L’ancien conseiller diplomatique du Président de la République doit rencontrer le Président de la Fédération internationale pour tenter de dénouer la crise qui a conduit à la suspension du football camerounais.
René Emmanuel Sadi serait parti en mission à Zurich, dépêché spécialement par le Président de la République, Paul Biya, pour discuter avec le Président de la Fédération internationale de football association (Fifa), de la crise qui secoue la Fédération camerounaise de football (Fécafoot) depuis quelques mois et qui a abouti, le 4 juillet dernier, à la suspension du Cameroun de toutes les compétitions internationales de football. Une suspension notifiée au Secrétariat général de la Fécafoot par le Secrétaire Général de la Fila, Jérôme Valcke. Conseiller diplomatique pendant plus de trente ans des deux premiers Présidents du Cameroun, Amadou Ahidjo et Paul Biya, René Sadi a donc repris du service dans son domaine de prédilection, malgré l’actualité politique nationale (préparation des élections législatives et municipales du 30 septembre 2013) qui l’interpelle par ailleurs, lui qui est Ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation depuis septembre 2011.
Dans sa décision suspendant le Cameroun, la Fifa avait évoqué «l’ingérence des autorités gouvernementales», sous le prétexte notamment que John Begheni Ndeh avait pris le pouvoir à l’immeuble siège de la Fécafoot à Tsinga vendredi le 28 juin dernier avec l’aide des forces de l’ordre. Comme si l’élection controversée (mais entérinée par la Fife) de la liste Mohammed Iya (emprisonné), le 19 juin dernier, ne s’était pas déroulée déjà sous haute protection policière et, à la suite de laquelle le Président sortant réélu avait reçu une lettre de félicitations du Président de la Fifa!
En fait, l’instance faîtière du football mondial se retrouve aujourd’hui dans un gros embarras, puisqu’elle avait manifestement choisi son camp dans la crise en cours à la Fécafoot, mais a vu l’Assemblée générale élective du 19 juin invalidée par une Commission interne de la fédération, la commission des recours, jusque-là favorable audit camp, celui du Président sortant, M. Iya.
L’élection ayant été annulée, c’est logiquement le comité exécutif antérieur au 19 juin 2013 qui restait en place, en attendant les recours introduits auprès d’une juridiction supérieure, le Tribunal arbitral du sport (Tas) basé à Lausanne en Suisse.
C’est fort de cette situation que le 1er vice-président de ce comité exécutif, John Begheni Ndeh, a convoqué le comité d’urgence de la Fécafoot, pour arborer le costume du Président par intérim, le Président Mohammed Iya étant empêché parce que placé en détention préventive à la prison de Kondengui pour sa gestion de la Sodecoton en tant que DG.
L’embarras de la Fifa, qui n’a pas encore nommé son «comité de normalisation» promis, se manifeste aussi par le coup de fil que Primo Corvaro, responsable des associations nationales à la Fifa, et qui représentait cet organisme le 19 juin dernier Yaoundé, a passé la semaine dernière à John Begheni. C’était le premier du genre. Il demandait en substance au Président intérimaire de la Fécafoot s’il était vraiment utile pour lui, de s’adresser au Tas alors que c’est avec la Fifa qu’il serait en relations de travail. Car, John Begheni a attaqué auprès du Tas la décision de la Fifa de suspendre le Cameroun, arguant qu’il ne voit pas où est l’intervention du gouvernement ayant motivé cette décision, étant donné que c’est lui, le Président par intérim de la Fécafoot, qui a fait appel aux forces de l’ordre pour prendre possession de son bureau, privilège que lui refusait le Secrétaire général de la Fécafoot, Tombi à Roko, qui a dès lors été suspendu pour insubordination.
Pendant ce temps, le site web officiel de la Fifa continue d’afficher sur la fiche de présentation de la Fécafoot, 1er vice-président: Seidou Mbombo Njoya. Ceci, malgré l’annulation de l’Assemblée générale du 19 juin 2013 (qui avait porté ce dernier à ce poste) par la commission des recours de la Fécafoot, et malgré la démission de l’intéressé qui avait suivi. On le voit, la tâche de René Sadi ne sera pas du tout facile à Zurich auprès des maîtres de la maison Fifa. Ses talents de diplomate lui seront certainement utiles car dans cette affaire, l’instance laitière du football mondial ne veut manifestement pas perdre la face. Et les trois parties (Fifa, Fécafoot et gouvernement camerounais), contrairement à ce que pense une bonne partie de l’opinion nationale (laquelle se réjouit presque de la suspension du Cameroun), il n’est pas de leur intérêt que cette énième crise de la Fécafoot perdure encore.
Martin Jean Ewodo | L’Actu