La dernière fois que le Cameroun a disputé une finale d’une CAN, c’était en 2008 au Ghana. Et c’était lui le sélectionneur. Aujourd’hui commentateur télé pour une chaîne suisse, Otto Pfister (80 ans) continue de suivre l’actualité des Lions. Souvent aperçu autour de la tanière à Libreville, nous l’avons rencontré à son hôtel ce mardi matin.
Il évalue les chances du Cameroun dans ce tournoi en regrettant l’absence de joueurs comme Eto’o, Choupo-Moting et les frères Matip, et se confie enfin sur les raisons de sa démission après cette finale perdue de 2008.
Que peut faire l’équipe actuelle du Cameroun samedi, face au Sénégal ?
Je suis toujours l’actualité des Lions Indomptables via internet. Après moi, il y a eu beaucoup d’autres entraîneurs. Je sais que lors de la dernière CAN, le Cameroun n’a pas pu passer le premier tour. Cette équipe n’est pas une grande équipe mais elle a surpris tout le monde en cette année 2017. Elle a bien joué jusqu’à maintenant. Les joueurs sont solides et très physiques. Ils sont solidaires et je suis convaincu qu’ils ont une chance de passer en demi-finale et même de jouer la finale. Le Cameroun est un bloc. Il n’y a pas un joueur qui domine les autres. Et le gardien de but est excellent. Je pense qu’il faut lui dire merci pour la qualification (rires…) parce que jusqu’ici, il est le meilleur joueur sur le terrain. Mais le Sénégal est aussi une très bonne équipe. Pour moi, c’est un match ouvert. La presse dans son entièreté proclame le Sénégal comme le favori, mais ce type de match à mon avis, c’est du 50-50. Malheureusement, si Choupo-Moting et les frères Matip étaient là, le Cameroun deviendrait le favori. Je ne sais pas exactement pour quelles raisons ils ne sont pas là, mais il faut que le CAF prenne ses responsabilités.
En quoi pensez-vous que Choupo-Moting, Joël et Marvin Matip manquent à cette équipe camerounaise ?
Je regrette vraiment leur absence ! Parce qu’actuellement, Choupo-Moting est l’un des meilleurs attaquants en Allemagne. Il joue à Schalke 04, c’est un attaquant clé de cette équipe. Le Cameroun a un problème de finition par exemple face au Gabon, il n’a pas été capable de marquer un but. Je ne vais pas dire qu’il manque un attaquant. Je dis qu’il manque Choupo-Moting. Pareil pour Joël Matip qui évolue à Liverpool, et son frère Marvin qui joue à Ingolstadt. Ils sont très forts. Si vous avez ces deux joueurs dans le onze entrant, qui marquera un but au Cameroun ? C’est un peu hypothétique mais les meilleurs camerounais ne sont pas sur le terrain. C’est dommage !
Qu’est-ce qui vous a fait partir du Cameroun ?
J’étais avec Samuel Eto’o en Europe. Il y a un fax qui est arrivé disant : à partir de ce jour, Gweha Ikouam n’est plus votre adjoint, désormais c’est Jean Paul Akono. J’ai retourné le fax en disant : je n’accepterai jamais, j’abandonne. C’est ça la vérité. On m’a changé mon adjoint, et jusqu’à ce jour je ne connais pas la raison. On a toujours des ennemis dans ce qu’on fait, mais pour moi, Gweha était un excellent entraîneur adjoint. Il pouvait faire les exercices comme moi ; s’il y a un petit conflit dans l’équipe, il m’en parle. On me change mon adjoint camerounais pour une raison inconnue, à quoi ça m’aurait servir de continuer à entraîner cette équipe ? J’ai démissionné, et j’ai même laisser mon salaire. Je suis un homme de cœur, pas un mercenaire chercheur d’argent comme certains blancs. Si on me laisse travailler tranquillement, je suis votre homme. Mais si on me fait des combines, j’abandonne.
Est-ce que vous suivez toujours les joueurs que vous avez révélé comme Mbia ou encore Alexandre Song ?
Oui, je suis toujours en contact avec eux. Sauf Achille Emana, qui est un peu loin je pense. Je suis en contact avec Franck Etoundi qui est en Turquie. L’année passée, pendant la remise du Ballon d’Or FIFA, j’ai retrouvé Samuel Eto’o. Pourquoi il n’est pas à cette CAN ? Que s’est-il passé ? La saison dernière il était après l’Allemand Gomez, deuxième buteur en Turquie. D’accord, il a 35 ans, mais ici, devant la défense gabonaise, il aurait marché comme dans du fromage. Mais je ne sais pas ce qu’on lui reproche. Or, dans le football, ce qui compte, ce sont les tableaux, les statistiques.
Mené par Arthur Wandji, à Libreville