Tout le monde apprécie la performance de cette équipe, fruit de la détermination des joueuses et des leurs entraîneurs. Le tout sans recevoir le moindre copeck depuis la préparation. Le ministère des Sports et la Fécafoot se rejettent les responsabilités alors que les joueuses, à un match d’une qualification de Coupe du Monde, continuent de s’interroger sur ce qui se passe. A titre de rappel, pour le Mondial Brésilien, les Lions ont reçu chacun un peu plus de 55 millions de nos francs.
Ce qui se passe avec le traitement des Lionnes Indomptables qualifiées pour les demi-finales des la Can de football féminin ressemble à un scandale. Jusqu’au jour d’aujourd’hui les différentes primes auxquelles ont droit ces Lionnes à savoir, la prime de qualification, la prime de participation, les différentes primes de matchs qu’elles ont déjà gagnées à cette Can, pour se qualifier en demi-finale n’ont pas été payées. A ce sujet, c’est le silence radio à Windhoek et un épais brouillard sur la question. Céline Eko, la présidente de la commission transitoire de football féminin de la Fécafoot, a indiqué à plusieurs reprises que les Lionnes Indomptables ont le même statut que les Lions A. Mais, sur le plan factuel c’est une autre réalité. Après leur victoire (2-0) mercredi dernier face à la Sierra Leone, les Lions Indomptables, de retour à l’hôtel Mont Febé, ont chacun et immédiatement déchargé sa prime de victoire avant 19h30. Les Lionnes Indomptables quant à elles sont en ce moment en pleine Can de football féminin en Namibie. Même si les joueuses ne le disent pas à haute et intelligible voix, elles murmurent entre elles et considèrent ce traitement comme « une marginalisation, une injustice et un manque de considération ». « Depuis la qualification, nous sommes sans primes. Nous jouons sans savoir ce qu’on va nous donner. Ce n’est pas du tout sérieux. Ce n’est qu’à nous qu’on peut faire ça. Chez les grands Lions on ne peut pas voir ça. Qu’on nous dise au moins ce à quoi on devrait s’attendre au sujet de nos primes. Même les manques à gagner, on ne sait pas comment ça va se passer, puisque nos clubs ne vont pas nous payer les salaires de ce mois d’octobre », s’est plaint sous anonymat une Lionne. A force d’attendre leurs différentes primes qui ne sont toujours pas arrivées, les Lionnes Indomptables se sont résolues à considérer leurs résultats à cette 9ème édition de la Can de football féminin comme leurs récompenses. « L’affaire des primes-là nous dépasse seulement. Nous sommes là désormais pour jouer et nous faire plaisir. Ça ne nous intéresse plus pour le moment. On veut atteindre notre objectif et donner du plaisir aux camerounais », nous a confié, l’air résignée, une autre Lionne.
Les résultats pour se consoler
Jusqu’à présent, c’est le discours d’Enow Ngachu, l’entraîneur national, qui a pu convaincre et doper le moral des Lionnes depuis la préparation. Interrogé par nos confrères sur place à Windhoek à ce sujet, Enow Ngachu n’a pas souhaité se prononcer : « Je ne veux pas parler d’argent ici. Je ne suis pas administratif. Je suis entraîneur. Les filles ne pensent pas à l’argent. Elles sont conscientes que si elles réussissent leur tournoi, elles pourraient signer de bons contrats. Voilà leur salaire. Elles veulent se qualifier pour la Coupe du Monde. Le discours que nous tenons aux filles est de jouer l’argent suivra », a cru savoir l’entraîneur national. « Ce Cd, même s’il tient jusqu’à présent, pourra se rayer à un moment donné, quand on sait ce que ruminent les filles », nous confie une source sur place à Windhoek.
Avant de rejoindre les Lionnes en stage à Lusaka, en Zambie, Céline Eko s’était voulue rassurante par rapport à cette question de primes des Lionnes : « Les filles sont dans l’esprit de défendre d’abord les couleurs du Cameroun. Donc, elles ne sont pas dans la psychose qu’on doit leur dire ce dont elles auront droit. La représentante du ministre des Sports n’est pas partie par rapport à cette question. Je crois que tout sera prêt d’ici mercredi et je crois qu’elle rejoindra les filles avec les poches pleines ». L’arrivée de Marie-Louise Mbita, Conseiller technique et représentante du ministre des Sports, à Windhoek a ainsi suscité beaucoup d’espoirs au sein des Lionnes. Des sources avaient même annoncé qu’elle s’était déplacée avec une centaine de millions. Jusqu’à présent, elle est restée muette. « Nous ne comprenons rien de cette situation. Depuis que la représentante du ministre est là, aucun discours aux filles. Heureusement elles sont très sereines. Elle n a jamais ouvert ca bouche même pour remercier ou encourager les filles. Seule la présidente (Céline Eko, ndlr) fait des pieds et des mains pour les soutenir. Cette dame fait tout pour mettre ces filles à l’aise même d’autres membres de la délégation profitent en ce moment de ses largesses », nous a indiqué une source proche de cette équipe à Windhoek.
Ping-pong entre Fécafoot et Minsep
Selon d’autres indiscrétions, une réunion s’est tenue entre les responsables du ministère des Sports et ceux de la Fécafoot le 30 septembre dernier. Au cours de celle-ci, le ministère des Sports a indiqué qu’il ne disposait pas de liquidité pour faire face aux questions de primes des Lionnes Indomptables. Et a sollicité à cet effet que la Fécafoot préfinance cette expédition des Lionnes pour cette Can de football féminin. Et si jusqu’au début de la compétition, rien n’a été fait, cela induit que même la Fécafoot n’aurait pas voulu s’en occuper. L’on se souvient qu’à la fin du troisième stage des Lionnes, le Pr Owona, président du comité de normalisation de la Fécafoot, avait remis la somme de cinq millions de francs à toute l’équipe en guise de prime de qualification octroyée par l’institution qu’il dirige. Selon nos informations, la répartition de cette prime avait permis à certaines joueuses d’avoir 150.000FCfa environ. La situation devient d’autant préoccupante que ni au ministère des sports, ni à la Fécafoot, on ne peut rien savoir de précis. Les deux institutions se rejettent les responsabilités. Joint au téléphone, Alphonse Ateba Ndoumou, le responsable de la communication du ministère des Sports, explique : « La Fécafoot a immédiatement pris en charge cette délégation au lendemain du décret (celui confiant la responsabilité de la gestion des équipes nationales de football à la Fécafoot, ndlr). D’ailleurs, la personne (Marie Louise Mbita) que le ministère des Sports pressentait pour en faire le chef de délégation est restée encore au Cameroun, pour finir par partir, plus comme chef de délégation, mais comme représentant du ministre. Parce que dès que le décret est sorti, la Fécafoot a directement pris les commandes des choses. Donc, c’est madame Fotso qui peut mieux vous répondre en ce moment », nous a-t-il indiqué. Pour Laurence Fotso, la responsable de la communication de la Fécafoot, il n’y a aucun mystère à ce sujet. « C’est toujours le ministère des Sports qui s’occupent des primes. Renseignez-vous auprès du ministère des Sports », a-t-elle insisté. Les Lionnes jusqu’à présent ont fait preuve de détermination et de patriotisme. Sauf qu’à un moment donné, seule la volonté ne suffira plus. Plusieurs observateurs sont unanimes que les Lions A ne sauraient subir un tel traitement.
Antoine Tella à Yaoundé