Non retenu pour la CAN 2015, Alexandre Song Bilong, a décidé de prendre sa retraite internationale, à 27 ans. La sortie, tête baissée en Coupe du monde contre la Croatie, suite à son coup de coude inexplicable sur Mario Mandzukic, reste à ce jour la dernière image du joueur sous le maillot des Lions Indomptables. C’est la suite triste d’une histoire qui aurait pu être plus glorieuse.
Arrivé à 14 ans au Centre de formation Bastia, Alexandre Song est titularisé dès 2004 par François Ciccolini qui le fait débuter à seulement l’âge de 16 ans. En 2005, il signe à Arsenal pour la carrière incontestable que l’on sait. Il commence à être convoqué avec la sélection camerounaise, mais doit attendre 2008, et la Coupe d’Afrique des nations au Ghana pour exposer tout son talent aux yeux du monde. Pour sa première CAN, il réalise de grosses performances qui feront de lui la révélation du tournoi et lui vaudront d’être dans l’équipe type.
Qu’est-ce qui a pu se passer entre-temps ? Il faut repartir au Klagenfurt Wörthersee-Stadion en Autriche pour comprendre toute l’histoire. Le 12 aout 2009, les Lions Indomptables battent la sélection autrichienne par 2 buts à 0 et se redonnent du moral dans la perspective de la troisième journée des éliminatoires à la CAN/Mondial 2010. L’entraineur Paul Le Guen, arrivé quelques semaines plus tôt décide de retirer le brassard de capitaine à Rigobert Song qui le portait depuis dix ans pour le confier à Samuel Eto’o. Et depuis, rien n’a plus jamais été comme avant. Pendant la Coupe du monde 2010 en Afrique du Sud, la tension sera à son comble. Le climat délétère qui s’est installé ne s’est toujours pas détendu, cinq ans plus tard. Mépris, invectives, déclarations intempestives dans les médias, tout y est passé. Pourtant, Rigobert Song n’avait pas besoin d’Alex pour se défendre. D’ailleurs, de quoi devait-il se défendre ? Avoir été capitaine pendant dix ans suffit. Alexandre Song a abandonné ce pourquoi il était doué, c’est-à-dire jouer, pour s’occuper de ce qui ne le concernait pas. La sortie honteuse contre la Croatie en Coupe du monde n’a été que la triste suite.
Néanmoins, il reste comme un petit parfum de gène derrière cette retraite internationale d’Alexandre Song. Au vu de la totalité de son œuvre depuis 2010 dans les Lions, une sanction allait de soi. Mais chaque institution est régie des normes, et obéit au principe de la légalité des délits et des peines. Autrement dit, il existe au sein de l’équipe nationale du Cameroun, un règlement intérieur qui prévoit tous les comportements proscrits, et les peines que tous les contrevenants encourent. Le Comité de normalisation, après le choc subi au Brésil devait établir la liste de tous les joueurs impliqués dans le fiasco, établir les responsabilités et appliquer les sanctions, de façon officielle et avec équité. Rien n’a été fait dans ce sens, et rien ne sera fait, parce que les dirigeants sont les premiers responsables de l’échec. Au lieu de cela, on a donné des consignes à l’entraineur, établi depuis la présidence de la république une liste officieuse de bannis, sans que personne ne sache si le bannissement était limité dans le temps ou définitif. Cela s’apparente à une condamnation à perpétuité, sans motif officiel de condamnation. Cette sanction a perdu toute valeur éducative, et ne pousse pas le condamné à faire des efforts pour se réintégrer. Ce faisant, on a encore failli. Et l’échec cinglant à la CAN, conjuguée à la faiblesse de l’effectif de Finke ramène le débat : Au vu de ses performances en Club, Finke a-t-il d’autres choix que de ramener Alexandre Song ? Et lui le joueur est-il prêt à mettre de côté son égo pour se fondre dans un nouveau projet qui aura en ligne de mire la CAN 2019 ?
Claude KANA, Consultant Camfoot
Auteur de « LA FABULEUSE HISTOIRE DES LIONS INDOMPTABLES, De Samuel Mbappé Léppé à Samuel Éto’o », paru aux Editions Teham, Paris 2014, 464 pages