Ecoles huppées à l’européenne, modestes centres de formation ou groupes de jeunes qui s’entraînent sans moyens sur des terrains vagues : du Sénégal à Madagascar, en passant par le Cameroun, le boom des écoles de foot a gagné tout le continent
Le Sénégalais El hadj Ousseynou Diouf, meilleur joueur africain de l’année, ses compatriotes Salif Diao, Souleymane Camara et autres, les Camerounais Eto’o Fils, Song Bahanak, Gérémie Njitap… De nombreuses stars du foot africain qui ont rythmé la dernière la Coupe du monde sont de purs produits des écoles de foot qui poussent comme des champignons sur le continent. Une révolution qui date d’à peine plus d’une décennie! Au Cameroun, l’entreprise privée de fabrication de boissons, Les Brasseries du Cameroun, déjà propriétaire de quelques équipes de foot, avait ouvert la voie en août 1989 en créant, à Douala, l’Ecole de football Brasseries du Cameroun (EFBC). Celle-ci aligne aujourd’hui près d’une demi-douzaine des joueurs au sein des Lions Indomptables. Six ans plus tard, sa concurrente, l’Union camerounaise des Brasseries lui emboîtait le pas en créant dans la banlieue ouest de Douala la Kadji sports Academy (KSA), un complexe sportif moderne multidisciplinaire qui couvre quelque 40 hectares. Ici, les jeunes recrues qui payent 400 000 F CFA (610 euros) par an pour les externes et le double pour les internes, ont le choix entre le foot, le volley, le tennis…
«J’en avais assez d’entendre la rengaine selon laquelle les Africains ont tout pour réussir dans le sport, mais qu’il leur manque les infrastructures», explique son fondateur, l’industriel Jadji Defosso, dans le journal Le Messager. Son premier coup de maître : le transfert du jeune prodige Eto’o Fils au Real de Madrid en Espagne. Parents supporters En raison de la médiatisation des montants faramineux des transferts de certains joueurs, de nombreux promoteurs se sont lancés dans la création d’école de foot où de plus en plus de parents poussent leur progénitures.
A côté de quelque cinq centres de haut niveau dotés d’infrastructures modernes et d’un encadrement efficace, une multitude d’écoles créées à partir de rien essaiment dans tout le pays, effectuant un travail efficace de repérage de jeunes talents.
La même frénésie a saisi le Sénégal. «Avant on était considéré comme des amuseurs d’enfants. Mais depuis les cinq dernières années, surtout avec l’engouement de la Coupe du monde et les gros salaires dans le foot, on est bien vu par les parents», commente Alpha Sylla, lui-même à la tête d’une petite école de foot dans le quartier des HLM Grand-Yoff, non loin du Stade national Léopold S. Senghor. Son Alphabet Foot accueille, depuis deux ans, une cinquantaine d’enfants de 8 à 17 ans.Chaque ville sénégalaise compte au moins une école de ce genre, soit plus d’une vingtaine dans le pays. La plus connue est sans doute le Centre Aldo Gentina, partenaire de l’As Monaco en France, fondée il y a une dizaine d’années par El H. Malick Sy, aujourd’hui président de la Fédération sénégalaise de football. Son budget dépasse les 50 millions de F CFA (environ 76 000 euros).
Pour ne pas maintenir les gamins dans l’illusion d’un avenir de star, les encadreurs veillent à leur travail scolaire. «Celui qui n’a pas de bonnes notes à l’école ou au collège est momentanément suspendu de foot, en accord avec les parents, conformément au règlement intérieur du centre», souligne Alpha Sylla.
Les promoteurs de ces centres sont tous d’anciens entraîneurs, des formateurs ou des éducateurs fous de foot. La plupart des écoles fonctionnent avec un statut associatif, du travail bénévole et sans gros moyens. Il n’y a pas assez de ballons, d’équipements vestimentaires, etc.
L’Etat, pour le moment, ne leur apporte aucune aide. Affaires de privés, en Côte d’Ivoire également, ce genre d’initiative appartient aux privés. C’est le Français Jean-Marc Guillou qui a ouvert le bal en 1994 par la création de l’Académie de football Mimosifcom, en partenariat avec l’ASEC d’Abidjan, un club de Division 1. D’anciens joueurs, entraîneurs et autres amoureux du foot l’ont suivi. D’après le quotidien Ivoir’Soir, la Côte d’Ivoire comptait en 2001 trente-deux écoles d’animation de football. Le travail de Jean-Marc Guillou a porté ses fruits dès 1999 : les jeunes sortis de son école ont propulsé l’ASEC d’Abidjan en tête du championnat national, avant de le hisser, quelques mois plus tard, sur le podium en vainqueur de la super coupe d’Afrique.
Jean-Marc Guillou ne s’est pas arrêté là. En février 2001, il a donné à Madagascar sa toute première école de foot, l’Académie Ny Antsika JMG (Jean-Marc Guillou). Objectif ? «Former rigoureusement des jeunes de talents pour qu’ils deviennent plus tard des internationaux», lance Olivier Guillou, l’encadreur technique du centre. Les stagiaires sont des jeunes recrutés dans tous les coins du pays parmi les plus talentueux. Les heureux élus sont entièrement pris en charge par l’école.
D’après un responsable du centre, «quel que soit leur niveau d’étude, ils peuvent poursuivre les classes à l’Académie même et passer leurs examens officiels».L’emploi du temps est réparti à raison de 50% de formation professionnelle et 50% d’enseignements généraux. Quant aux débouchés, Olivier Guillou pense surtout à la Belgique, le pays d’Europe où les conditions de recrutement des joueurs étrangers sont les moins contraignantes. Beaucoup d’autres petits centres de formation ont émergé depuis dans l’île mais faute de moyens, ils se limitent à des séances régulières d’exercices sportifs.
Au Mali, la première école de foot a ouvert ses portes en 1994, grâce à l’ancien international Salif Kéïta. Les ex-pensionnaires du centre qui porte son nom forment l’ossature de l’équipe nationale junior du Mali. Evolution similaire au Burkina Faso, avec Planète-Champion dont les éléments forment l’essentiel de l’équipe nationale cadette. Elle a été créée par l’homme d’affaires Philippe Ezri en partenariat avec le Paris Saint Germain (PSG), équipe française de première division.
Malgré les difficultés, petites ou grandes, ces écoles contribuent sans conteste au développement du foot africain. «Les centres de formation sont aujourd’hui incontournables. C’est un peu à l’exemple de la France» explique Oumar Ndiaye, directeur administratif de la Fédération sénégalaise de football. Problème, rien n’est encore réglementé : «On espère, conclut-il, que ça va venir et qu’on prêtera à ces centres de formation une