YAOUNDE, 5 juin – L’opinion publique camerounaise n’en finit pas, depuis le 29 mai, de déplorer l’échec d’Issa Hayatou, un fils du pays, et la réélection du Suisse Joseph Blatter à la tête de la Fédération internationale de football (FIFA).
Dans les discussions, comme dans les journaux, cette réélection de Blatter confirme que la FIFA n’est qu’une machine d’argent et de puissance, un outil de corruption et de manipulation à très haut niveau, en un mot une véritable « mafia ».
Le Canard, journal satirique, ouvre sa dernière édition par une caricature illustrant Issa Hayatou auquel le dessinateur prête cette pensée « Mon Dieu, quelle traîtrise », tandis qu’un observateur rumine, après le triomphe du Suisse: « Et dire que Blatter est coupable de malversations financières! S’il avait été un président africain… »
Pour l’éditorialiste du Canard, « C’était à prévoir que Hayatou ne dirigera pas le football mondial, comme l’eût souhaité ou même cru possible une bonne frange de Camerounais et d’Africains ».
La rue est à l’unisson. « Comment comprendre que Sepp Blatter ait été hué lors de l’assemblée générale de la FIFA par les délégués et que ceux-ci, le lendemain même, l’élisent, dès le premier tour, avec plus des deux tiers des suffrages? », s’interroge un vendeur à la sauvette de l’avenue Kennedy à Yaoundé.
Voix discordantes
Par ailleurs, souligne-t-il, la cinquantaine de voix enregistrées par le candidat africain prouve que « l’Afrique n’a pas soutenu son candidat naturel ». Des voix discordantes s’étaient déjà faites entendre, notamment lors d’une réunion pro-Blatter organisée par la Libye, et surtout, avec les campagnes animées dans le même sens par d’anciens internationaux du football, dont les Camerounais Joseph Antoine Bell et Roger Milla, le Ghanéen Abédi Pelé et l’Ivoirien Basile Boli.
Tout cela fait écrire au journal satirique Le Messager Popoli que Roger Milla, ambassadeur itinérant à la présidence de la République au Cameroun, pourrait bien être limogé de cette fonction honorifique par le président Paul Biya dès son retour au pays.
Selon Cameroon Tribune, ces footballeurs ont trahi simplement du fait de leurs intérêts égoïstes. Selon le quotidien, Roger Milla aurait ainsi reçu de la FIFA la somme de 20.000 dollars pour organiser la fête de ses cinquante ans, tandis que Blatter aurait promis, selon la même source, de préparer sa succession à la tête de la Fédération exclusivement en faveur des footballeurs, dont le Français Michel Platini.
Dikalo s’attarde sur le départ de la FIFA de Michel Zen Ruffinen. « L’homme qui a étalé les malversations financières et la gestion saucisson en vigueur à la FIFA quitte le secrétariat général de cette grande organisation mafieuse dès la fin de la coupe du monde », assène ce bihebdomadaire paraissant à Douala.
Les débuts en demi-teinte de la sélection des Lions Indomptables au Mondial 2002 (match nul 1-1 contre l’Irlande), n’ont rien arrangé à la mauvaise humeur des supporteurs camerounais. « Si on avait gagné 3 à 0, on ne parlerait même plus de cette histoire de FIFA », commente l’un d’entre eux.