La nuit était tombée sur Yaoundé, ce vendredi, 24 mai 2013. L’on apprend, que la Chambre de conciliation et d’arbitrage (CCA) du Comité national olympique et sportif du Cameroun (CNOSC) vient d’invalider la candidature de Mr Iya Mohammed à sa propre succession. Le coup de sonde parcourra la planète à la vitesse de l’éclair.
C’est que les petites et grosses tensions, les plaintes et complaintes, les revendications des comités de soutien et citoyen avaient tous pris rendez-vous pour le 25 mai 2013. Cette date qui avait cristallisé les passions devait être pour les uns le symbole de la chute de l’administration de la fédération, et pour les autres le symbole de leur puissance retrouvée.
Les stratèges de tout acabit, de la brillance à la bouffonnerie, se sont attablés pour que le symbole rayonne de leur couleur.
On est Vendredi. Depuis quelques jours, les délégués avaient pris leur quartier à Yaoundé et menaient leur tractation tantôt dans l’indifférence, tantôt dans la raillerie. Avec une constance, les appels incessants des dignitaires de la République qui leur intimaient l’ordre de se saborder avant que le gouvernement n’utilise la manière forte.
En fin d’après-midi, le président de la Fécafoot est convoqué par le Premier ministre, pour une réunion avec les différentes parties impliquées à la Primature. Après discussions, le Chef de gouvernement demandera à Mr Iya de surseoir à la tenue de cette assemblée élective pour laisser la tension se dissiper. Refusant de s’engager tout seul au nom de ses membres, Mohammed Iya obtiendra la permission de retourner les convaincre à l’hôtel où ils étaient réunis. Il s’exécutera.
Mais avant qu’Iya Mohammed ne rencontre les délégués, l’information était déjà tombée au journal de 20 heures 30 à la CRTV télé en ces termes: « Le gouvernement recommande que les élections soient reportées pour des raisons de sécurité ».
Cette nouvelle surprend les membres de l’assemblée générale qui tablaient justement sur la proposition que leur avait rapporté leur président. Du coup, les positions se radicalisent. Le représentant de la FIFA qui était au milieu des participants, voit les événements se dérouler sous ses yeux. Il prend des notes, passe des coups de fil, pose des questions, demande les enregistrements des journaux télévisés de toutes les grandes chaînes de télévision qui avaient eu la bonne idée de passer des bandeaux au bas de l’écran pour annoncer la reprise en main par le gouvernement de la Fécafoot.
Du côté de la Primature, le Premier Ministre pique des colères. Il ne comprend pas qui a pu autoriser la lecture d’un tel document sur la chaîne publique, la chaîne d’État. Vamoulké est convoqué d’urgence à la Primature. Il devra répondre.
Les délégués de l’assemblée générale viennent de se faire sortir un joker. Et c’était la dernière balle du Shérif.
La nuit de vendredi à Samedi fut longue. Longue de tous les côtés. La colère du Premier Ministre a eu un écho dans les hautes sphères du gouvernement et les commanditaires de l’ombre se sont évanouis dans la brume. Tous souhaitent que le Premier Ministre digère la raclée et comprenne la portée de ce geste fort. Il n’est pas le maître du jeu et ne l’a jamais été. Ils font partis de l’entourage immédiat du Président de la République et ont la capacité de faire et de défaire les décisions puisqu’ils agissent en son nom. Le Château vacille.
Le lendemain, jour de l’élection, les délégués constatent que la bataille est perdue. Les élections n’auront pas lieu. Au lieu de s’apitoyer sur leur sort, leur intelligentsia planifie la suite. La loi est de leur côté, pensent-ils. « Puisque c’est la guerre, alors on va en guerre et si Iya veut faire son petit conciliateur, on va aussi le débarquer », assure un des délégués. Surpris par cette position guerrière, notre reporter a demandé pourquoi s’obstinaient-ils à vouloir défier un État. C’était la question de trop puisque c’est avec des insultes grossières et des accusations de corrompu à l’emporte-pièce que nous avons été traitées.
« L’assemblée générale élective prévue ce jour, 25 mai 2013 (…) n’a pu se tenir en raison des problèmes de sécurité évoqués par le Gouvernement », informe Tombi A Roko, le secrétaire général, dans un communiqué en après-midi.
Climat de haute tension
Le processus électoral de la Fécafoot a connu beaucoup de contestations. Le ministre des Sports a été le premier à s’insurger, en ordonnant l’interruption du processus. Avant de se plier suite à un ultimatum de la FIFA. Et puisque les suspiscions allaient bon train, la suspension du ministère a fait sortir de l’ombre les contestataires de l’ombre qui pensaient pouvoir profiter de l’occasion pour frapper un grand coup.
Ce fut d’abord six des membres du Comité d’urgence de la Fécafoot qui ont lâché l’inamovible président, dont John Begheni Ndeh, qui postulera à la présidence.
L’animation était assurée par les Comités de soutien. D’un côté, le Collectif Républicain d’Ange Sama, pro-Iya Mohammed, et d’ l’autre, le Comité citoyen pour le redressement du football camerounais conduit par Roger Milla et le Synafoc (Syndicat national des footballeurs Camerounais), revendiquant le départ de l’équipe dirigeante et doté d’un slogan clinquant: « le football au footballeurs ». Même le capitaine de l’équipe nationale, Samuel Eto’o, s’y est mis à un moment donné.
Autre élément de contestation, l’article 4 du statut spécial des ligues décentralisées de la Fécafoot jugé « anti-statutaire » et décrié de tout côté.
Ainsi, à causes des rivalités et des tensions, des élections dans diverses localités se sont tenues, parfois à des endroits tenus secrets, parfois déportées au siège de la Fédération à Yaoundé. Alors qu’un des côtés est convaincu de la lâcheté des faits, l’autre côté invoque le strict respect des statuts qui donnent à la commission électorale tous droits de décision en ce qui concerne le processus électoral.
Au final, la Chambre de conciliation et d’arbitrage du Cnosc a annulé les assemblées générales électives dans toutes les régions à l’exception de celle de l’Ouest. Et là aussi, il y a contestation puisque, selon le camp d’en face, en parcourant les propres statuts du CNOSC, aucune de ses procédures ne semble avoir été respecté.
Tout est-il à recommencer ? La seule certitude est que c’est un vrai fouilli qui s’est installé dans notre football. Mais on ne perd rien pour attendre. La suite sera sûrement plus dramatique.