Le glas a sonné dimanche dernier. Avec l’expulsion de la Coupe du Cameroun par Panthère de Bangangté, tous les espoirs de Cotonsport de sauver sa saison en s’accrochant à la derrière bouée de sauvetage ont volé en éclats. Une élimination qui s’ajoute à celle de la prestigieuse champion’s league africaine et au titre de champion du Cameroun. Une saison blanche et noire donc ! Une hécatombe pour le club de Garoua qui fait la pluie et le beau temps depuis près d’une décennie dans le paysage footballistique camerounais.
Et on comprend le courroux du public de Garoua qui n’est pas habitué aux mauvaises nouvelles. On comprend donc la colère des populations de la rive droite du fleuve Bénoué qui réclame, à cor et à cri, la tête du manager général, Alain Ouombléon sur un plateau. Ce qui vient d’être fait aux dernières nouvelles. Mais qu’est-il s’est passé donc pour qu’on en arrive à cette situation ?
Lavagne s’en va. Ouombléon arrive…
Tout commence en juillet 2008. Le français Denis Lavagne, alors manager général quitte les berges de la Benoué pour déposer ses valises au Maroc dans …un centre de formation. Mais avant de partir, l’entraîneur français propose à Cotonsport, un coach franco-ivoirien. Alain Ouombléon est donc recruté. De son tête à tête avec Iya Mohammed, directeur général de Sodecoton, l’entreprise qui est par ailleurs le principal sponsor du club, on apprend que le patron du coton camerounais réitère les ambitions du club : un titre continental et le trophée de la coupe du Cameroun. L’ogre du Nord dominant déjà outrageusement le championnat depuis près d’une décennie. Mais Alain Ouombléon, en état de grâce, bénéficie du travail de fourmi abattu par ses prédécesseurs, que sont le franco sénégalais Lamine Ndiaye et Denis Lavagne, pour hisser Cotonsport au firmament de sa gloire : un doublé Coupe-championnat (le trophée de champion étant déjà gagné par Denis Lavagne avant son départ), et surtout une prestigieuse place de finaliste de la Champion’s league africaine. C’est la consécration pour toute la ville de Garoua.
Saignée des joueurs…
Et vint l’inter-saison ! Le mercato. Après avoir tout gagné sur le plan local (doublé coupe championnat) et deux titres vice-champion en coupes africaines (coupe de la Caf en 2003 et Champion’s league en 2008), les joueurs qui évoluent ensemble depuis près de cinq ans (d’où leur puissance) veulent brouter d’herbes fraîches vers d’autres pâturages. Toute la « dream team » est mise en congé par les dirigeants du club pour leur permettre de souffler. Pendant ce temps, l’équipe B amorçait, de manière poussive, le championnat déjà commencé. Sur le marché de mercato européen et asiatique, les joueurs de Cotonsport sont très prisés. Seuls reviennent au bercail des doyens tels que Ahmadou Ngomna, Kingue Mpondo, Nouck Minka, Oumarou Sanda, Ndzana Kana etc. D’autres compartiments du club sont décimés. Les attaquants Zoua Dogari (Fc Bâle), Brice Owona (Espérance de Tunis), Daouda Kamilou (Al Itihad de Libye) paraphent leurs contrats. Le milieu de terrain de Cotonsport n’est pas épargné. Abdoul Karim Lassina (Al Itihad, nigérien), Ousmaïla Baba (Club sportif Sfaxien) migrant au Maghreb. En défense, Makadji Boukar (Allemagne) tandis que le gardien de but nigérien Daouda Kassali dépose ses valises en Turquie. Tous les compartiments de Cotonsport sont donc ainsi décimés. Près d’une dizaine de joueurs clés évoluent dorénavant sous d’autres cieux.
