Le professeur James Mouangue Kobila brise l’omerta observé au sein du Comité de normalisation du football camerounais. Dans un entretien qu’il nous a accordé, l’agrégé en droit public international s’est penché sur plusieurs sujets d’actualités, de ses rapports avec le Comité, des textes modifiés de la fédérations, de Volker Finke et surtout de sa nomination à la Chambre de Conciliation et d’Arbitrage du Comité olympique sportif camerounais, nomination qui fait les gorges chaudes à la Fécafoot. Entretien…
Vous êtes membre du Comité de normalisation du football camerounais et membre de la commission d’arbitrage et de litige du Comité national olympique du Cameroun. Comment conciliez-vous ces deux fonctions qui semblent opposées ?
Il faut noter, que j’ai été nommé au Comité de normalisation du football camerounais au mois de juillet 2013 et que, c’est le 30 janvier 2014 que j’ai été nommé à la chambre de conciliation et d’arbitrage du Comité national olympique et sportif du Cameroun. Les deux fonctions sont très partiellement incompatibles, mais largement compatibles. Elles sont incompatibles dans la mesure qu’en ma qualité de membre du Comité de normalisation, je ne pourrais siéger à la chambre de conciliation et d’arbitrage du Comité nationale olympique et sportif, chaque fois que cette chambre aura à connaitre des différends relatifs au football. En revanche, il y a compatibilité large pour ce qui concerne les litiges dans tous les autres sports (basketball, tennis, handball, volleyball…). Je peux siéger tout en étant membre du Comité de normalisation de la Fecafoot. Il n’y a pas de souci à se faire. Je prendrai la plénitude de mes fonctions comme conciliateur, une fois que mon mandat au Comité de normalisation du football camerounais sera arrivé à son terme.
Votre nomination à la chambre de conciliation et d’arbitrage du CNOC a-t-elle été bien accueillie au sein du Comité de normalisation, quand on sait qu’à la Fécafoot, on conteste la quasi-totalité des décisions de ladite chambre ?
On peut penser que je suis dans une attitude difficile à tenir, dans la mesure, ou j’ai bien perçu à mon arrivée à la Fécafoot au cours des auditions que j’ai eues aussi bien avec les acteurs du milieu du football, qu’avec les administrateurs de la Fécafoot et en prenant connaissance des statuts de la Fédération. Il y a une tendance dans la famille du football à rêver de l’indépendance du football, relativement au mouvement olympique. Or, il se trouve que la Fédération sportive de football association est elle-même membre du mouvement sportif olympique international, et à ce titre, la Fifa se plie aux décisions du Comité olympique international. Et que, c’est légitimement que le législateur camerounais à travers le vote de la loi qui réorganise le sport au Cameroun a prescrit que toutes les fédérations sportives doivent insérer dans leur statut, la reconnaissance de la chambre de conciliation et d’arbitrage du Comité national olympique. Toutes les Fédérations l’ont fait y compris la Fédération camerounaise de football. C’est la raison pour laquelle je suis un peu étonné, que l’on prétende que la Fédération camerounaise de football est autonome et que dès lors, elle ne saurait se soumettre aux décisions de la chambre de conciliation et d’arbitrage du Comité national olympique et sportif du Cameroun. Ledit Comité tient sa compétence du législateur camerounais et des textes de la Fécafoot. Je suis vraiment étonné. C’est peut-être une question d’humeur liée à une certaine conjoncture. Je dirais, que c’est une question conjoncturelle qui ne saurait occulter la vérité de fond.
Votre position au sujet du CNOC est complètement différente de celle du président du Comité de normalisation. Comment se passe la cohabitation entre vous?
Il ne m’appartient pas de commenter les décisions du président du Comité de normalisation du football camerounais devant la presse.
Professeur, on constate juste, que vos positions sont diamétralement opposées sur la question…
Ne personnalisons pas les choses. Ce n’est pas le Professeur Mouangue Kobila qui a inscrit dans la loi du Cameroun, la compétence de la chambre de conciliation et d’arbitrage du Comité national olympique, en tant qu’instance faitière qui joue en quelque sorte le rôle de Cour Suprême de tous les sports au Cameroun. Ce n’est pas le Professeur Mouangue Kobila qui a inscrit dans les statuts de la Fécafoot qu’en dernier recours au plan interne, si les partis à un litige concernant le football ne sont pas contents des décisions rendues par les différentes instances, elles ont la faculté de recourir à la chambre de conciliation et d’arbitrage du Comité national olympique et sportif.
Vous communiquez très peu au Comité de normalisation. Nous aimerions profiter de cette occasion pour savoir, comment les membres du Comité de normalisation du football camerounais ont accueilli la prorogation de son mandat par la Fifa?
Il me semble que cette prorogation s’imposait. Ceci dans la mesure où le Comité de normalisation a reçu un mandat, qu’il a tout mis en œuvre pour l’exercer et que par la force des choses, le Comité n’a pas pu exercer son mandat en entier. Il me semble qu’étant donné que le Comité n’était en rien fautif, il s’indiquait qu’on lui accorde encore un peu de temps pour achever son travail.
