Les jours de Javier Clemente sont-ils comptés à la tête de l’encadrement technique des Lions Indomptables ? C’est du moins ce que le ministre des Sports a laissé entendre, à demi-mot, le 5 juillet dernier, à l’Assemblée nationale.
Michel Zoah affirmait que l’actuel sélectionneur du Cameroun avait pour mission, lors de la signature de son contrat, de reconstruire l’équipe, mais surtout de qualifier les Lions Indomptables pour la Coupe d’Afrique des Nations 2012 au Gabon et en Guinée équatoriale. Or, au rythme où vont les choses, la voie du Gabon et de la Guinée équatoriale s’obscurcit dangereusement. « Nous allons tirer les conséquences qui s’imposent », avait affirmé le ministre des Sports.
Des noms de potentiels successeurs de l’Espagnol Javier Clemente ont commencé à circuler. Après l’ancien sélectionneur de l’Angola, Hervé Renard, on parle désormais de l’ancien sélectionneur des Pharaons d’Egypte, Hassan Shehata. Le profil de cet homme à poigne, triple vainqueur de la Coupe d’Afrique des Nations, séduirait le ministre des Sports, qui envisage très sérieusement de le recruter. Contacté par des intermédiaires, le fils de Hassan Shehata a dit que son père était disponible et ouvert à toutes les négociations avec le Cameroun, de préférence au Caire. Il a ensuite envoyé le Cv de son père qui parle pour lui.
Avant de devenir le charismatique sélectionneur de l’équipe nationale d’Egypte, Hassan Shehata a connu une riche carrière de footballeur, couronnée par de nombreuses distinctions : trois fois meilleur joueur en Egypte entre 1966 et 1983, meilleur buteur à deux reprises au cours de cette même période, meilleur joueur africain de la Can 1974, capitaine des Pharaons d’Egypte de 1973 à 1980, capitaine du Zamaleck du Caire de 1973 à 1983.
Après cette première vie sur les terrains, il prend place sur le banc de touche dès 1983 au Zamaleck, le club où il a fait l’essentiel de sa carrière de footballeur. Il s’occupe des moins de 20 ans. Il gravit très vite les échelons en entraînant l’équipe première du Zamaleck et d’autres clubs en Lybie, au Sultanat d’Oman, etc. Un parcours couronné par le titre de meilleur entraîneur égyptien en 2004.
Corruption
En 2005, lorsqu’Hassan Shehata est porté à la tête de l’encadrement technique des Pharaons d’Egypte, il ne s’agit point d’un parachutage. C’est une ascension normale. L’homme a fait ses preuves partout : comme footballeur, entraîneur de clubs, sélectionneur des équipes de jeunes (2000-2003).
Chez les A, les résultats ne tardent pas. Un an après sa prise de fonctions, il enchaîne les titres continentaux. Trois fois vainqueur de la Can (2006, 2008 et 2010). Une performance jamais égalée par un entraîneur dans le monde sur le plan des compétitions continentales, commente l’ancien journaliste de Rfi, Gérard Dreyfus. « A son bilan de Coupe d’Afrique des Nations, 4 victoires et 2 nuls en 2006, 5 victoires et 1 nul en 2008, enfin, le coup parfait, 6 victoires en 2010 », ajoute l’actuel employé de la Caf. En 2008, Hassan Shehata a été sacré meilleur entraîneur africain, puis classé en 2009 parmi les 14 meilleurs sélectionneurs du monde.
Homme réputé intraitable et intransigeant, l’ancien sélectionneur des Pharaons d’Egypte ne tergiverse pas avec la discipline et n’hésite pas à mettre de côté des joueurs, même brillants, qui veulent contester son autorité. Ahmed Hossam dit « Mido » en sait quelque chose. C’est le caractère bien trempé de cet Egyptien de 62 ans (né le 19 juin 1949) qui séduirait les autorités sportives camerounaises, malgré son incapacité à qualifier les Pharaons à la prochaine Can et qui lui a valu de déposer son tablier.
La piste d’un Camerounais à la tête des Lions Indomptables s’évanouit, nous confie-t-on, après que le ministre des Sports s’est aperçu que la corruption et le monnayage des places était devenu monnaie courante dans les sélections des jeunes. « La nationalité d’un sélectionneur importe peu. Seules ses performances, son expérience et sa compétence valent », semblait prévenir Michel Zoah face aux députés, qui réclamaient un Camerounais pour sortir les Lions Indomptables de la tourmente.
Jean-Bruno Tagne