En leur infligeant l’une des plus cuisantes défaites des cinq dernières années (3-0), les Super Eagles du Nigeria adressent un cinglant avertissement sans frais aux Lions indomptables suffisants, mais sans crocs ni griffes, à quelques semaines de la reprise des éliminatoires pour la CAN 2017.
On pourrait d’un haussement d’épaules banaliser la défaite des Lions indomptables face aux Super Eagles lors de la rencontre amicale qui a opposé dimanche en Belgique les sélections nationales du Cameroun et du Nigeria. En se disant qu’après tout, ce n’était qu’un match amical, avec tout ce que cela suppose d’expérimentation, de tâtonnement voire de relâchement. Mais une telle tentative de consolation ne tiendrait qu’à un fil, le temps d’effacer la cruelle douleur d’une véritable humiliation. Certes, les matchs amicaux, surtout lors des « journées Fifa », servent avant tout de banc d’essai aux différentes sélections nationales pour expérimenter des schémas tactiques, tester des nouveaux talents, faire une revue des effectifs et surtout jauger leur niveau réel.
Ceci dit, la rencontre de dimanche dernier ne saurait se réduire à un simple galop d’essai. Si la lourde défaite des Lions pourrait avoir du bon, c’est peut-être du côté des leçons à tirer à chaud, concernant le contexte de l’organisation de la rencontre, l’identité de l’adversaire et surtout le résultat final.
Premier constat : elle intervient au lendemain du renouvellement du bureau exécutif de la Fecafoot après le long intermède de la normalisation. Le nouveau président élu qui effectuait pour la circonstance sa première sortie officielle à l’étranger, aurait certainement souhaité un meilleur résultat pour le Cameroun. La vérité du terrain a été toute autre. En choisissant le Nigeria comme sparring-partner, les officiels camerounais ne pouvaient pas ignorer qu’il s’agissait d’un sérieux client. Vouloir se frotter à un poids lourd du football africain (bien que convalescent) comportait des risques à prendre en compte dans la stratégie globale de préparation de la rencontre. A titre de rappel, le Cameroun a déjà remporté trois finales de la CAN face au Nigeria. Ce qui a crée à la longue une rivalité entre les deux équipes, suscitant chez l’adversaire un goût inassouvi de revanche. On peut supposer que c’est l’équipe la plus volontaire et motivée qui a gagné.
Deuxième constat : la débâcle vient une fois de plus, mettre en exergue les nombreuses lacunes d’une sélection qui avait déjà d’énormes difficultés à marquer plus d’un but par rencontre (voir les résultats des matchs contre l’Indonésie, la Thailande, la Mauritanie, la Gambie…) et qui maintenant devient une véritable passoire. Le score est sans doute l’un des plus lourds de ces dernières années. Au cours de ce match à vite oublier, les hommes de Volker Finke ont affiché à nouveau leurs péchés mignons : lenteur à l’allumage, manque de fluidité dans le jeu, attestée par de nombreuses passes à l’adversaire, manque de complémentarité entre les lignes, etc.
Dans sa prestation d’ensemble, la cuvée du 11 octobre 2015 donne l’impression de se chercher une identité, une personnalité, comme si les éléments qui la composent ne s’étaient jamais retrouvés ensemble. C’est vrai que dans l’architecture des différents compartiments, des incongruités sautent à l’œil nu. A l’instar de cette défense repositionnée dont la fébrilité de certains éléments sortant de blessure aura contribué à alourdir le score, en plus du déficit d’assurance et de positionnement des gardiens de but peu actifs en club. Dans un milieu de terrain totalement chamboulé et en manque de solutions, deux entrants ont fait leur baptême de feu sans saisir vraiment leur chance alors que l’attaque, totalement muette, confondait le plus souvent vitesse et précipitation.
Au-delà du score qui reste sévère, le plus inquiétant c’est la mauvaise copie rendue par des Lions apathiques, comme tétanisés, face à des Super Eagles métamorphosés, maîtres du ballon (65 % de possession) et d’une efficacité redoutable. La sévère claque administrée aux Lions est un sérieux avertissement qu’il faudra capitaliser à un mois de la reprise des éliminatoires pour la CAN 2017 et la Coupe du monde 2018. Les joueurs et l’encadrement technique sont interpellés pour donner enfin un visage reconnaissable entre tous aux Lions indomptables du football.
Jean Marie NZEKOUE