartiments, apporter ce que nous n’avons pas vu depuis quelques temps. Cela nous donne espoir de penser qu’on a une équipe capable de faire de bonnes choses. Notre handicap est qu’on n’arrive pas toujours aujourd’hui à avoir un calendrier normal des matchs amicaux. Il y va de mon rôle. Il va falloir mettre un calendrier en place, parce que je pense que c’est important.
Pourquoi le Cameroun n’arrive pas toujours à mettre sur pied un calendrier de matchs amicaux ? Qu’est-ce qui fait problème ?
A l’époque, j’étais en activité et c’est des choses qui m’échappaient. Depuis que j’ai été nommé Team Manager, je me suis rapproché d’autres personnes qui jouent aussi ce rôle dans leur pays. Pour tout vous dire, j’ai rencontré le Team Manager de l’équipe de France, avec Didier Deschamps, qui m’ont expliqué comment ça se passait et finalement, j’ai compris qu’en réalité, il n’y pas grand-chose. Le calendrier se prépare sur deux ans. Là, nous sommes tellement en retard et il faut gagner du temps. Et pour qu’un calendrier soit dans les normes, il faudrait que nous puissions aussi accueillir des équipes chez nous. A partir du moment où nous ne pouvons pas jouer à domicile, ça fait problème, parce que si je viens vous voir aujourd’hui pour un match, il faudrait que je programme un match retour. On a déjà bouclé une date Fifa. Si je peux venir jouer chez vous et que l’inverse est impossible, on ne pourra jamais boucler un calendrier.
Il faudrait quand même que sur le plan technique notre stade soit dans les normes de pouvoir nous permettre d’accueillir aussi un match. J’ai soumis le problème et j’espère que d’ici là sur le plan technique, nous pourrons avoir un bon stade pour que nous aussi, nous puissions accueillir des équipes, qui ne vont pas jouer à 15h. Il faudrait qu’on puisse jouer en nocturne. Et pour cela, il faut qu’il y ait l’éclairage et un certain nombre de choses. Pour cela on va commencer comme ça et j’espère qu’on va pouvoir mettre un calendrier en place.
Vous avez été nommé par la Fédération camerounaise de football. Maintenant qu’un Comité de normalisation a été mis en place, à qui rendez-vous compte ?
Ma hiérarchie reste la Fécafoot. C’est vrai qu’il y a un Comité de Normalisation qui est là, avec un président à qui je rends compte. Mais, ce qu’il faut savoir, c’est que je travaille en collaboration avec le Directeur administratif. Je suis là pour l’organisation et la mise en place de toutes les structures autour des Lions Indomptables pour que les choses se passent comme elles devraient l’être. Je travaille en collaboration directe avec le staff technique. Les besoins du staff technique et des joueurs, c’est moi qui les gère et je rends compte au président du Comité de Normalisation qui est ma hiérarchie. Je travaille en collaboration avec le Directeur administratif, qui n’a pas le même rôle que moi. Quand il s’agit des aspects financiers, c’est lui.
Revenant à cette question des matchs amicaux, est-ce que les Camerounais n’ont pas le droit de s’inquiéter quand ils voient que les Lions ne s’évaluent pas de matchs amicaux et vous nous rassurez que tout va bien ?
Aujourd’hui, on a la volonté de bien faire. Mais, sachez que parfois on est buté. Avant, sans matchs amicaux, il y avait des résultats. Aujourd’hui, il y a plus d’inquiétude, parce qu’il n’y a plus de résultats et on pense qu’il faut jouer des matchs. Nous avons joué à l’époque contre l’Argentine, parce qu’on était déjà au top. On a joué contre l’Angleterre et après contre la France. Je comprends l’inquiétude aujourd’hui avec l’équipe que nous avons. Nous sommes à une phase de reconstruction et il faut comprendre que chaque chose vient avec le temps. Evidemment, on a besoin des matchs amicaux. Depuis que je suis là, j’ai compris beaucoup de choses et c’est quand même important. Et on ne va pas seulement s’arrêter au niveau des matchs amicaux. Pour l’instant on essaye de remettre d’abord l’équipe en place. Au sein de l’équipe, chacun était dans son univers et je pense qu’on a déjà gagné quelque chose en rapprochant les joueurs et avec le travail du sélectionneur sur les plans technique et tactique, on pourra faire la différence. On n’a plus envie de rater 2014. Ce besoin est immédiat. Je pense que les choses sont en train de s’améliorer. Ça a commencé, même si ça n’a pas l’air. Mais, les choses avancent petit à petit.
Après la Coupe du Monde 2010, des responsables de l’équipe nationale avaient dit que la haine était grande entre les joueurs et le ministre des Sports de l’époque avait parlé des égos surdimensionnés à l’Assemblée nationale. Vous avez aussi reconnu sur une chaîne de télévision qu’il y a un problème de génération au sein de cette équipe nationale. En ce moment on a le même effectif. On a aussi parlé d’une mésentente entre Samuel Eto’o et vous. Est-ce que vous pouvez nous rassurer que tout cela est du passé et que tout le monde regarde désormais dans la même direction ?
Il y a eu beaucoup de choses qui ont été dites et je ne me suis jamais exprimé, parce que je pensais que ce n’est pas le moment. Il y a eu beaucoup de choses qui se sont dites sur moi et qui ne me ressemblent pas. Aujourd’hui, le temps nous a donné raison. Avec Samuel (Eto’o, ndlr), il y a eu un petit froid. Mais, ça n’avait pas aussi l’ampleur qu’on a voulu faire croire, où on n’arrivait pas à se voir. Je me suis exprimé et mon petit frère m’a dit aussi ce qui n’allait pas. Dans la vie, même dans la famille, il arrive parfois qu’on n’ait pas les mêmes points de vue. On s’est expliqués en hommes responsables et aujourd’hui, on se rend compte qu’il n’y avait pas grand-chose entre nous. Quand je parlais d’un conflit de génération, c’était pour dire que nous, quand nous sommes arrivés dans l’équipe, il y avait des anciens comme Roger Milla, Bell Joseph Antoine, Thomas Nkono. Nous ne pouvions pas avoir les mêmes délires. J’étais avec le feu Marc Vivien (Foé, ndlr) et Raymond Kalla. Et nous passions toute la nuit dans la chambre de feu Marc Vivien, parce que je dormais avec François Omam Biyik à l’époque. Aujourd’hui Alexandre se sentira plus à l’aise avec Nkoulou, par exemple, parce qu’ils ont des complicités. Samuel se sentira mieux avec un autre. Mais, comme nous sommes une équipe, le souhait c’est que tous soient ensemble et ne parlent que football. Dans le langage du foot, il n’y a pas d’aîné, ni de petit frère. On est là pour un but et je pense qu’aujourd’hui on voit qu’il y a cette amélioration et tout le monde est conscient qu’en fait, c’est le ballon qui nous rassemble et il faut qu’on rende ce que les autres nous ont donné. La seule et grande chose, c’est le drapeau. Quand on le lève et qu’on chante l’hymne, tout le monde est debout. Même à notre époque, on se battait dans les vestiaires et arrivés sur le terrain, chacun savait ce qu’il avait à faire. C’est un peu différent aujourd’hui, parce que dans la jeunesse d’aujourd’hui, plusieurs n’ont pas vécu la réalité du pays. Quand on grandit dans les centres de formation, c’est différent par rapport à celui qui a joué au pays dans Tonnerre où il fallait faire des kilomètres pour aller s’entraîner. En ce moment, tous le monde se rend compte qu’il y a des efforts à faire.
Entretien mené par Antoine Tella à Yaoundé