Les joueurs de l’équipe du Cameroun donnent l’impression d’une bande d’enfants gâtés, imbus par la suffisance et l’arrogance dignes des parvenus. Sur le terrain, leur objectif n’est visiblement pas de gagner, mais de se pavaner et d’étaler leurs égos aux yeux ébahis du monde entier. Le champ d’action en sélection nationale étant très large, ils peuvent dès lors se permettre ici ce qui est strictement interdit en club. Impossible d’imaginer, au hasard, un Alexandre Song défier publiquement le président du FC Barcelone ou contester les choix de l’entraîneur.
A contrario, il est fréquent de voir au Cameroun des joueurs dicter la loi à leur fédération, donner leur avis sur les choix de l’entraîneur, ou le remplacement des joueurs, s’isoler du groupe pour jouer à la méga-vedette, arriver en retard aux entraînements sans explication valable, etc. Puisque le mal persiste, l’indiscipline est le principal talon d’Achille des Lions (qui ne méritent plus le qualificatif d’indomptables). Dans toute équipe bien organisée et structurée, les rôles sont bien définis et chacun sait à quoi s’en tenir et ce qu’on attend de lui. L’administration doit créer un environnement favorable au plan matériel, psychologique et sociologique, l’entraîneur doit choisir les joueurs les plus compétitifs pour obtenir les meilleurs résultats, les joueurs doivent s’appliquer sur le terrain pour honorer leur sélection et procurer des satisfactions au public.
Au Cameroun, on semble plutôt assister à une confusion des rôles. Non content de jouer son rôle de facilitateur en amont, l’administration (Ministère des sports et Fédération) a toujours eu son mot à dire sur la convocation des joueurs ou la composition des équipes mêmes si officiellement elle s’en défend. Le cafouillage s’est encore vérifié lors de la confection de la liste des 23 pour la Coupe du monde 2014. Alors que d’autres pays qualifiés l’avaient fait depuis plusieurs semaines, le Cameroun a attendu le dernier jour pour l’officialiser. Evidemment dans la précipitation et la subjectivité. On apprend aujourd’hui que cinq joueurs de l’expédition étaient malades et ont empêché par leur présence de donner leur chance à d’autres éléments plus valides. L’absence du sélectionneur Volker Finke à Yaoundé lors de la publication de la liste des joueurs retenus trahissait sans doute un manque de concertation aux conséquences catastrophiques par la suite. Curieusement, les éclopés emmenés au champ de bataille n’ont pas fait profil bas, mais ce sont plutôt illustrés par les lettres, déclarations intempestives, coups de poing et de tête, etc. Déjà peu en phase avec l’administration à qui ils dictent leur loi, les joueurs sont profondément divisés. Entre « la star des stars » et les autres, entre les clans rivaux aux mobiles occultes, la guerre des tranchées est déclarée depuis longtemps et les embrassades en public ne trompent plus grand monde. Si l’équipe du Cameroun veut connaitre à nouveau le goût de la victoire, il faut bannir en son sein la notion de « super joueur » en mettant l’accent sur l’homogénéité et la solidarité. Denis Lavagne, puis Volker Finke s’y ont essayé un moment avant de se faire rappeler à l’ordre par « la très haute hiérarchie » Des sanctions pour indiscipline caractérisée ont été levées comme par enchantement en 2012. Lorsqu’ils ne se taisent pas carrément quelques «anciens », jusque là très critiques sur le comportement de certains joueurs en équipe nationale, ont redirigé leurs attaques vers la Fédération ou le ministère comme pour dédouaner les « faroteurs ». Avec l’impunité persistante, la cour du roi Pétaud s’est enrichie de nouveaux troubadours qui ont stupéfait la planète entière depuis le Brésil. il faut pourtant que cesse ce cirque permanent pour redorer l’image des Lions.
Jean Marie Nkeze