Cette mort brutale, le 26 juin à Lyon, soulève des nterrogations chez les spécialistes. Le décès de Marc-Vivien Foé, le jeune et brillant international camerounais, serait donc d’origine naturelle. «Le joueur souffrait d’une cardiomyopathie hypertrophique du ventricule gauche, une affection indécelable sans un examen approfondi», a déclaré Xavier Richaud, le procureur de la République, ajoutant qu’aucun produit dopant n’a été retrouvé.
Attendue depuis le 26 juin dernier, date du malaise fatal du joueur sur la pelouse de Gerland à Lyon à la 72e minute du match Cameroun-Colombie, la cause du décès de ce jeune homme de 28 ans apparaît donc d’origine cardiaque. «Un tel accident peut être attribué à un effort violent et la malformation à une somme d’efforts dans la durée», a proposé le procureur de la République.
Mais devant un accident aussi brutal, la justice avait ouvert une information et demandé des examens complémentaires. Dans un premier temps, l’autopsie avait écarté l’hypothèse, un instant privilégiée, d’une rupture d’anévrisme. Par ailleurs, les analyses de toxicologie et d’anatomo-pathologie, effectuées par un laboratoire de Lausanne par des spécialistes de la toxicologie et du dopage, agréés par le Comité international olympique ont montré «l’absence totale» de produits dopants. Ces analyses ont été réalisées sur des échantillons de sang et d’urine et sur des cheveux qui permettent un examen sur le long terme.
Reste que l’on peut s’étonner qu’une malformation cardiaque de ce type ait pu échapper aux très méticuleux contrôles médicaux diligentés chez les footballeurs professionnels par les clubs, à l’occasion de chaque transfert. Selon certaines informations, en l’an 2000, les parois du ventricule du joueur ne dépassaient pas les 12-13 mm (la norme est de 11 mm). Alors que le constat d’autopsie fait état, avec 16 mm, d’un épaississement certain de la paroi. L’apparition rapide d’une telle hypertrophie cardiaque chez un footballeur de haut niveau n’est pas sans poser un certain nombre de questions.
S’agit-il d’une réaction physiologique à des efforts répétés, à un entraînement intensif comme cela se voit plutôt chez les sportifs d’endurance comme les cyclistes ou les nageurs ? Le docteur Aupetit (service d’explorations fonctionnelles en médecine du sport et en cardiologie) à l’hôpital Saint-Joseph, Saint-Luc de Lyon précise. «En cas d’hypertrophie d’adaptation, l’épaisseur des parois cardiaques ne dépasse pas les 16 mm chez un sportif très entraîné.»
Ou s’agit-il d’une myocardiopathie hypertrophique pathologique du ventricule gauche, comme l’affirme le rapport d’autopsie. Cette maladie congénitale du muscle cardiaque apparaît progressivement au cours de la vie. «Mais il est fort rare qu’elle se manifeste en l’espace de deux ans, chez un individu pourtant particulièrement bien suivi au plan cardiaque», s’étonne un cardiologue. Reste à savoir aussi si cette affection cardiaque ayant entraîné une hypertrophie du ventricule gauche est bien à l’origine du décès de Foé, favorisé par un trouble du rythme ventriculaire massif, impossible à récupérer. Et ce en dépit de toutes les manoeuvres de réanimation entreprises durant près de 45 minutes, à l’intérieur de l’antenne médicale du stade Gerland.
N’y a-t-il pas d’autres facteurs qui auraient pu s’associer pour expliquer un tel accident ? Le surentraînement, l’épuisement lié aux sollicitations de plus en plus fortes exercées sur les athlètes de haut niveau ou encore la déshydratation. Car le jeune Camerounais avait été victime de diarrhées quelques jours avant, traitées avec du chlorure de sodium et de l’imodium. «Or on sait bien que la déshydratation peut provoquer des désordres métaboliques, susceptibles de favoriser certains troubles du rythme cardiaque», rappelle le docteur Aupetit. «Mais il importe aussi de réunir le plus de documents possibles sur les différents éléments du dossier médical de ce joueur pour essayer de comprendre ce qui s’est passé et tenter à l’avenir de proposer le meilleur suivi possible pour les athlètes de haut niveau…»
Reste que, si le décès brutal de Marc-Vivien Foé a marqué les esprits, il convient de préciser que son cas n’est pas exceptionnel. En effet, 50% des morts subites de jeunes sportifs de moins de trente ans sont provoquées par des cardiomyopathies hypertrophiques.
Catherine Petitnicolas