Le capitaine des Lions indomptables, Samuel Eto’o Fils, a enfin accepté d’ordonner à sa troupe à embarquer au petit matin de ce jour à Nsimalen pour le Brésil. Il a marchandé les primes des joueurs jusqu’à la dernière goutte de sa salive pour obtenir, au prix de quelques emprunts informels, de quoi satisfaire la gloutonnerie pécuniaire de nos joueurs professionnels du ballon rond.
Samedi déjà au Stade Omnisport de Yaoundé, dans ce qui était considéré comme un match de communion avec le public camerounais avant de se rendre au Brésil, les Lions ont gratifié le public camerounais venu nombreux les encourager, d’une insipide prestation face à la modeste équipe de Moldavie qui aurait affronté Coton Sport de Garoua avec un bonheur au-dessus de celui que nos stars endollardées nous ont donné de vivre.
On doit réclamer à juste titre ce à quoi on a droit. Les joueurs de l’équipe nationale de football, comme toutes les équipes du monde qui participent à une phase finale au nom de leur pays, doivent jouir de ce à quoi ils ont droit. Cela n’est pas discutable. Entre une revendication légitime et un comportement imposteur, il y a un seuil qu’il ne faut pas franchir, mais que les Lions ont allègrement traversé sans vergogne.
Le drapeau de la nation est un symbole. Il est un mythe, un totem qu’on respecte et qu’on craint. On peut reprocher tout aux tenants du pouvoir, mais insulter l’hymne national ou piétiner le drapeau aux couleurs de la nation est un sacrilège. Voilà le gros péché des Lions samedi, quand ils se sont engouffrés comme un seul homme dans les vestiaires pour refuser de recevoir le drapeau du Cameroun que le Premier Ministre était venu leur remettre pour qu’ils défendent les couleurs nationales au Brésil. On en vient à se demander: pour quel pays Eto’o et ses camarades se rendent-ils au Brésil, s’ils refusent de recevoir ce que ce pays a de plus précieux, son drapeau?
Les Lions sont habitués des frasques burlesques et anti patriotiques. Ce fut le cas en 1992 à la CAN du Sénégal. Joseph Antoine Bell, alors capitaine de la sélection, organisa la fronde au sein de l’équipe. II récidiva deux ans après à la Coupe du monde des Etats-Unis où les Lions sortirent la queue entre les jambes.
En 2002 lors de la Coupe du monde Corée/Japon, le désordre s’installa encore pour des problèmes de primes. En novembre 2011 à Marrakech au Maroc, c’est Samuel Eto’o qui remit la pendule à l’heure de boycott de match.
Participer à une phase finale d’une Coupe du monde n’est pas à la portée du premier joueur. C’est une consécration dont rêve tout footballeur. Les professionnels gagnent suffisamment d’argent dans leur club qu’ils n’attendent pas une Coupe du monde pour résoudre leurs problèmes de famille et autres. Le pays dont un joueur porte les couleurs, lui offre cette opportunité de rêve. Marchander sa consécration par des revendications des primes ne relève que de la pure bêtise dont seul le footballeur camerounais n’est pas conscient, parce qu’il loge sa cervelle dans ses godasses.
Les nations du monde veulent voir leur drapeau flotter haut soit aux Jeux Olympiques, soit à la Coupe du monde de football. La participation d’un pays à ce niveau des compétions lui offre une grande vitrine pour son image. Ce sont des occasions uniques où les pays font gracieusement leur promotion. Puisque ce sont les joueurs qui sont les acteurs de cette opportunité, il faut leur renvoyer l’ascenseur pour leurs efforts.
Après sept participations à la phase finale de la Coupe du monde, le Cameroun devrait non seulement avoir déjà investi avec les retombées de ces participations, mais ne plus être surpris par les revendications des joueurs. Il est tout de même étonnant que chaque fois, les mêmes problèmes se posent, avec les mêmes acteurs, et de la même manière.
S’il est vrai que l’on ne saurait pardonner aux joueurs leur déficit de patriotisme, les responsables à tous les niveaux ont également leur part de responsabilité dans ce désordre organisé. Leur amateurisme congénital est toujours à l’origine de tous les maux à la Fécafoot. Les joueurs leur reprochent de s’embourgeoiser au prix de leur transpiration sur les terrains. Ont-ils seulement tort?
Un joueur qui va à la Coupe du Monde est un soldat au front. S’il sait qu’il n’a pas de munitions pour le combat, ou qu’il est mal nourri, qu’il se déclare forfait avant d’embarquer. Ne pas mouiller le maillot sur fond des revendications est une haute trahison qui mérite sanction !
© XAVIER MESSÈ | Mutations