Injustement limogé de la direction technique des Lions Indomptables en avril 2001, Pierre Lechantre s’occupe depuis une dizaine de mois de l’équipe nationale du Qatar. Il critique violemment le parcours des Camerounais en Coupe du monde. A la faveur d’un stage de l’équipe olympique Qatarie à Paris, Afrik a rencontré le technicien français Pierre Lechantre, ancien sélectionneur des Lions indomptables. Il revient sur la participation de l’équipe du Cameroun à la Coupe du monde et sur sa nouvelle vie dans le golfe persique. Interview sans concessions.
Afrik : Comment l’ancien entraîneur des champions d’Afrique 2000 a vécu la Coupe du monde 2002 ?
Pierre Lechantre : Très mal. Il y a quatre ans, quand on m’avait confié l’équipe du Cameroun, j’avais fait de la Coupe du monde 2002 une priorité. En 2000, j’ai gagné la Coupe d’Afrique des Nations et il régnait une bonne ambiance dans le groupe. Logiquement, je me voyais à la tête des Lions jusqu’à la Coupe du monde mais les autorités camerounaises en ont décidé autrement. Pour moi, ça été une grosse frustration.
Afrik : Etes-vous déçu aussi de la prestation des Lions camerounais à cette Coupe du monde ?
Pierre Lechantre: Qui ne le serait pas ? Nous avons tous été déçus du parcours de Rigobert Song et ses camarades. Je n’ai pas reconnu les Lions. Ils m’ont paru amorphes, physiquement diminués et mentalement faibles. Ce qui est un comble, parce que cette équipe a bâti sa réputation sur son enthousiasme, sa solidarité et sa fraîcheur physique. Je veux vous donner un exemple. L’Arabie Saoudite, qui est une équipe très moyenne et dont la principale qualité n’est pas le physique, a vaillamment tenu tête aux camerounais. Les Lions n’ont pas su mettre en valeur leurs propres qualités.
Afrik : A votre avis qu’est-ce qui peut expliquer cette baisse subite de régime des Lions ?
Pierre Lechantre: Deux explications sont possibles. La première, les Camerounais sont arrivés avec des complexes de supériorité en Asie et n’ont pas pris au sérieux leurs adversaires. Ils se sont reposés sur leurs lauriers, un peu à l’image des Bleus français. Pour la seconde explication, elle était visible sur le terrain. Les joueurs étaient à court physiquement. Face à l’Eire, ils ramaient presque en seconde mi-temps. Je crois que pour eux, le coup de sifflet final était une grosse délivrance.
Afrik : Que pensez-vous du coaching de l’Allemand Winfried Schäfer, votre successeur à la tête des Lions indomptables ?
Pierre Lechantre : C’est toujours mal vu de critiquer un confrère. Schäfer n’a rien apporté à cette équipe. Ses choix tactiques laissent à désirer. Je n’ai pas compris pourquoi, il a confiné un joueur comme Bill Tchato à un rôle purement défensif. Pourquoi, il n’a utilisé que 14 joueurs alors qu’il en avait 23 sous la main. Pourquoi, il n’a pas modifié la structure de sa défense, après l’expulsion du joueur allemand en première période. Honnêtement, je n’ai pas compris grand chose à son coaching.
Afrik : Un mot sur les Sénégalais ?
Pierre Lechantre : Ils ont joué comme je pensais le faire avec les Camerounais. Ils étaient hyper motivés. Ils jouaient sans calcul. C’est certainement dû au fait qu’ils avaient avec eux un entraîneur qui laissait l’initiative aux joueurs. Bruno Metsu a vite compris que le footballeur africain a besoin de s’éclater sur un terrain, de laisser libre cours à son intuition.
Afrik : Parlez-nous de votre nouvelle vie au Qatar ?
Pierre Lechantre : Je suis en charge des équipes nationales de football du Qatar. Je travaille en collaboration avec Alex Dupont (ex-entraîneur de Sedan, ndlr). Je réalise là-bas ce que je n’ai pas pu faire avec le Cameroun. Préparer une relève, mettre sur pied une bonne équipe nationale B.