Ainsi s’est achèvé le mondial international de Montaigu, qui met chaque année à Pâques 24 nations et clubs de football du monde entier. Et pendant que les autres nations préparaient l’avenir en Vendée, nos petits pleuraient au Cameroun.
Finalement, à cause d’une fédération incapable d’honorer une parole qui a été donnée il y a près d’un an, toute une génération de jeunes vient d’être sacrifiée. Pendant tout le weekend pascal, la Vendée entière n’a pas cessé de parler du Cameroun. Pas parce que comme croient certains de nos dirigeants, le Cameroun est le centre du monde et que rien ne saurait se faire sans lui. Au contraire, tout le monde a été scandalisé qu’une grande nation de football comme le Cameroun, cinquième meilleure équipe de football au monde en 1990, et quatre fois champion d’Afrique soit incapable de faire participer ses jeunes au Tournoi de Montaigu, dont il est par ailleurs quatre fois détenteur du trophée.
A la confirmation du forfait définitif du Cameroun, on a pu se poser des milliers de questions : Comme le Cameroun est passé de pays en développement à pays pauvre très endetté, peut-être n’ont-ils plus la possibilité de financer un voyage, fut-il pour les jeunes. Certains vendéens, un peu mal cultivés je l’affirme, ont confondu le Mali au Cameroun, croyant que le climat politique serait à l’origine de l’absence. Certains ont aussi pensé que comme au Kenya, dégoutés par les échecs répétitifs de la fédération nationale, certains patriotes auraient créé une fédération parallèle, ce qui aurait court-circuité le bon fonctionnement de la gestion du football national. Au fond, les vendéens auraient souhaité que ce soit une circonstance suffisamment grave qui justifiât l’absence du Cameroun à Montaigu.
Malheureusement, aucune de ces hypothèses n’était réelle. La seule raison pour laquelle la jeunesse camerounaise n’a pas été en Vendée, c’est juste que les dirigeants du football camerounais se foutent de la jeunesse. Pire, il n’en est pas seulement ainsi que du football, mais de tout ce qui touche à la jeunesse : l’éducation, la santé, les droits des enfants, le chômage des jeunes… Pour une équipe qui a été, comme toutes les autres, invitée il y a un an à participer à un tournoi à l’étranger, comment comprendre que les responsables s’amènent au Consulat de France la veille du premier match pour la demande des visas ? Ne savaient-ils pas qu’ils allaient en avoir besoin pour voyager ? Croient-ils réellement qu’en une demi-journée, avec des dossiers qui plus est incomplets on peut obtenir des visas ? Serait-ce les fonds nécessaires pour le voyage qui auraient manqué ? Personnellement, je n’ai même pas envie de savoir quelle est la raison réelle de l’absence du Cameroun pour les 40 ans du Tournoi de Montaigu.
Ce dont il est question, c’est la valeur de la parole donnée. Avec tous les antécédents que le Cameroun a eus à Montaigu, l’invitation pour les 40 ans était une grande marque de confiance. Le minimum pour nos dirigeants, au cas où il aurait été certain qu’on pourrait ne pas voyager, aurait été d’avertir l’organisateur du tournoi afin qu’il puisse prendre les dispositions nécessaires, trouver une sélection de remplacement, revoir toute la programmation des matchs et changer toute la logistique qui était mise en place. De tout cela, hélas, il n’en a rien été. Qu’ont-ils fait ? Ils se sont présentés au Consulat de France le 4 avril, avec des dossiers incomplets, alors que le Cameroun devait rencontrer le Mexique le 5 pour son premier match. Ils veulent faire croire à qui qu’eux-mêmes pensaient pouvoir obtenir les visas, aller sur Paris, passer par Nantes et être en Vendée le lendemain pour jouer. La justification des visas est une stupidité qui ne doit même pas être évoquée.
En entrant au Consulat de France le 4 avril, les dirigeants de la Fecafoot savaient très bien que compte tenu du minimum de temps que prennent les procédures administratives, le Cameroun ne pourrait jamais être à Montaigu le 5 avril. Au lieu de dire directement au directeur du tournoi qu’on est incapable de faire voyager nos jeunes, ils ont poussé le ridicule ou la stupidité (c’est selon) jusqu’à proposer à l’organisateur de différer le premier match du Cameroun, essayant de faire croire au passage que ce qu’ils ont été incapables de faire en un an, peut-être qu’en obtenant un délai supplémentaire de deux ou trois jours, ils le feraient. Balivernes !!! Le Cameroun n’est pas le centre du monde. 24 sélections et clubs ont été invités. 23 ont respecté la parole donnée. C’est pas parce que le Cameroun est moribond que tout le monde devrait en pâtir. Le tournoi s’est joué sans le Cameroun et des générations entières vont être privées de ce tournoi, et pour longtemps cette fois-ci.
Et je peux prendre le pari avec vous que personne ne prendra la peine de se justifier, et vous n’entendrez pas que quiconque a été sanctionné. Ça se passe comme cela depuis la nuit des temps, parce que dit-on, le Cameroun, c’est le Cameroun. Dans un pays où n’importe quel dirigeant peut faire n’importe quoi sans le moindre risque d’être sanctionné, y a encore un espoir ? Un pays dont les dirigeants enterrent tous les rêves de la jeunesse peut-il encore susciter quelque espoir ? Aussi bizarre que cela puisse paraître, je crois pouvoir répondre par l’affirmative à cette question. Au vu du nombre de jeunes camerounais présents à ce tournoi et qui appartenaient à divers clubs et sélections dont 2 avec l’équipe de France, un à Nantes, 2 Auxerrois, un Manceaux, et un dizaine avec la sélection africaine de FootSolidaire, il y a des raisons d’espérer. C’est regrettable de fonder les espoirs de tout un pays sur des gamins dont on ne sait pas comment ils se débrouillent. Mais, une nation qui a enfanté Mbappé Leppé, Roger Milla, Omam Biyik, Patrick Mboma et Samuel Eto’o et qui, malgré l’incompétence de ses dirigeants est encore capable d’accoucher autant de jeunes talents ne peut pas mourir, à condition qu’à un moment donné, on puisse récupérer le corps en agonie des griffes acérées des rapaces.
Claude KANA, Consultant