Tricheurs? Le sélectionneur des cadets peine à trouver les joueurs de cette catégorie d’âge qui évolue avec leur véritable âge. Il exprime quelque peu sa désolation et souhaite obtenir la coopération des entrepreneurs de centre de formation pour dénicher les poulains. Discussions à bâtons rompus.
La détection : un mini tour du Cameroun
Nous avons organisé des détections sur le triangle national il y a quelques mois. Dans ce grand voyage, seul le grand Nord (Nord, Extrême Nord et Adamaoua) n’a pas été couvert. Nous avons observé une cinquantaine de joueurs. Comme l’exige le règlement de la CAF, les joueurs doivent évoluer dans leur catégorie respective. C’est pour régler les polémiques liées aux âges que nous avions soumis les gamins retenus à la radiologie du poignet. Plusieurs de ces jeunes ne correspondaient pas à la catégorie cadette et ont été écartés. Cette restriction des effectifs nous met dans un imbroglio compte-tenu de la programmation de la CAF qui attend les listes des joueurs qui prendront part aux éliminatoires de la coupe d’Afrique de la catégorie qui se joueront en 2013.
La radio du poignet un filtre
Plusieurs jeunes sont passés à la trappe de la radiologie du poignet gauche. Pour ce faire, nous étions obligés de faire un double travail afin de sélectionner des joueurs qui évolueront dans leur véritable catégorie. Je puis vous dire qu’il n’a pas été facile pour nous de refaire des tests afin de retenir des gars plus jeunes. Nous avons organisé il y a peu des détections au stade de l’école publique de Bonamoussadi à Douala avec une centaine d’enfants. Au terme de la journée, sur le nombre d’enfants observé, nous n’avions retenu que deux qui reflétaient la catégorie cadette. Nous les avons envoyés faire la radio qui s’est avérée concluante. Ces derniers sortaient d’un même centre : Leader sport academy. Nous profitons de cette occasion pour lancer un appel à tous les responsables des centres de formation pour qu’ils procèdent à cette radiologie afin d’établir un fichier, regroupant les apprentis par catégorie. Quand on s’engage à former les enfants, il faut mettre les moyens afin de donner à tous les chances de pouvoir évoluer. La responsabilité des jeunes est un travail énorme.
Une forte concentration aux brasseries et à la fundesport dans l’effectif retenu
Les brasseries et la fundesport (fondation Samuel Eto’o) ont pris un pas d’avance sur les autres. Tous les enfants de ces centres ont fait l’examen de détection de l’âge osseux. Ceci nous a rendu la tâche moins compliquée. Nous sommes rentrés dans leurs fichiers pour nous enquérir des gamins qui correspondaient à la catégorie que nous recherchions. Nous les avons vus jouer. Nous avons également supervisé les matchs et les séances d’entraînement de ces écoles de football. Au sortir, nous avons retenu plusieurs jeunes qui conciliaient le talent et l’âge demandés. Nous invitons les promoteurs de centre de formation qui sont à la traîne de s’arrimer afin de donner la chance à leurs pensionnaires.
Quelles sont les dates arrêtées par la CAF pour rendre les listes ?
Il était prévu que nous envoyions les listes le 15 juillet. La CAF a repoussé au 15 août. Il faut pouvoir préparer les listes que nous allons les envoyer le moment venu. Nous prendrons où ces joueurs ? Si ces enfants ne vont pas faire les examens au préalable pour nous faciliter la tâche, les choses ne seront pas évidentes pour nous. Nous avons pour l’instant une liste d’une trentaine de joueurs qui ont cet âge (15 – 17). Mais il y a la qualité qu’il doit falloir regarder, nous allons rentrer dans le sélectif. Car il faut se rassurer qu’ils ont les aptitudes pour évoluer dans des compétitions de haut niveau.
Pourquoi toute cette exigence ?
Il faut toujours se mettre dans la tête que la catégorie des cadets est une catégorie très sensible. Si on rate à ce niveau la formation des enfants, ceci aura des répercussions dans leur carrière future. Il ne faut pas oublier que le plus important ici c’est l’apprentissage et non le résultat comme plusieurs personnes le pense. Avec l’expérience que j’ai glané autre cieux, on ne parle jamais de victoire chez les cadets, mais de formation.
Un travail qui porte des fruits
Le travail effectué l’année dernière porte des fruits. Plusieurs des jeunes avec lesquels nous avions travaillé évoluent en division d’élite. On peut compter dans la cuvée des juniors qui était en Afrique du Sud il y a quelques mois, tout comme celle en stage en Allemagne actuellement un nombre important de cadets que nous avions encadrés l’année passée.
