Le vice-président du comité de normalisation du football camerounais, Prince Soh Nkake, Emmanuel Ngassa Happi s’est confié à notre rédaction. Le sort du secrétaire général de la Fécafoot, Tombi A Roko, de plusieurs autres cadres et questions sur le comité de normalisation ont été discutés. Entretien…
Vous avez été choisi par la FIFA pour contribuer à la refonte des textes de la Fécafoot. Quel est votre sentiment ?
C’est un sentiment de satisfaction, que pour une fois la FIFA ait pensé à ma modeste personne. Je pense qu’il y a des raisons qui ont motivé ce choix et je ne saurais vous les donner, étant donné que je ne les connais pas.
Etes-vous conscients des attentes que le peuple camerounais porte sur les membres du comité de normalisation ?
Comment pouvez-vous imaginer que je ne sois pas conscient ? Nous sommes en déconfiture et le peuple est découragé, abattu (…) Le peuple attend de nous des résultats probants, qu’on nettoie tout ce qui s’est passé, qu’on oublie le passé.
Oublier doit passer par un nettoyage des textes à tous les niveaux et que les statuts soient structurés de sorte, que seuls les dirigeants intègres aient accès à la tête de la Fécafoot, des dirigeants qui sont là pour servir le sport et non pour se faire servir, des dirigeants amoureux du ballon et non des personnes qui ne pensent qu’à aller en mission et à profiter du sport.
Nous ne voulons pas à la tête de la Fécafoot, des personnes qui ont des ambitions politiques et cherchent à être conseiller municipal ou député sans connaitre les règles de jeu. On ne veut plus des personnes qui pensent qu’avec cinquante ou cent millions, elles peuvent s’offrir la lune et être dirigeant de club, oubliant que la balle est ronde pour tout le monde.
Quel regard portez-vous sur le choix des membres
Je suis content pour le choix des membres (…) J’ai exigé de connaitre tous les membres de ce comité parce qu’en 1998, on a constitué un comité hétérogène qui a abouti à la fin à un fiasco et il y a eu des démissions en cascade. Je pense que cette fois, sauf mauvaise appréciation de ma part, les membres nommés sont des personnes sérieuses.
Que ce soit le joueur Kaham, qui est un ancien footballeur émérite et un grand entraîneur, Owona Essomba est un ancien capitaine des Lions indomptables et ancien président de la Fécafoot, le professeur Owona est un fanatique du Canon de Yaoundé. Il a d’ailleurs été président du comité des sages du Canon avant de démissionner à cause des problèmes internes. Il a été ministre des sports et c’est pendant son règne, qu’un président de la Fédération (vincent Onana ndlr) est allé en prison à cause des billets de stade vendus à Londres. C’est lui qui a expliqué le rôle du ministère et la Fédération qui ont des fonctions complémentaires. Je n’ai pas besoin de parler de moi. Après 45 ans comme dirigeant sportif, les messages que je reçois m’obligent à faire du bon travail. (…) J’ai l’obligation de continuer dans le sens de l’honnêteté, la clarté et la transparence. Je pense que c’est l’absence de transparence et la corruption qui tuent le Cameroun. Puisse qu’on n’entretient le flou sur ce qu’on a gagné et l’excès de corruption. Je dois être au niveau de la commission, l’exemple parfait de la transparence et de la clarté. Si je gagne cinq francs à la fin du mois, il faut que tout le monde le sache étant donné que je ne l’ai pas volé. Je m’en tiendrai à ça et je veillerai qu’il en soit ainsi pour tous les membres même pour le président. Je veillerai à ce qu’on travaille main dans la main, dans une confiance réciproque. Je veillerai à ce qu’aucune somme ne sorte de la banque sans la signature du président ou la mienne. Il ne sera pas question de décaisser de l’argent pour voir après, non ! L’argent sortira sur des bases claires. Il faut que tout passe par des mécanismes de contrôle.
