Le ministre des sports et de l’éducation physique s’est exprimé à nos confrères de Cameroon-Tribunes aux lendemains de la fin du Championnat d’Afrique des Nations. Il fait un premier bilan de cette première organisation d’un tournoi majeur après la pandémie du Corona Virus et sur les nouvelles infrastructures dont s’est doté le Cameroun.
M. le président du COCAN, quel premier bilan faites-vous de ce CHAN qui vient de s’achever ?
Mon sentiment est d’abord celui d’un président du COCAN qui voudrait exprimer toute sa reconnaissance et sa déférente gratitude au président de la République, Son Excellence Paul Biya, qui a bien voulu lui confier la lourde et exaltante responsabilité de présider le COCAN 20-21 dont les missions devaient permettre de réaliser une magnifique activité de prestige, de souveraineté et de rayonnement international de notre cher et beau pays, le Cameroun. Je voudrais en même temps dire que cet état d’esprit est également celui d’un responsable qui, après plus d’une année de travail à la tête d’une équipe composée d’hommes et de femmes engagés, dévoués, commence à ouvrir une fenêtre sur l’évaluation de ce prestigieux événement, y compris en terme d’autocritique. Le chef de l’Etat nous a prescrit une très haute directive, à savoir, l’organisation dans de bonnes conditions et sans faille de la 6e édition du CHAN au Cameroun, ceci en vue d’offrir une belle fête sportive à la jeunesse africaine. Cette entreprise impliquait de manière transversale plusieurs départements ministériels et structures essentiellement publiques et parapubliques, sous la coordination de Monsieur le Premier ministre, chef du gouvernement, Joseph Dion Ngute, président du COMIP-CAN. Le Cameroun avait donc pleine conscience des engagements vis-à-vis de l’Afrique à travers le contrat passé avec l’instance faitière du football continental qui est la Confédération africaine de football.
En quoi consistait concrètement cet engagement du Cameroun ?
Cet engagement devrait être tenu dans des secteurs aussi variés que les infrastructures sportives, l’hébergement, la restauration, le transport urbain et interurbain, les communications, les télécommunications, les TIC, l’événementiel, notamment à travers l’organisation des cérémonies d’ouverture et de clôture. Il y avait également des questions techniques très sensibles à l’instar de la gestion de la santé dans un contexte marqué par la pandémie du Covid 19, la billetterie, la sécurité et bien d’autres encore qui mettent en évidence la complexité d’une organisation qui concernait non seulement les 16 pays engagés dans la compétition, mais également les acteurs venant de plusieurs continents et ceci, sur quatre sites à savoir Yaoundé-Mfandena, Douala-Japoma, Douala-Bepanda et Limbe-Buea.
Dans tous ces secteurs, aussi bien pour la CAF que pour la FIFA, dont le président Gianni Infantino a fait le déplacement du Cameroun dans le cadre de la cérémonie d’ouverture, ainsi que pour tous les autres acteurs avertis du football africain et mondial et les médias, nous sommes heureux de relever qu’ils ne tarissent pas d’éloges envers le Cameroun pour la qualité de ses infrastructures et la haute dimension de l’organisation du CHAN 2020 présenté comme l’édition la plus réussie de toutes les éditions, malgré un contexte de restrictions dû à la pandémie du Covid-19. Il se dit que cet événement a drainé plus de public que plusieurs éditions de la CAN.
Nous voulons à cet effet remercier l’ensemble des acteurs pour les sacrifices consentis et pour le travail abattu parfois dans des conditions difficiles afin que les résultats honorent l’image et le prestige de notre pays. Au vu de tout cela, le COCAN 20-21 est en droit d’être satisfait pour le travail abattu et qui est de bon augure pour l’organisation de la CAN que le Cameroun accueille en janvier-février 2022, dans moins d’un an.
Les infrastructures ont été largement appréciées. Comment s’assurer qu’elles seront bien entretenues dans la perspective de la CAN justement ?
