En vue de la préparation du dernier match qualificatif à la coupe d’Afrique des nations édition 2013 contre le Cap vert, Denis Lavagne l’entraîneur controversé de l’équipe nationale, vient de pré-sélectionner près d’une quarantaine de joueurs dont l’inusable Pierre Womè Nlend. Un choix qui, s’il venait à se confirmer, marquerait un tournant dans l’histoire à sensation des Lions Indomptables.
C’était il y a bientôt 7 ans. Un certain 08 octobre 2005 au Stade Ahmadou Ahidjo de Yaoundé. Le Cameroun jouait sa qualification à la coupe du monde 2006 contre l’Egypte. Sur nos propres installations et avec la ferveur d’un public des grands jours, Pierre Womè Nlend loupait à la 94ème minute (temps additionnel), le pénalty qui devait offrir la victoire aux Lions et leur ouvrir du même coup, les portes d’une cinquième participation d’affiliée à la coupe du monde. Stupeur et désarroi sur l’ensemble du pays mais aussi lâchage en direct de l’infortuné par ses partenaires. Ce que ne manquera pas de reprendre au rebond. un public survolté, vite converti à la casse et une barbare chasse à l’homme qui ne se justifiait pas. Bilan, un gros traumatisme national pour le pays et pour le pauvre Womè Nlend, un désenchantement profond suivi de questionnements existentiels sur sa réelle place au sein de cette formation sensée incarnée le Cameroun dans sa plénitude, sa grandeur et sa beauté.
Une grosse cassure venait de se produire et révélait un mal jusque là insoupçonné: les inimités de coulisses dans la tanière sur fond de batailles d’égos. Rejeté par les siens et voué aux gémonies par la tutelle de l’époque, Womè le dorénavant maudit, expérimentait le chemin de croix qu’avait dû endurer Laureen Etamè Mayer avant lui.
La retour par le talent
Convaincu de l’influence néfaste et plus sûrement de la main-mise de certains de ses ex-coéquipiers sur la gestion de l’équipe nationale, il sortira deux ans plus tard de son mutisme rageur pour affirmer publiquement que » je ne jouerai plus jamais avec la sélection nationale. ça fait bientôt deux ans qu’on traîne mon nom dans la boue et j’en ai marre ». Propos de dépit pour un champion qui avait tout gagné jusque là avec son équipe nationale et qui la voyait dériver vers de sombres horizons. Même l’allemand Otto Pfister qui tentera de le re-convoquer trois ans plus tard pour le match amical Cameroun-Afrique du Sud du 19 novembre 2008, n’aura pas plus de succès. La décision restait irrévocable. Seule persistait, cette énorme envie de jouer qui va le traîner pendant ces moments difficiles de Brescia à l’Inter de Milan puis du Werder de Brême au Fc Cologne et depuis la mi-année 2011 au Canon sportif de Yaoundé.
La pré-sélection qui lui tombe sur la tête aujourd’hui est la conséquence logique d’une certaine objectivité à laquelle ne peut se soustraire n’importe quel observateur assidu du championnat professionnel en cours. A 33 ans et bien en jambes, Pierre Womè Nlend (67 sélections ), éclabousse le championnat de toute sa classe. De tous les déplacements de son club, il est l’homme à neutraliser. Dans un rôle de milieu de terrain à la Andréa Pirlo, il affole les adversaires par sa vista, donne des sueurs froides à tous les gardiens de but sur les coups de pieds arrêtés et affiche une modestie surprenante pour qui comme lui a côtoyé les cimes du football mondial. En une dizaine de rencontres, il a déjà à son compteur 6 buts et passe pour le meilleur buteur de son club. Son retour n’était pas une retraite mais un bon coup mijoté pour nous jeter à la figure tout le talent qui sommeille en lui. Match après match, on voit renaître un sphinx de ses cendres et sans discussion, on se prend à se questionner face à une certaine médiocrité, sur son absence en équipe nationale.
Va-t-il pour cette fois-ci accepter sa pré-sélection et évacuer pour de bon l’écume noirâtre de la barbarie des années passées? Les cafouillages actuels de l’équipe nationale sont la bonne raison nous le croyons, d’un retour gagnant qui réconcilierait et rassurerait plus d’un.