Sur le papier, la rencontre entre la Russie et le Cameroun lors de la phase de groupes de la Coupe du Monde de la FIFA, Etats-Unis 1994 s’annonce sans grand relief. Au moment d’entrer sur le terrain de Stanford, les deux équipes sont toujours en quête d’un premier succès. Malgré une large victoire (6:1), les Européens doivent faire leurs valises à l’issue du match, tout comme leurs victimes du jour.
Pourtant, deux records ont été battus au cours de cette rencontre apparemment sans enjeu.
Les deux hommes représentés ci-dessus, Roger Milla et Oleg Salenko, sont les auteurs de cette page d’histoire. À ce jour, leurs exploits restent inégalés. Le second s’impose comme le grand homme de cette partie. En 90 minutes, l’attaquant russe est devenu le premier joueur à inscrire cinq buts dans un match de Coupe du Monde. « Je ne savais rien de ce record et je n’avais même pas envisagé de m’y attaquer un jour », confiait Salenko à l’époque. « J’ai appris par les médias que je l’avais battu. »
À 25 ans, il vient d’effectuer sans le savoir sa dernière sortie dans l’épreuve mondiale mais aussi et surtout en équipe nationale. Fâché avec le sélectionneur, il connaît par la suite une baisse de régime qui l’écarte définitivement de la scène internationale. Rétrospectivement, le match de Stanford apparaît donc comme le plus inhabituel des chants du cygne.
Quoi qu’il en soit, sa performance ne passe pas inaperçue. Lorsqu’on lui demande s’il entend souvent parler de cette rencontre unique en son genre, l’ancien joueur de Valence et des Glasgow Rangers n’hésite pas une seconde : « Tous les jours », glisse-t-il au magazine FourFourTwo. « C’est la magie de la Coupe du Monde. Toute la planète a les yeux rivés sur vous. Une performance spectaculaire reste à jamais gravée dans la mémoire collective. Je voyage beaucoup en Europe et aux États-Unis et il n’est pas rare que l’on vienne me parler de ce match. »
Fort de ce quintuplé, Salenko partage le Soulier d’Or adidas avec le Bulgare Hristo Stoitchkov. « J’étais ravi de me retrouver aux côtés d’un joueur de sa trempe. Nous nous sommes croisés plusieurs fois par la suite. Il jouait à Barcelone et moi à Valence. Nous échangions toujours une petite plaisanterie à ce sujet. Quand il me disait : ‘Tu peux me remercier de ne pas avoir mis un but de plus’, je lui répondais : ‘Tu peux me remercier de ne pas avoir mis un but de plus contre le Cameroun' », raconte Salenko.
Le secret de la longévité
Comme son homologue russe, Milla fait ses adieux à la Coupe du Monde et à son équipe nationale. Il faut dire que sa présence et sa longévité au plus haut niveau tiennent déjà du miracle. À 42 ans, le Camerounais n’a rien perdu de son efficacité, comme en témoigne sa réalisation face aux Russes. Le plus vieux buteur de l’histoire de l’épreuve mondiale se dit aujourd’hui convaincu que son record ne sera jamais battu. « Je suis certain que personne ne fera mieux que moi », assure Milla, qui est aussi le plus vieux joueur de champ de l’histoire du tournoi, le gardien colombien Faryd Mondragon étant devenu le doyen de la compétition en 2014 au Brésil, à 43 ans.
Interrogé sur le secret de son incroyable endurance, le double Joueur africain de l’année pointe du doigt son hygiène de vie. « Je prenais soin de moi. Je n’ai jamais rien fait qui aurait pu nuire à ma condition physique. Je ne faisais pas de folies ; au contraire, j’étais très raisonnable. Je ne buvais pratiquement pas d’alcool, juste un demi-verre de vin de temps en temps », confie-t-il
On peut se demander si ce jour-là, Milla et Salenko ont arrosé leurs exploits, qui resteront à jamais gravé dans l’histoire de la Coupe du Monde.