C’est une image forte de cette compétition, l’émerveillement et surtout le regard enchanté des étrangers sur l’état de nos infrastructures sportives. La reconnaissance de la magnificence de nos infrastructures sportives fait certes la fierté du Cameroun, mais fait également honneur à l’Afrique et au monde du sport. Je voudrais dire que la jeunesse sportive de notre pays a exprimé, à maintes reprises, sa fierté et sa reconnaissance à Monsieur le président de la République pour cette œuvre colossale qui démontre la place prépondérante qu’occupe le sport dans la vie nationale, en tant qu’instrument de consolidation de l’unité et du vivre-ensemble entre Camerounais et entre les peuples. Ce sont donc des infrastructures modernes et futuristes que nous devons jalousement préserver. C’est pour cela que nous avons condamné fermement les actes de déviance et d’incivisme de certains spectateurs sur certains sites tels que le piétinement des sièges ou le non-respect des dispositions de marquage des places assises en cohérence avec la distanciation physique préconisée. Afin d’éviter que ces infrastructures ne deviennent des éléphants blancs, une réflexion profonde prescrite par le gouvernement est en cours en vue de mettre en place des structures pérennes chargées de leur maintenance. En attendant, j’en appelle au civisme des populations afin de préserver toutes ces infrastructures qui font aujourd’hui la fierté de notre pays.
On a enregistré quelques plaintes de la part de la presse qui se sentait à l’étroit, la centralisation des accréditations en début du tournoi, le non-respect des quotas dans les stades dans le cadre de la gestion de la pandémie du Covid. Comment y remédier ?
Je voudrais dire que parmi les commodités qui ont été particulièrement appréciées au sein de nos infrastructures sportives, figurent celles dédiées aux médias. Que ce soit les tribunes de presse, les centres de presse, les salles de conférences et autres, ce sont des espaces spacieux dotés d’un matériel de pointe de dernière génération. Il se trouve que pour le CHAN 2020, les contraintes liées à la prévention de la pandémie du Covid-19 étaient imposées à tous, y compris dans les espaces médias dans lesquels le quota d’occupation des places de 25% a été strictement respecté. Cela a considérablement réduit les capacités d’accueil de ces infrastructures.
En ce qui concerne les accréditations, il convient de noter que chaque site avait son centre d’accréditation, avec des espaces spécifiques pour les responsables de la CAF et les invités spéciaux. Donc le processus était suffisamment décentralisé. L’engorgement observé les premiers jours était dû au fait que le processus d’accréditation n’ayant pas été lancé suffisamment tôt, tout le monde voulait s’accréditer au même moment. Pour les prochaines échéances, nous avons convenu avec la CAF que le processus d’accréditation sera ouvert plusieurs jours avant le début de la compétition pour éviter les désagréments constatés.
Quant à la gestion du Covid-19, tout le monde a apprécié les mesures de précaution et de prévention mises en place par la CAF de concert avec le Cameroun, des mesures qui ont été respectées dans l’ensemble ; ce qui confirme la capacité de résilience de notre pays magnifiée par les instances sanitaires internationales depuis la survenue de la pandémie. Notre souhait est qu’à défaut de l’éradiquer totalement, elle soit maitrisée d’ici la CAN en 2022 pour que la fête soit encore plus belle.
Ce CHAN est une répétition générale de la CAN prévue dans moins d’un an. Quels sont les aspects sur lesquels il va falloir s’améliorer ?
Après le CHAN, une évaluation objective sera faite aussi bien par le COCAN que par la CAF pour mieux cerner les points de satisfaction et les points critiques et y apporter des réponses adéquates. Mais déjà, on peut relever la nécessité d’une refondation de la gouvernance sportive, le renforcement de la formation des stadiers et des volontaires, un meilleur encadrement des transporteurs et notamment des chauffeurs dont certains se sont illustrés par des comportements déviants antipatriotiques qui frisaient le chantage. Je comprends que le temps n’a pas été suffisant pour organiser toutes ces formations indispensables. La CAN doit être une occasion idoine de rectifier le tir. Je voudrais d’ailleurs réitérer que le CHAN constitue une sorte d’échauffement pour la CAN que le Cameroun organise en 2022 qui est déjà là. Cela voudrait dire qu’il s’avère impératif de se remettre au travail après le CHAN dès lors que sur certains aspects liés à la préparation de cet événement et selon les précisions données par la CAF, il faut prendre des dispositions neuf mois avant le début de la compétition.
