Jean-Armel Kana-Biyik a fait une sortie en règle contre le sélectionneur des Lions Indomptables du Cameroun, Volker Finke qui l’a retranché de la formation qui représentera le Cameroun au Mondial brésilien. Il assure être guéri de sa blessure depuis plusieurs jours, même si le staff insistait pour affirmer le contraire. Il annonce donc sa retraite internationale, à 24 ans. Ce coup de gueule ne va certainement pas améliorer l’image de Bad Boy du joueur qui a fini la saison suspendu par son club pour avoir failli venir aux mains avec des supporters.
Interview:
Pourquoi une telle décision?
Je me rends compte qu’il y a plein de magouilles en équipe du Cameroun, et ça ne changera jamais. Je préfère mettre un terme à ma carrière internationale, et me concentrer pleinement sur celle en club, afin de redevenir le défenseur que j’étais.
Vous voilà donc très jeune retraité…
C’est clair, je n’ai même pas encore 25 ans [Kana-Biyik les aura le 3 juillet]. Ca peut surprendre, mais la sélection du Cameroun est remplie de mauvaises choses. Je ne me reconnais pas dans cette sélection. J’y suis entré parce que j’avais l’amour du pays de mes parents, de mes ancêtres. Mais il s’avère que ce n’est pas du tout comme je pouvais l’imaginer. J’avais entendu des choses, mais je ne pensais pas que c’était à ce point-là. J’en ai eu la confirmation lors du dernier stage [de préparation, en Autriche].
Que s’est-il passé exactement?
Je me suis blessé en arrivant au stage [entamé le 20 mai]. J’avais une légère lésion, qui s’est résorbée au bout de trois-quatre jours. Je leur ai dit que j’allais déjà mieux, mais allez savoir pourquoi, ils n’ont pas voulu que je m’entraîne. Le plus bête, c’est qu’ils m’ont fait faire une IRM de contrôle, qui disait clairement que tout allait bien. La veille du match contre l’Allemagne (2-2, le 1er juin), vu que je ne me suis pas entraîné, je ne m’attends pas du tout à jouer, mais au moins à faire un entraînement collectif avec le groupe. «L’autre» – je ne vais pas citer son nom [il vise Volker Finke] – m’envoie carrément à l’écart, pour faire des «centres-reprises». Moi, défenseur, faire des centres-reprises… Le jour du match, je suis sur la feuille, à mon grand étonnement. Je vais sur le banc de touche en baskets, puisque je sais que je ne vais pas entrer en jeu. Ils m’ont ramené un médecin de la sélection allemande pour vérifier ma cuisse, et ce médecin me dit que la blessure n’est pas guérie. Je lui réponds: «Attendez, ce n’est pas vous qui jouez, ce n’est pas votre corps. Je me sens bien, donc ce n’est pas vous qui allez prendre la décision à ma place». Lui insistait sur le fait que ce n’était pas bon, et là j’ai compris qu’il y avait une magouille derrière.
C’est-à-dire?
Je respecte les gens qui sont francs. Je peux ne pas aimer une personne, mais si celle-ci est franche, je vais avoir du respect pour cette personne. «L’autre», je n’ai aucun respect pour lui. S’il voulait vraiment ne pas me mettre dans la liste, il aurait dû me dire: «Ecoute, j’ai d’autres joueurs », ou bien: «Je n’en ai pas envie». J’aurais dit: «OK, pas de problème». Mais là, il n’a même pas eu le courage de me le dire en face. J’ai appris la nouvelle lundi matin, avec une alerte lequipe.fr sur mon téléphone. A la rigueur, il m’aurait juste envoyé un message… Même pas! Je trouve ça très lâche.
Pour quelle raison officielle vous a-t-il écarté?
Si vous lui posez la question, il dira que je suis blessé, mais aujourd’hui, ce n’est pas le cas. Là, je rentre du sport [entretien réalisé mardi soir]. Excusez-moi, mais quelqu’un qui est blessé à la cuisse ne peut pas faire 30 minutes de footing et 20 minutes de vélo. En plus, c’était de la presse, donc ce sont des foutaises. Il n’avait pas envie de me mettre dans la liste, c’est tout. Moi, j’ai toujours été franc, et j’aime avoir de la franchise en retour. Quand tu es hypocrite avec moi, je ne te respecte pas. Dans cette sélection, il y a des hypocrites, des lèche-culs, et tant qu’il y aura ces personnes qui font des choses dans le dos des autres, elle n’avancera pas, malheureusement. Maintenant, ils se débrouillent avec leurs problèmes, ça ne regarde plus qu’eux.
Votre éviction du groupe est due à quoi précisément, selon vous?
Ça doit être un peu de tout. Peut-être s’agit-il du vestiaire, ou même du staff. Je ne saurai certainement jamais la vérité. Mais ils doivent savoir que je ne suis pas idiot. Je n’ai pas commencé le foot hier, je sais comment se passent certaines choses. Il ne faut pas me prendre pour un imbécile.
Si ceux que vous incriminez s’en vont, pourrez-vous revenir sur votre choix?
Même s’ils partent, on en mettra d’autres derrière qui seront peut-être encore pire. C’est définitif, ma carrière internationale s’arrête ici.
Mais n’avez-vous pas l’impression de prendre cette décision à la hâte, du fait de l’énorme déception de ne pas aller au Brésil?
Si je ne l’avais pas dit aujourd’hui, je l’aurais dit dans un mois ou deux. Ils ne peuvent plus compter sur moi, c’est fini. Qu’ils ne m’appellent plus. Je ne suis plus à leur disposition.
Propos recueillis par Jérémy Goujon, 20minutes.fr