(…) Au-delà de l’organisation administrative, il y a aussi l’organisation des clubs d’Elite, notre action sur le terrain. Notre mission doit-elle s’arrêter au niveau de l’équipe nationale de football ou des clubs d’Elite, non. Si on s’arrête à ce niveau, nous n’aurions rien fait. Il faudrait s’assurer que les clubs ont une équipe junior et mettre fin aux équipes qui disparaissent le temps de leur naissance, ceci sera possible par des subventions allouées aux clubs, si on dispose des moyens. Il faudra définir si on a de l’argent comment l’utiliser. On peut choisir de mettre soit le 1/3 ou les 2/3 dans les infrastructures et ne pas dépenser comme le font plusieurs personnes pour effectuer des missions. On ne peut pas utiliser cinquante millions pour faire des missions. Je veillerai que ceci n’arrive pas et je reste convaincu que le président sera de cet avis. On réduira l’effectif des représentants aux missions. Nous favoriserons le départ des présidents de club à des missions. On ne doit pas utiliser l’argent de la Fédération pour envoyer nos petits copains en mission. Je vous livre ainsi mes impressions personnelles, car la commission ne s’est pas réunie. Quand la commission se réunira, je n’aurai plus à faire des interviews. Il y a un porte-parole, c’est le président. Après le début de nos réunions, il y a un interlocuteur, c’est le président. Ensuite on pourrait faire un communiqué qu’on enverra à la presse.
Que pouvons-nous retenir de la journée de lundi qui a marqué votre installation ?
Tout s’est très bien passé. Les choses étaient faciles, puisse que nous étions déjà nommés par la FIFA. Nous avions la lettre et la mission qui nous est assignée était définie dans la lettre que nous avions reçue. Gérer les textes, gérer les élections qui ont pour date butoir, le 31 mars 2014 et il revenait à la FIFA qui nous a nommé de nous installer, sous la supervision de la CAF. Après l’installation, nous sommes allés présenter nos civilités à Mr le Ministre. Nous n’avons pas eu de séance de travail après l’installation. Nous avons terminé très tard et chacun est rentré. Nous nous sommes juste donnés la consigne de ne pas faire de long discours. Il faut garder le secret de nos réunions et élaborer un communiqué auquel tout le monde devrait adhérer. Certainement demain ou après demain quand on fera des réunions, on pourra mieux parler.
Il est vrai que vous ne vous êtes pas encore réunis. Néanmoins, que comptez-vous faire, garder l’équipe en place à la Fécafoot ou faire des réajustements ?
Je ne suis pas le président ou le seul membre de la commission. Ce qui est certain, c’est qu’ils sont encore en place.
Si ça dépendait de vous, alliez-vous les changer ou les maintenir ?
Je fais partie d’un comité solidaire. Il n’y a plus de moi qui tienne. Même le président ne peut pas prendre une décision tout seul, si oui, à quoi serviraient les autres ? (…)
Nous allons nous réunir et étudier dossier après dossier. Si on estime par exemple qu’à la communication, il y a un monsieur qui a fait des bases et qu’on respecte, on le conservera. On ne changera pas pour faire plaisir à la galerie, non, non. Ça s’est de la vengeance ! A notre âge, on n’est pas des enfantins. Je sais ce que vous voulez dire. Il y a le secrétaire général et le responsable de la communication qui ont été… Ecoutez, Tombi a été mauvais hier, il peut être bon aujourd’hui. Il a été mauvais pour les uns, il peut ne pas être mauvais pour nous, dans la mesure où nous ne le connaissons pas. Il était peut-être mauvais pour ceux qui étaient contre lui et bon pour ceux qui étaient pour lui. Comment nous qui venons d’arriver pouvons porter un jugement sur lui ? Ce serait avoir un parti pris. Nous devons maintenir une neutralité positive. Nous ne sommes pas là pour prendre parti pour X ou Y camp. Nous sommes là pour réorganiser le football camerounais. S’il arrive que nous prenions des décisions au niveau de la Ligue, nous le ferions en âme et conscience. Ce qui est certain, c’est que tout ce qui est là sera nettoyé. Nous ne pourrions ni maintenir, ni écarter, auquel cas nous prendrions parti pour un camp, ce qu’il faudrait éviter.
