Président de Lorema Filles de Yaoundé et président de l’association des présidents de clubs de football féminin du Cameroun, lui aussi sanctionné, donne les raisons qui ont conduit à l’arrêt du championnat. Il pense même à un soulagement de ses poches. Mais, le sort des footballeuses le préoccupe. Entretien.
Comment avez-vous accueilli la décision de la Chambre d’homologation et de discipline de la Fécafoot vous suspendant de cinq ans de toute activité et rétrogradant votre équipe de deux divisions ?
J’ai accueilli cette décision comme toutes les nouvelles de suspension qui peuvent arriver. Quand une telle décision tombe, on ne doit pas mourir. Quand on a désigné le Pr Owona comme président du Comité de normalisation, ce n’était pas pour en arriver là.
Pourquoi avez-vous décidé d’arrêter le championnat ?
Nous avons observé un arrêt du championnat, parce que nous avons revendiqué ce qui nous a été promis sans suite. Et cet arrêt était prévu après la 3ème journée au cas où l’on n’accédait pas à notre revendication. C’était décidé et signé par tous les présidents de clubs. Lorsque madame Dibo Colette a programmé la 4ème journée, j’ai attiré son attention sur le fait que nous n’allons pas jouer sur la base des résolutions prises avant le lancement du championnat. Je lui ai rappelé qu’on nous a promis dix millions et comme on a l’habitude de nous donner la moitié, il était question que l’on nous donne cinq millions pour terminer l’autre partie au début de la phase retour. Madame Eko (présidente de la commission transitoire du football féminin, ndlr), au début de la saison, a convoqué une réunion au cours de laquelle elle nous a demandé l’aller jouer, parce qu’elle est en train de faire des efforts pour que ce qu’elle nous a promis (Dix millions par club, ndlr) nous soit donné. On a applaudi dans la salle. Mais, certains collègues ont dit qu’il ne fallait pas jouer. Je les ai convaincus de faire confiance à cette dame, jusqu’à la 3ème journée. C’est ainsi que le championnat a été lancé pour connaître l’arrêt que vous connaissez.
Que comptez-vous faire par rapport à cette décision ?
Si ça ne dépendait que de moi, on resterait tranquille. Quand je dépense l’argent avec lequel je pouvais entretenir ma famille et mes biens sans contrepartie et qu’on me suspend, ça me soulage. Mais, ma casquette de président de l’association de clubs de football féminin ne lie. Les autres présidents m’ont appelé et je leur ai donné ma position. Ils m’ont demandé de me soucier du sort des filles. Il y a en a qui fréquentent, d’autres qui n’ont pour seule activité que le football. Et si nous laissons tous ces enfants, ce sera la catastrophe ; c’est ce qu’ils m’ont dit. Nous allons donc nous retrouver pour voir la conduite à tenir.
C’est pourtant vous, les clubs, qui aviez décidé de passer de 10 à 14 clubs …
Lorsque madame Eko nous a réunis au début de la saison, elle nous a informés simplement que nous allons passer de 10 à 14 clubs. Elle n’a pas demandé notre avis en nous donnant l’information. Elle a juste dit qu’on fera un bon championnat avec ce nombre. Il y a eu des éclats de voix dans la salle, parce qu’à 10 clubs on a terminé le championnat à genou. Nous lui avons dit qu’à ce nombre, on risque de voir des équipes ne pas terminer le championnat. En passant, mon équipe ne peut jamais être battue forfait. Après des conciliabules, nous avons décidé de jouer et à une condition écrite et signée par tous, à savoir que si nous n’avons pas la moitié des dix millions, après la 3ème journée, nous arrêtons. En dehors des équipes qui devaient normalement descendre, tous étaient d’accord et nous avons arrêté de jouer.
Que sont devenues les joueuses pendant cet arrêt ?
Lorema a continué à s’entraîner et je paye les primes d’entraînements, soit 75000FCFA par semaine. J’espérais qu’à tout moment on pouvait relancer le championnat. Je paye les loyers des joueuses.
Quelle est la position des clubs non suspendus après ces sanctions ?
Certains présidents de ces clubs m’ont appelé pour nous témoigner leur soutien et d’autres ne l’ont pas fait, parce qu’ils ont peur de représailles de leur hiérarchie. Ils ne sont pas propriétaires de leurs équipes. Madame Eko a dit que nous n’avons pas créé des clubs pour attendre des subventions. Je dois dire que nous mettons de l’argent dans ce football féminin depuis des lustres. C’est un gouffre à sous et je le fais depuis près de 25 ans à fond perdu et ce ne sont pas les subventions que j’utilise, mais, mon argent propre. Ceux qui ont pris ces décisions ne sont pas capables d’entretenir un club. Je les mets au défi. S’ils peuvent chacun, prendre ces filles en charge pour entretenir dans ces clubs. N’oubliez pas qu’encadrer les filles est très compliqué.
Entretien mené par A.T. à Yaoundé