Alors que tout le monde est convaincu depuis une semaine que les textes de la Fédération camerounaise de football (Fécafoot) peuvent permettre au processus électoral d’avancer, des missiles dorment dans les tiroirs du président de Ngaoundéré Fc. L’enseignant à l’Université de Ngaoundéré remet tout en question parce que, selon lui, la procédure d’adoption de ces textes a été inversée.
Selon des sentences prises en sa faveur par la Chambre de conciliation et d’arbitrage (Cca) et le Tribunal arbitral du sport (Tas) qu’il détient, il fallait aller recomposer l’assemblée générale d’adoption des textes de la Fécafoot depuis les ligues décentralisées : des départements, puis les régions pour aboutir à une assemblée générale devant adopter les textes fédéraux comme cela a été fait à Yaoundé. Et en le faisant, selon cet agrégé en droit, ce sont des clubs, « véritablement membres et acteurs de la Fédération », qui devaient constituer cette assemblée générale.
Nous avons contacté l’un des plus virulents contestataires du processus électoral de la Fécafoot devant les juridictions de sport et depuis le chef-lieu de la région de l’Adamaoua, il s’est livré à nous. Lisez plutôt.
Quelle appréciation faites-vous de l’adoption des textes de la Fécafoot qui a eu lieu à Yaoundé ?
Le 28 mars 2013, à la demande des clubs de football de l’Adamaoua que je représentais, la Chambre de conciliation et d’arbitrage (Cca) du Comité national olympique et sportif du Cameroun (Cnosc) ordonnait à la Fécafoot de modifier l’article 4 du statut spécial des ligues décentralisées. Cette sentence a été confirmée par le Tribunal arbitral du sport (Tas) le 25 août 2013, après que cette juridiction ait rejeté le recours des dirigeants de la Fécafoot. Ces sentences n’ont jamais été appliquées par le Comité de normalisation.
Quelle devait être la conséquence de l’application de cette sentence ?
L’application de cette sentence aurait permis, depuis longtemps, de recomposer les assemblées des ligues décentralisées dans lesquelles ne devraient plus siéger que les clubs sportifs. Ces assemblées des ligues décentralisées, nouvellement reconfigurées, devaient désigner des délégués appelés à constituer une nouvelle assemblée générale pour l’adoption des nouveaux statuts et du code électoral. Quoi de plus logique ! Toute normalisation à la Fécafoot devait commencer dans les ligues. De toute façon, dès lors que les sentences dont je parle n’ont pas été mis en application, pour moi, l’assemblée générale du 5 août 2015 est nulle et de nul effet : les textes de la Fécafoot n’ont jamais été valablement adoptés. J’ai entendu dire dans tous les médias que le Tas avait ordonné que les textes en question soient adoptés par l’assemblée de 2009. Ceci est faux et archifaux ! Aucune juridiction n’a jamais dit une chose pareille, puisqu’aucune juridiction n’a jamais été saisie sur le point de savoir quelle est l’assemblée qui devait adopter les textes de la Fécafoot. La Cca avait simplement dit que l’assemblée de 2013 ne pouvait pas le faire. Le recours du Comité de normalisation contre cette sentence a simplement été rejeté. Paresseusement, tout le monde a déduit qu’il fallait revenir à l’assemblée de 2009. Seulement, on n’a pris en considération les sentences du 28 mars 2013 (Cca) et du 25 août 2013 (Tas). Sur cette question, j’ai adressé un recours au Comité de normalisation, bien avant la tenue de l’assemblée du 2 juin 2015. Par mépris sans doute pour ma personne, le président du Comité de normalisation n’a même pas cru utile de répondre à ma correspondance.
Pensez-vous qu’on peut avancer avec le processus électoral avec ces textes ?
Non ! Absolument non ! Je vous dis que ces textes ont été adoptés par une mauvaise assemblée. Ils ne sont donc pas valables. A supposer même que, par extraordinaire, on admette que ces textes sont valables : ils ne peuvent pas régir le processus électoral annoncé. Ceci s’explique par le fait que les dernières élections à la Fécafoot ont été annulées par une sentence rendue le 24 mai 2013, dans neuf ligues régionales. Je vous rappelle que c’est moi qui ai mené ce procès devant la Cca. Les sentences arbitrales en matière sportive sont d’application immédiate. Les élections devraient donc être reprises dès le lendemain de leur annulation par la justice sportive, une reprise qui ne devait souffrir d’aucun délai. Lorsqu’on reprend les élections plus de deux ans après, on doit se comporter comme si l’on était au lendemain de leur annulation, c’est-à-dire, le 25 mai 2013. Or, à cette date-là, les textes prétendument adoptés mercredi n’étaient pas encore en vigueur. Un texte adopté le 5 août 2015, ne peut pas régir les élections qui devaient se tenir en mai 2013. Ceci tient du principe de la non-rétroactivité des normes juridiques.
Sur quoi allez-vous vous pencher en ce moment, après l’adoption de ces textes ?
Pour le moment, je ne fais rien et j’attends, avec l’espoir que ceux qui sont en charge de régler le problème de la Fécafoot prendront en compte les quatre sentences que j’ai dans mes tiroirs, à savoir, les sentences du 28 mars 2013, du 25 août 2013, du 24 mai 2013 et du 30 décembre 2014. Si le Comité de normalisation s’entête à poursuivre le processus électoral en ignorant ces sentences, je les laisserai faire et il ira jusqu’au bout de sa logique de mépris des décisions de justice. On peut même aller jusqu’à l’élection du Président de la Fécafoot. Dès le lendemain de cette élection, j’enverrai un courrier au nouveau président pour lui annoncer que son élection, ainsi que l’ensemble du processus électoral qui l’a conduit à ce poste, sont nuls et de nul effet. Le monde du football camerounais découvrira alors qu’on a perdu deux ans avec un Comité de normalisation, qui n’a apporté aucune solution aux problèmes de la Fécafoot que je dénonce depuis de nombreuses années.
Entretien mené par Antoine Tella à Yaoundé