Un arbitre bastonné par un joueur, le retour triomphal de Roger Milla, les divisions au sein de la famille présidentielle… quelques savoureuses anecdotes autour de cette confrontation unique au Cameroun.
Théophile Abéga «frappe» sur l’arbitre
Après un séjour à Toulouse en France (1984-1985) et à Vevey-Sports en Suisse (1985-1987), Théophile Abéga retourne dans son club de cœur, le Canon Sportif de Yaoundé. Très vite, le Ballon d’or africain 1984 et ses coéquipiers affrontent le Tonnerre de Yaoundé, lors de ce qui était présenté comme le match le plus attendu de la saison 1988.
Formés à l’école allemande, les Canonniers déroulent et parviennent à mener 2-0. Mais leur rêve de victoire va ensuite virer au cauchemar, lorsque l’arbitre va expulser deux joueurs. Réduits à 9, les partenaires de Théophile Abéga vont alors être rattrapés au score (2-2), après notamment un but de Georges Weah. Les Canonniers ne vont pas autant abandonnés. En fin de rencontre, les Vert et Rouge croient avoir repris le dessus sur leurs adversaires, mais c’est sans compter sur l’arbitre Baron Abo Edouard qui va invalider le but. Courroucé, Théophile Abéga va sauter sur ce dernier et le rouer de coups de poings. Chose curieuse, l’arbitre ne va pas marquer cet incident dans son rapport de match.
Le retour triomphal de Roger Milla
Le Cameroun venait de se qualifier pour le Mondial 1994. Dans les principales villes du pays, le peuple réclame le retour de Roger Milla en sélection. Le double Ballon d’or africain (1976, 1990) qui n’avait pas joué depuis près de deux ans accepte de revenir. Et pour se mettre en forme, le joueur de 42 ans (à l’époque) annonce lors d’une conférence de presse qu’il rejoint son ancien club, le Tonnerre de Yaoundé. L’arrivée de Milla est actée quelques jours seulement avec le derby avec le Canon, comptant pour la troisième journée du championnat national. Le vieux Lion qui a pris un préparateur physique particulier s’entraîne une seule fois avec le Tonnerre, la veille de ce duel.
Le lendemain, des milliers de spectateurs ont pris d’assaut les tribunes du stade Omnisports Ahmadou Ahidjo. Des dizaines de médias internationaux ont également effectué le déplacement pour vivre en direct le retour de la star du Mondial 1990. Sur l’aire de jeu, Roger Milla débute le derby au poste de milieu relayeur. Le vétéran se frotte à la jeunesse et au talent de Marc Vivien Foe, maître à jouer du Canon qui mène rapidement 2-0. A la pause, Milla s’arrête devant les micros de la radio nationale et déclare que le Canon ne gagnera pas ce match.
De retour des vestiaires, Roger Milla change de poste. Le vieux Lion quitte le milieu de terrain pour la pointe de l’attaque du Tonnerre. Résultat : la rencontre se termine sur le score nul de 2-2 avec un Milla auteur du but égalisateur.
Quand le derby divise le couple présidentiel
Le derby entre les deux clubs mythiques du Cameroun a longtemps charrié les passions dans les rues de la capitale dans les années 1960 – 1980. Ce classico entre frères ennemis divisait même au sein de la présidence de la République. De mémoire d’un chroniqueur réputé proche du Palais présidentiel, l’ancien chef de l’Etat Ahmadou Ahidjo et son épouse ne partageaient pas la même admiration pour les deux clubs. Si le premier était devenu fan du Canon de Yaoundé en raison des trophées glanés au plan continental (1 Coupe d’Afrique des vainqueurs de coupe, 3 Ligues des champions de la CAF), son épouse elle, semblait amoureuse du jeu léché du Tonnerre.