L’actualité récente des Lions indomptables est marquée par l’annonce du départ à la retraite de certains joueurs-cadres à l’instar de Toko-Ekambi, en plus de la rumeur sur un re-départ probable d’André Onana. Si elle venait à se confirmer, cette information qui vient à la suite de la mise à l’écart de Choupo Moting, Michael Ngadeu, Kunde Malong, Fai Collins, entre autres, intervient à quelques mois d’importantes échéances comme les éliminatoires de la prochaine CAN et de la Coupe du monde 2026. On parle depuis le match nul contre la Guinée de la reconstruction des Lions Indomptables.
Nul ne saurait se considérer comme éternellement indispensable dans un collectif orienté vers des objectifs nobles. En sport comme dans d’autres domaines d’activité, le renouvellement des générations est un gage de vitalité pour un surplus de performance. Cela dit, le rajeunissement ne saurait servir de prétexte pour éloigner de la sélection nationale certains éléments-clés dont on aurait eu encore besoin des services pendant quelques années encore.
Du savant dosage
Dans la plupart des grandes sélections nationales (Brésil, Argentine, Allemagne, France, Espagne, Angleterre…) le passage de témoin entre les générations est progressif et le rajeunissement des effectifs s’opère autour d’un noyau dur constitué d’anciens joueurs emblématiques pouvant servir de source d’inspiration aux nouveaux arrivants. L’équipe de France, double finaliste en Coupe du monde 2018 et 2022 s’est caractérisée par une relative stabilité avec la présence des titulaires indiscutables comme Lloris, Giroud, Mbappe, Griezmann, Coman, Hernandez, Pavard, Dembele, etc…
Malgré son maigre palmarès en équipe d’Argentine, Lionel Messi, alors considéré comme le meilleur joueur du monde, a été maintenu contre son gré en sélection. La patience a fini par payer lors de la Coupe du monde Qatar 2022 remportée avec brio.
En Afrique même, la plupart des équipes de premier plan bouleversent rarement leurs effectifs de fond en comble à la veille des grands tournois. Au sein des équipes du Nigeria, de Côte d’Ivoire, du Sénégal , de Guinée , du Maroc ou de l’Égypte, on retrouve encore des joueurs expérimentés en place depuis au moins une dizaine d’années. Tout le contraire du Cameroun où on semble s’installer dans une logique d’éternel recommencement. A peine une génération a t-elle fait ses preuves dans une compétition majeure qu’elle est progressivement démantelée sans raison valable et dans l’indifférence générale. Comment expliquer que tous des champions d’Afrique 2017 ou presque aient disparu dans la nature, y compris Moukandjo, le capitaine, dès 2018, un an après le sacre du Gabon ? Et Michael Ngadeu qui fut l’un des meilleurs buteurs de la compétition avec 4 réalisations ?
Lions Indomptables et cette reconstruction permanente
Lors de cette CAN 2023, on retrouvait à peine quatre éléments de l’équipe qui avait remporté la victoire de prestige face au Brésil un an plus tôt en Coupe du monde au Qatar. A la place on a assisté à l’arrivée massive de nouveaux joueurs. Même si on ne veut douter de leur talent, les états de service étaient loin de justifier la présence à certains postes comme le verrou défensif. Et la porosité depuis la CAN 2017 est bien connue.
Au vu du bilan catastrophique des Lions Indomptables en Côte d’Ivoire, l’une des plus mauvaises prestations en CAN (8 buts encaissés) on est en droit de se demander si le remaniement à près de 75% de l’équipe nationale était nécessaire à la veille d’une compétition majeure. Si dans l’absolu, le rajeunissement d’un groupe est compréhensible, encore faudrait-il que les nouveaux arrivants soient à même de faire oublier, par leur seul talent, l’engagement et la détermination certains « anciens » voués aux gémonies. Malheureusement, on n’est pas en droit de penser que l’effectif actuel des Lions soit à même de rivaliser avec celui de la CAN 2021 sous sous les ordres Antonio Conceiçao.
Reconstruction des Lions : le Hemlè au placard ?
Sans vouloir leur tresser des couronnes, beaucoup d’observateurs sont d’avis que la présence de certains joueurs-cadres parmi les 27 retenus pour la CAN 2023 aurait représenté un atout majeur pour booster le mental et la combativité des plus jeunes dont la peur de mal faire pourrait expliquer en partie la piètre performance des Lions indomptables en Côte d’Ivoire.
Qu’on se le dise. Le rajeunissement de l’équipe nationale n’est pas incompatible avec la préservation de certains acquis précieux. Quant au « hemle » et autre « fighting spirit » agités souvent comme des gris-gris infaillibles, ils sont devenus au fil des ans de simples slogans sans aucune traduction concrète sur le terrain du jeu.
Oui à la reconstruction mais à condition qu’elle soit limitée dans le temps et que les dégâts collatéraux ne soient pas plus élevés que les gains escomptés.
Jean Marie Nzekoue, Éditorialiste