L’avocat au barreau du Cameroun ayant défendu le dossier de Bamboutos de Mbouda depuis 2007, jusqu’à sa réhabilitation en 2014 explique ce qui l’a poussé à faire saisir les comptes de cette équipe. En même temps qu’il reste ouvert au dialogue avec les dirigeants des « Mangwa Boys »
Qu’est-ce qui vous a amené à faire saisir les comptes de Bamboutos club de Mbouda ?
C’est un moyen de pression que je veux mettre sur Bamboutos pour entrer en possession de mes droits. L’avocat, tel que vous le savez, vit de ses honoraires. Si l’avocat n’a pas d’honoraires il n’a pas d’existence. Et lorsqu’un client vous constitue, vous le défendez et que même si vous n’arrivez pas au résultat, parce que nous n’avons pas d’obligation de résultat. Lorsqu’on arrive à un résultat aussi heureux que la remontée de Bamboutos en Ligue 1, il est de bon ton que les dirigeants de cette équipe puissent au moins se dire qu’ils peuvent payer les honoraires à l’avocat.
Je vais vous dire que les honoraires, c’est un symbole. Si vous regardez dans le lexique des termes juridiques, les honoraires n’ont jamais voulu dire argent. Les honoraires, c’est un cadeau qu’on peut offrir à quelqu’un qui vous a rendu un service. Voyez-vous, je dois rendre service à Bamboutos, je vais être nourri de promesses. J’écris même une lettre de supplication – ce qui n’est pas dans mon genre – les dirigeants de Bamboutos ne vont rien dire. Et leur président dont je tais le nom me dira qu’il va me payer lorsqu’il y aura le congrès à Mbouda.
Et y a-t-il eu ce congrès ?
Je suis parti de Yaoundé pour aller à Mbouda. Il me voit dans la salle et ne me salue même pas. Il ne sait même pas où j’ai dormi. Je rentre alors sur Yaoundé sans qu’on ne se dise un mot. Pourtant, on a cotisé devant mes yeux près de 28 millions de francs en espèce sonnantes et trébuchantes, sans compter les dons. C’est un peuple très dynamique et il y a des gens de très bonne volonté, qui veulent faire de ce club une équipe de dimension internationale. Ce n’est pas pour rien que les gens les appellent le Barça de l’Ouest. La façon par laquelle les gens soutiennent ce club est extraordinaire. Il faut que les dirigeants sachent que ce n’est pas le club d’un individu. C’est le club de tout un département voire un club des Camerounais. Il faudrait que lorsqu’un avocat plaide, qu’on le paye.
Quelles démarches avez-vous entreprises pour aboutir à ce contentieux ?
C’est après avoir fait des démarches. J’ai appelé le président (Justin Tagou, ndlr) au téléphone et j’ai senti qu’il s’énervait. Je lui ai envoyé un message pour lui dire que je ne l’appellerais plus jamais. Aussi glorieux ou riche qu’on puisse être, le droit d’aînesse et la seule courtoisie voudrait qu’il me prenne au téléphone. Je suis allé à Mbouda et je suis rentré sans mes honoraires, même pas des remerciements. Sans me présenter même au public pour dire : voilà l’avocat qui nous a aidés. Comme on n’a pas payé j’ai saisi le bâtonnier de l’Ordre des avocats pour la taxation d’honoraires ; qu’il taxe d’après la loi, ce dont j’ai droit. Le Bâtonnier me délivre des convocations pour que je leur notifie pour que nous venions devant lui, qu’on se concerte et qu’on dise ce qu’on peut me donner. Ils ne sont pas venus. Et choses curieuse, il y a des conclusions qui sont produits dans les dossiers où certains individus ont prétendu qu’ils ne m’ont jamais constitué, alors que je le suis depuis 2007. J’ai fait des batailles pour ce club. Je ne veux pas vous dire la crédibilité que j’ai perdue vis-à-vis des anciens membres de la Fécafoot, tout simplement parce que j’étais derrière ce dossier. J’ai été le représentant du ministre des Sports à la Fécafoot et j’ai été regardé comme un chien de Fayence jusqu’aujourd’hui. Je ne peux pas entrer à la Fécafoot et être respecté es titre.
Que réclamez-vous à Bamboutos comme compensation en termes de chiffres ?
Les honoraires d’un avocat ne peuvent pas se dévoiler en public. Le mot honoraire garde tout son sens. C’est pour cela que le prêtre parle d’honoraire de la messe. C’est pour cela que vous pouvez donner deux œufs depuis un village et demander au prêtre de célébrer une messe à une intention bien définie. Le prêtre ne peut pas dire qu’il ne prend pas deux œufs. Les honoraires pour nous, c’est une gratification. Mais, si elle n’est pas faite, elle est taxée. Et vous réclamez. Je crois qu’à l’époque, après avoir fait tout ce combat, on prenait même un montant symbolique pour me donner, le problème ne se poserait pas. Quelqu’un est allé jusqu’à dire que le nom Mangoua est un nom de la montagne, un nom du village. Même si j’étais de cette région, ce n’est pas eux qui m’ont envoyé à l’école. Le protocole qui remet Bamboutos de Mbouda en Ligue 1 a été signé par la Pr Joseph Owona et ma modeste personne.
Jusqu’où comptez-vous aller dans votre procédure ?
C’est une saisie conservatoire. C’est-à-dire que les instances ou les institutions qui sont saisies ont l’obligation de ne plus verser un seul denier, qu’ils ont ou auront, qu’ils détiennent ou détiendront, qu’ils prennent ou prendront à qui que ce soit autre qu’à l’huissier ou entre mes mains jusqu’à l’aboutissement, l’épuisement de ce montant. Ce montant est sou tendu par une décision qui est déjà engagée devant le Bâtonnier. Je sais pourquoi je fais cela. C’est provisoire, pour réveiller les gens de Bamboutos. S’ils viennent vers moi, et qu’on s’arrange pour un montant, je suis prêt à faire arrêter toutes les procédures. Il n’était pas question pour moi au départ de réclamer ce qui pouvait m’être donné en cachette.
Entretien mené par Antoine Tella à Yaoundé