Les circonstances sur lesquelles il convient d’insister concernent la remise des projets de textes à la Fifa et celle qui concerne la coupe du monde. Commençons par le dernier élément, la coupe du monde. Le Cameroun devait se qualifier pour la coupe du monde. On sait que le Comité de normalisation a beaucoup œuvré en ramenant la sérénité qui a rendu possible la qualification des Lions pour la coupe du monde. C’était une phase ou une partie de l’énergie qui aurait pu être consacrée entièrement à la révision des textes et l’élaboration du processus électoral a été détournée.
Par la suite, une bonne partie de l’énergie du Comité de normalisation est encore détournée des missions qui lui ont été attribuées par la Fifa. Je parle ici, des missions sur lesquelles l’opinion nous attend le plus, à savoir la révision des textes et l’organisation des élections pour la troisième mission, qui est la gestion des affaires courantes. Ceci dans la mesure où il faut préparer la participation qu’on souhaite honorable des Lions Indomptables à la coupe du monde au Brésil.
S’agissant de la transmission des textes, il est bon que les camerounais sachent, que les textes ont été transmis à la Fifa. Une vingtaine de textes a été transmise. Ceci représentait en tout la trentaine de textes que le comité devait réviser. Il ne s’agit pas de dire qu’il n’y a que l’article (4) à réviser. C’est de la caricature. Il ne s’agit pas de dire qu’il y a un seul texte à réviser. Si on convient qu’il n’y a qu’un seul texte à réviser, quel serait ce texte ? Ce sera le code électoral ? Et que dirait-on des statuts ? Ce serait les statuts de quoi ? Le statut de la Fédération au niveau national et que ferait-on des statuts au niveau des Ligues régionales ? Que dirait-on des statuts des Ligues spécialisées du football professionnel, du football féminin, du beach soccer etc. ? Je pense qu’il faut qu’on cesse de galéjer, qu’on soit un peu sérieux et qu’on sache que le travail assigné au Comité de normalisation est un travail immense. Le Comité s’est acquitté honorablement de ce travail.
Il a transmis un premier jet de huit textes qui auraient pu déclencher le processus électoral à la Fifa, la première semaine du mois de décembre. Chacun a pu voir dans les médias, que c’est seulement trois mois après que la Fifa a réagi en venant au Cameroun. Même quand la Fifa a réagi trois mois et demi après. C’était au mois de mars. Lorsque la Fifa est arrivée au Cameroun au mois de mars, elle n’a examiné qu’un seul dossier sur la trentaine qui lui avait été envoyé. Il s’agit en occurrence des statuts de la Fédération camerounaise de football. Le texte clé qui détermine l’organisation des élections que les uns et les autres attendent avec impatience, une impatience justifiée n’a pas encore été examiné par la Fifa.
Trente textes ont été envoyés à la Fifa : huit d’abord, ensuite une vingtaine. La Fifa a réagi trois mois et demi après. Faut-il jeter l’opprobre sur la Fifa? Faut-il la blâmer ? Je ne suis pas de cet avis. Dans la mesure où j’ai confiance comme chaque camerounais que la Fifa a entre les mains, une coupe du monde de football à organiser. On doit comprendre que depuis plus d’un an, du président jusqu’au dernier employé, la priorité est la coupe du monde Brésil 2014. Il serait déraisonnable de penser, que la Fifa devrait négliger l’organisation de la coupe du monde pour accélérer la révision des textes et le renouvellement des organes au sein des Fédérations ou de quelques Fédérations sportives qui connaissent des difficultés.
Je pense qu’en restant raisonnable, on peut juger sage la mesure prise par la Fifa et faire confiance au Comité de normalisation qui entend mener sa mission à bien notamment en ce qui concerne les élections. Je peux parler avec une certaine confiance, compte-tenu du travail de collecte d’informations que nous avons effectué en écoutant plus de trois cent personnalités des milieux du football sanctionnée par un rapport volumineux. Nous avons par ce fait anticipé toutes les phases du déroulement des élections avec le contentieux électoral. Dans ces conditions, nous n’attendons plus que les textes pour tout harmoniser.
En tant que citoyen camerounais, quel avis portez-vous sur la liste des vingt-huit joueurs présélectionnés par Volker Finke pour le stage des Lions Indomptable en Autriche du 20 au 30 mai?
En tant que citoyen camerounais, je suis l’actualité du football, l’évolution des joueurs… Comme en plus d’être citoyen camerounais, je suis membre du Comité de normalisation de la Fédération camerounaise de football, j’ai eu l’occasion d’échanger à maintes reprises avec le sélectionneur des Lions Indomptables, Volker Finke. Je pense que c’est un monsieur en qui il faut faire confiance. Il est possible qu’il se trompe humainement sur un joueur ou deux. Je pense qu’il mérite la confiance des camerounais, du moins à quatre vingt-quinze pour cent.
Selon vous, la campagne sera t-elle différente du cauchemar sud-africain ?
Je ne suis pas très fort en pronostic. Je ne prendrais donc pas de risque.
Entretien mené par James Kapnang