Dotés d’une histoire vibrante et des deux meilleures équipes du monde, Manchester United et le FC Barcelone vont aussi se battre pour corriger ce qui ressemble à une anomalie : avec trois victoires en C1 pour l’un et deux pour l’autre, ils auraient presque un palmarès maigrelet. Alex Ferguson y pense beaucoup.
Barcelone – Manchester United, mercredi soir à Rome, sera une finale de rêve autant qu’une finale logique. Elle oppose les deux meilleures équipes de la saison, probablement les deux édifices collectifs les plus complets d’Europe, deux des trois clubs les plus riches de la planète. Elle oppose aussi deux institutions légendaires par leur histoire, qui ont embrassé l’ère moderne du jeu dans toute sa démesure. Le classement »européen de tous les temps » établi par l’UEFA sur la base de toutes les C1 depuis 1955-56 rend justice à leur monumentale importance : Manchester United y est troisième (derrière le Real Madrid et le Bayern Munich), Barcelone cinquième (avec l’AC Milan intercalé).
Reste cette relative maigreur au palmarès de la compétition n°1. Manchester United, avec trois C1 (1968, 1999, 2008), a gagné trois fois moins de coupes »aux grandes oreilles » que le Real Madrid (9), deux fois moins que Milan (7), deux de moins que son rival viscéral Liverpool (5). Au crépuscule de sa carrière, Alex Ferguson attache une importance considérable à la possibilité de rattraper ceux qu’il nomme «les plus grandes équipes d’Europe», comme si son équipe n’en faisait pas encore partie. «Les grandes équipes doivent gagner des trophées, c’est aussi simple que ça en ce qui me concerne. Nous avons eu l’opportunité, dans le passé, de rejoindre ces clubs. On aurait pu faire mieux. La finale de Barcelone est une opportunité pour nous rapprocher des plus grandes équipes. Le Manchester actuel en a le potentiel.»
Barcelone : huit coupes d’Europe, deux C1…
C1, LE CLASSEMENT DE TOUS LES TEMPS : 1. Real Madrid, 2. Bayern Munich, 3. Manchester United, 4. AC Milan, 5. FC Barcelone, 6. Juventus, 7. Liverpool, 8. Benfica, 9. Dynamo Kiev, 10. Ajax Amsterdam, 11. FC Porto, 12. Inter Milan, 13. Anderlecht, 14. Glasgow Rangers, 15. Arsenal (…) 26. Lyon, 33. Marseille, 38. Monaco, 59. Paris-SG, 60. Saint-Etienne, 64. Bordeaux. (Source : UEFA, classement établi sur tous les réasultats enregistrés en C1 depuis 1955-56).
Si elle battait Barcelone ce soir, son équipe serait la première depuis l’AC Milan en 1989 et 1990 à enfiler deux C1 consécutives. La première à la réaliser dans l’ère moderne. «Ça arrivait dans les 60 et 70, il y avait des cycles, comme ceux de l’Ajax ou du Bayern. Je ne pourrais pas vous expliquer pourquoi ça n’arrive plus mais j’espère qu’on saisira l’occasion d’en réaliser un aussi» lâche Ferguson. Une victoire cette saison, et MU rejoindrait l’Ajax et le Bayern avec quatre trophées.
Le Barça, lui, n’a remporté »que » deux C1. Il a dû attendre l’ère de la première Dream Team, celle de Cruyff entraîneur, pour corriger l’anomalie historique que constituait son absence au palmarès (victoire en 1992). La victoire de 2006 contre Arsenal (2-1), avec un style de jeu aussi brillant, était une réplique. La légende du Barça se nourrit davantage de son impact en Liga et de victoires dans les coupes européennes secondaires. Avec trois C2 et autant de C3, Barcelone a remporté deux fois plus de coupes d’Europe que Manchester United (qui a aussi une C2 en 1991). En Ligue des champions, le Barça a perdu trois finales sur cinq disputées. Il entend encore parler de défaites marquantes comme celle concédée sur le sol espagnol au Steaua Bucarest en 1986 (0-0, 0-2 t.a.b.) ou à l’AC Milan en 1994 (0-4). Entre l’excitation du moment et une dimension historique évidente, Barcelone – Manchester n’a pas le droit de décevoir. –
Cédric ROUQUETTE (à Rome)