Tout passe par un travail à la base
Pour ressortir notre football du carcan dans lequel il se trouve, il faut opérer un travail de fond. L’équipe fanion de demain sera tributaire d’une bonne formation de jeunes à la base et une transmission linéaire des catégories inférieures. C’est à la base qu’il faudrait réussir la formation. Car les jeunes que nous formions aujourd’hui sont âgés entre 15 – 16 ans, dans les cinq prochaines années ils constitueront le socle de notre sélection nationale sénior.
Le temps un facteur à intégrer
Il faut accorder du crédit, donner du temps à ses jeunes, car ils ont un retard dans leur formation. C’est pour cette raison qu’il faille rester patient et se lancer dans la détection. C’est pour quoi j’exerce ce métier sans complaisance. Je ne suis pas là pour faire plaisir aux gens. Il faut que les uns et les autres comprennent que ce que je fais aujourd’hui apportera beaucoup pour notre football dans les années à venir.
Les choix objectifs
Il n’y a pas de sentimentalisme dans mes choix. Quand je me rends dans un centre de formation et que j’y retrouve des enfants qui ont entre 15 – 16 ans avec du talent, jei les sélectionne. Il ne faut pas s’attendre à ce que je fasse de l’équilibre régional dans mes choix. Tous les jeunes que je convoque sont des camerounais. Même s’ils appartiennent au même centre et ont du talent, je les prends. Les enfants que je sélectionne sont à mon avis les meilleurs possibles. Quand je les appelle c’est dans l’intérêt du Cameroun et non pour des individus. C’est pour faire un travail de proximité, dans la clairvoyance que j’ai accepté de m’installer au pays. J’exerce ce boulot avec détermination, fermeté et engagement. Je puis vous rassurer que je reste très disponible et ouvert à tout ce qu’on peut me faire comme approche, ou comme offre.
Le sérieux comme gage de réussite
Pour redorer le blason du football camerounais, il doit falloir mettre du sérieux dans tout ce que nous faisons. Nous devons tous travailler pour parvenir à notre objectif. La réussite de cette initiative incombe à tous : les formateurs, les entraîneurs, les présidents de clubs, les responsables. Si chacun met la main à la patte, d’ici quelques années nous aboutirons aux résultats escomptés. Mais les choses se mettront en place de façon progressive, d’où la nécessité de la patience.
Pas de magie possible
Les résultats seront visibles d’ici quelques années. Il ne faut pas s’imaginer que d’ici un ou deux ans nous ferons de la magie, ceci n’est pas possible dans le football. Même l’Allemagne voire l’Espagne qui aujourd’hui au sommet du football mondial a pris du temps pour se constituer. En 1982 les espagnols ont organisé une coupe du monde et ont été éliminés au premier tour. Ils ont compris et se sont mis au travail. Nous voyons cette équipe qui est entrain de convaincre de nos jours. Tout s’opère à la base. La majeure partie des joueurs Espagnols qui étaient aux jeux olympiques à Sydney en 2000 constitue le vivier de l’équipe actuelle.
Votre satisfaction
Aujourd’hui je suis content de voir que l’un des cadets que j’ai entraîné évolue avec l’équipe première du FC Barcelone. Il s’agit du gardien de but Ondoa. Il m’a appelé pour me dire : coach je me suis entraîné avec Lionel Messi. Voici la plus grande fierté que nous pouvons avoir en tant qu’entraîneur. C’est la raison pour laquelle il est indispensable de faire de bonnes détections, sans complaisance.
Le programme des éliminatoires
Il faut d’abord mettre un groupe sur pied et passer ces enfants à plusieurs stages qui seront organisés par la fédération et le ministère de tutelle. Ensuite nous les confronterons aux autres à travers les matchs amicaux. Le Cameroun jouera le premier tour de ces éliminatoires au mois d’octobre. Nous affronterons le vainqueur de la rencontre qui opposera le Libéria au Benin. Je souhaite que sur tout le continent africain les différents pays font les enfants évoluer avec leur âge réel. Car ça ne sert à rien de tricher dans cette catégorie. Le plus important ici c’est travailler afin que ces jeunes n’aient pas des problèmes à s’intégrer au football de haut niveau.
Le message
Je lance un appel à tous, si nous tenons à sauver notre football il faut que nous soyons conscients dans ce que nous sommes entrain de faire. Pour ce faire il doit falloir se mettre au travail. Ceci implique une ferme conviction de ce que nous faisons pour le bien de football.
James Kapnang à Douala