Les Lions indomptables ont donc remporté le match qu’il ne fallait pas perdre. En allant s’imposer en terre étrangère face à un adversaire décidé à leur barrer la route vers la prochaine Coupe d’Afrique des nations, Hugo Broos et ses poulains ont confirmé la bonne impression laissée lors du match amical contre la France. Certes, le jeu camerounais, assez haché, n’était pas aussi alléchant que face aux Bleus.
Certains puristes seraient même restés sur leur faim. C’est oublier toute la différence entre une rencontre de gala et un match décisif. Il ne s’agissait pas nécessairement de produire du beau jeu, mais de se qualifier. Sur ce plan, des Lions très réalistes ont rempli leur contrat au-delà des espérances.
Pourtant, les premières minutes étaient loin de rassurer les supporters. Pressé de faire la différence, la Mauritanie s’est ruée à l’attaque, poussant dans ses derniers retranchements un bloc camerounais étonnamment bas. Le scénario était du reste attendu. En application des consignes du coach qui consistaient à contenir d’abord l’adversaire, à casser le rythme avant de lancer des banderilles, les Camerounais ont plié mais sans rompre. Mieux, mais ils ont su exploiter à merveille l’un des rares tirs cadrés pour marquer. Cela s’appelle du réalisme et c’est le propre des grandes équipes, même s’il ne faut pas exclure le facteur chance (tir mauritanien sur le poteau).
Côté enseignements, il est intéressant de constater que les Lions n’ont pas encaissé, comme à leur habitude, de but dans les 30 premières minutes et ont mieux géré la fin de rencontre. Jusque-là sujet d’inquiétude, l’axe central de la défense a fait montre d’une plus grande application dans le positionnement et la relance. Bien qu’émoussé, le milieu de terrain a mouillé le maillot. Venant après ceux d’Aboubakar et de Choupo, le but d’Edgard Salli, apparaît comme un indicateur de la polyvalence et de la richesse de la ligne d’attaque avec trois buts par trois buteurs différents en deux sorties.
Désormais libérés de toute pression, les Lions doivent se projeter vers l’avenir avec plus de sérénité. Déjà, le prochain match contre la Gambie serait une occasion idoine pour faire tourner les effectifs et essayer au besoin des nouveaux talents.
Si à l’entame du match contre la Mauritanie, le Cameroun avait pour principal souci de se composter son ticket pour la CAN 2017, rien n’étant acquis d’avance dans la fournaise de Nouakchott, les Lions se retrouvent face à des nouveaux défis, maintenant que la qualification est en poche. En effet, une préparation multisectorielle est indispensable pour aborder la compétition dans des bonnes dispositions physiques, mentales ou managériales. Après la Guinée Equatoriale en 2015, la CAN va se dérouler pour la deuxième fois consécutive, dans un pays voisin. Cette fois-ci, la sélection nationale n’aura pas pour unique ambition de participer ou de faire bonne figure, mais de remporter un trophée qui lui tourne le dos depuis une quinzaine d’années. Or pour monter sur la plus haute marche du podium, les Lions ont besoin d’un environnement favorable, d’un encadrement adéquat. On peut supposer que les déboires du passé ont servi de leçon aux instances dirigeantes, tant au niveau du ministère de tutelle qu’à celui de la Fédération, pour prendre à temps des mesures idoines.
A sept mois environ du coup d’envoi, il est temps en effet de mettre sur pied un canevas de travail adossé sur un échéancier détaillé, avec à la clé une batterie de prescriptions et d’actions à la hauteur des ambitions affichées ou des objectifs à atteindre. D’où la nécessité de rompre au plus vite avec la manie d’attendre toujours la dernière minute pour convoquer des joueurs de qui on attend des miracles. Sur la base d’un plan de travail détaillé, le staff technique pourrait par exemple procéder à des regroupements à intervalles réguliers, ponctués de matches amicaux pour régler les automatismes, améliorer la transmission du ballon, le positionnement de la défense ou les coups de pied arrêtés. Sans oublier la philosophie du jeu et la discipline tactique qui soudent le bloc-équipe. Il est illusoire de penser que le Cameroun peut remporter la CAN sans respecter à la règle, dès maintenant, certains fondamentaux qui servent de ferment à la victoire finale.
Jean-Marie Nzekoue, Editorialiste