C’est ce que la CAF a fait avec les comités de normalisation dans les autres pays. Le secrétaire général et les autres sont les employés. Ils ne sont pas des décideurs, ils sont des exécutants ! Si je demande au secrétaire général de remplir une mission, il doit s’exécuter ; s’il ne le fait pas, c’est une faute lourde. Il doit s’en aller, sans préavis, sans rien du tout. C’est pour cette raison, que je ne comprends pas pourquoi les gens s’agitent. Il n’y a pas de rapport de force possible. Nous sommes dans une relation, patron, employé. Si le patron se fait dominer par ses employés, c’est son problème. Je ne vois pas Owona ou moi nous laisser faire.
C’est pour ce caractère que vous avez certainement été choisis. Pouvons-nous avoir la date de votre première réunion ?
J’avoue, je ne suis pas le président. Je sors d’une famille royale et j’ai une éducation communiste, c’est-à-dire qu’il y a un chef. J’attends que le président décide et quand un chef décide, il ne le fait pas tout seul. Il a des personnes derrière. Selon moi, le plus tôt sera le mieux, mais je ne peux rien vous dire puisse que c’est le président qui décidera. Je pense qu’avant que le président ne convoque le comité, il faudrait que nous nous réunissions. Je suppose qu’il pense comme moi. Puisse qu’on convoque des personnes pour discuter d’un plan d’action élaboré à l’avance.
Pour une des rares fois au Cameroun, le peuple camerounais a été unanime sur les hommes choisis pour la normalisation de leur football. Votre sentiment ?
C’est une lourde responsabilité qui nous incombe. Vous savez, le peuple camerounais est critique. Et pour une fois, vous n’entendez que du bien après une nomination. Nous sommes inquiets car conscients que c’est une lourde responsabilité qui nous est confiée et nous n’avons pas droit à l’erreur. C’est très difficile, puisse que quand tout le monde compte sur toi et que tu échoues, c’est la catastrophe. C’est aussi un encouragement, parce qu’on se dit : attention, nous sommes soutenus, ne faisons pas d’erreur. Ce que vous dites là est vraiment rare. J’ai reçu des appels, des mails, des SMS de partout. A un moment donné, j’ai eu peur, parce qu’après une pareille confiance, l’échec serait malheureux, il ne faut même pas y penser. C’est pourquoi il faut être clair et consulter les différentes couches avant de prendre des décisions. Il faudrait être ouvert, ne rien cacher. Ce sont les dirigeants qui volent qui ont peur. Quand tu fais un travail clair et transparent, tu n’as rien à cacher. Tout le monde est content que je sois dans ce comité parce qu’ils savent que je ne badine pas. Tout le monde s’étonne qu’avec les problèmes dans mon équipe (Union de Douala), je ne sois pas revenu comme président général, je ne suis pas indispensable. La preuve, après mon départ l’Union a gagné des titres et l’Union a gagné le championnat l’année dernière. C’est une fierté pour nous de savoir que nous sommes partis, mais il y a des jeunes derrière qui gagnent. Voila ce que l’histoire retiendra et c’est un exploit pour l’Union de Douala
Un mot pour sortir
Je voudrais vous remercier d’être passé pour cet entretien. Je dirais au peuple camerounais d’être serein. Je leur demanderais de nous accorder un million de confiance. Je dirais même une confiance totale, parce qu’on ne juge le maçon qu’au pied du mur, qu’il ne commence pas à critiquer alors que nous n’avons pas encore commencé. Je pense que le peuple camerounais connait le ministre Owona et moi, y compris certains membres de ce comité. Je pense que le peuple est convaincu de notre intégrité et que nous ne sommes pas des mendiants. On ne peut pas me corrompre. Le peuple est également convaincu, que quand je suis quelque part, je me donne totalement pour que les choses réussissent. Le peuple est convaincu que j’aime le sport et le Cameroun. Mon souhait le plus ardent est que quand nous laisserons les choses le 31 mars 2014, qu’on nous applaudisse et non qu’on nous haïsse. Telle est mon ambition, je pense que c’est également celle du président.
Entretien Mené par James Kapnang