Cécité managériale…
Mais le président Gabriel Mbaïrobe réitère au manager général, Alain Ouombléon, les ambitions du club. Malheureusement, en championnat, le club peine à décoller : une piteuse 5ème place à la 8ème journée avec trois victoires, autant de nul et deux défaites. L’encadrement technique qui a pourtant les pleins pouvoirs pèche par une cécité managériale en recrutant de joueurs de seconde zone. Sur le terrain, la mayonnaise tarde à prendre. L’encadrement technique (Alain Ouombléon et ses adjoints Haman Gabriel (n°1), Wadale Jean (n°2) et Mbaynassem Henri (coach des gardiens) assistent, impuissants, à l’impossible reconstruction d’un club qui se désagrège. Engagé sur trois fronts (coupe, championnat et coupe africaine), le club s’essouffle. Le premier coup de semonce est venu du championnat.
Depuis plus d’un mois, alors que le championnat tire vers la fin, Cotonsport est largué par Tiko United. Avec 5 défaites (un triste tableau qui ne reflète pas le parcours d’un champion), et un meilleur buteur à 7 points (loin de 16 buts de l’époque de Litsingi), Cotonsport est loin donc de son leadership incontesté. Loin donc il y a quelques années avec des statistiques impressionnantes. Coton est champion en 2005 par exemple avec 71 points (18 de plus que Aigle, son poursuivant) et à six journées avant la fin de la saison. On en était encore à cette grosse surprise que Coton se faisait éliminé de la Champion’s league (et reversé à la coupe de la Caf) par Hearthland du Nigeria. On digérait à peine cette élimination que Panthère du Ndé donnait le coup de grâce à l’ex ogre Cotonsport, les éliminant au stade des 1/8es de finale de la coupe du Cameroun.
Histoire
Fondé en 1986 suite à la descente en deuxième division de l’équipe phare de Garoua, l’Étoile filante, Cotonsport accède au championnat d’élite en 1992. À partir de 1996, le Cotonsport dominera le championnat camerounais, remportant 9 titres et finissant toujours dans l’une des deux premières places. En 2003, le club de Garoua atteint la finale de la Coupe de la CAF pour la première fois de son histoire, et en 2008, il se hisse pour la première fois en finale de la Ligue des Champions de la CAF.
A la recherche d’un nouveau coach
Avec ce triple échec, synonyme d’une saison blanche, Cotonsport est comme un boxeur groggy, qui a perdu ses repères. C’est la fin d’un cycle ! Après une hégémonie sans partage, Cotonsport goûte aux douleurs des seconds rôles. Dans les rues de Garoua, la colère gronde à nouveau. On veut la tête du coach. Réuni ce mardi à Garoua, le conseil d’administration a décidé de céder à la pression populaire en débarquant Alain Ouombléon après ses échecs successifs. L’entraîneur adjoint n°2, Haman Gabriel, prendra « en charge l’encadrement sportif et technique de coton sport » qui joue ce samedi son match de 1/8ème de finale bis de la coupe de la CAF, peut-on lire sur le site internet du club. En d’autres mots, Cotonsport se cherche un nouveau manger, un meilleur casting s’impose donc. Cet électrochoc va-t-il booster le moral des joueurs de Coton pour une qualification salvatrice pour la phase de poule de la Coupe de la Caf où ils sont reversés ?
Après la gloire, il est donc normal d’arriver à la fin d’un cycle. Mais il importe de savoir traverser cette phase avec sagesse afin d’en ressortir fort, puissant, pour à nouveau faire la fierté des cultivateurs de coton, de la ville de Garoua et de tout le Cameroun.
Palmarès
9 titres de Champion du Cameroun
- 1997, 1998, 2001, 2003, 2004, 2005, 2006, 2007, 2008
5 titres de vice champions
- 1994, 1996, 1999, 2000, 2002
4 titres de Coupe du Cameroun
- Vainqueur : 2003, 2004, 2007, 2008
Finaliste : 1999
Coupes Africaines
- Finaliste Coupe de la Confédération africaine de football
2003
- Finaliste de la Ligue des Champions de la CAF
2008