Par ailleurs, la CAN va se dérouler sur six sites dont deux, à savoir Bafoussam et Garoua n’ont pas bénéficié du galop d’essai que constitue le CHAN. Tout est à faire là-bas et il faut lancer les préparatifs dès à présent.
Sur le plan sportif, le Cameroun a atteint pour la première fois le dernier carré d’as. Comment analysez-vous la performance générale des Lions ?
Du point de vue historique, de toutes les éditions auxquelles le Cameroun a pris part jusque-là, il n’avait jamais dépassé l’étape des quarts de finale. En effet, la meilleure prestation de l’équipe camerounaise a été réalisée en 2011 au Soudan où elle a pu jouer les quarts de finale, dans des conditions normales. Dans une perspective comparative, c’est la première fois, à la faveur du 6e CHAN, que le Cameroun atteint son meilleur niveau de performance dans un contexte particulièrement difficile qui était celui de la préparation et de l’environnement général. Je voudrais dire que beaucoup ne vendaient pas chère la peau de cette équipe formée ex-nihilo dans un contexte où les compétitions avaient cessé d’exister depuis plusieurs mois. Les conflits, les querelles, les dissensions, les divergences d’intérêt, les batailles de procédure entre les structures en charge de la gestion du football, notamment entre la FECAFOOT et la Ligue de football professionnel du Cameroun, la crise de gouvernance et que sais-je encore et je le dis pour le regretter en tant que ministre de tutelle, n’ont pas permis d’instaurer un climat serein, malgré les efforts du gouvernement pour offrir les meilleures conditions de préparation et de participation à cette compétition. Pendant ce temps, les adversaires du Cameroun se préparaient dans des conditions plus sereines. Le Maroc par exemple qui nous a éliminés en demi-finales et qui a finalement remporté le trophée, s’est vu offrir toutes les conditions idéales de préparation et de participation avec une fédération stable et un championnat professionnel solide et des clubs éprouvés à la haute compétition. Il se dit d’ailleurs que certains joueurs marocains jadis professionnels sont rentrés au pays juste pour prêter main forte à leur équipe A’. J’ai voulu évoquer tous ces éléments pour dire que le staff technique en deux mois a bâti une équipe courageuse qui a réalisé une prestation honorable en figurant dans le dernier carré. Disputer la finale ou gagner la 3e place aurait été la cerise sur le gâteau. Mais la loi du sport est ainsi faite. En sport, il faut un vainqueur et un vaincu. C’est ce qui est arrivé face au Maroc en demi-finale et face à la Guinée pour la petite finale. Il convient tout simplement de tirer les leçons de notre participation et surtout d’assurer un meilleur encadrement aux éléments talentueux qui sont véritablement sortis du lot lors de cette compétition.
Quel est l’impact des faits divers relayés dans les medias sur la sérénité dans la tanière ?
Les faits divers ont toujours meublé la participation de certaines de nos équipes aux compétitions internationales qui sont souvent l’œuvre de nos compatriotes spécialistes du chaos et de la désinformation. Je voudrais dire que depuis le début de cette année et à la faveur de l’organisation du CHAN, le Cameroun a fait l’objet d’une exposition positive en mondovision pour la qualité de ces infrastructures et de son organisation qui nous a valu les félicitations des voix les plus autorisées dans le domaine du sport. Nous devons en être fiers, au lieu de chercher la petite bête. Comme dans tout groupe, les incompréhensions peuvent exister, mais elles doivent trouver des solutions internes au lieu de constituer des éléments de perturbation à cause du retentissement et de la fixation qu’en font certains esprits mal intentionnés. Pour les prochaines échéances, je souhaite que les Camerounais soient davantage soudés dès lors que les événements sportifs à venir devaient constituer des occasions idoines de promotion du prestige et de l’image de notre pays. Cela devrait être l’œuvre de tous les Camerounais.