Les Lions indomptables du Cameroun ont donc perdu (2-1) la confrontation tant attendue face aux Eléphants de Côte d’Ivoire dans le cadre des éliminatoires pour la Coupe du monde Qatar 2022. En principe, cette courte défaite ne devrait pas faire tant jaser sous les chaumières. Après tout, les excuses ne manquent pas : le match disputé en terre étrangère, l’adversaire du jour qui est l’une des grandes nations africaines de football, le mauvais état de la pelouse.
Tout cela peut être bien compréhensible. Seulement voilà : les raisons évoquées plus haut ne suffisent pas pour justifier ce que d’aucuns considèrent comme une humiliation, tant la rivalité est grande entre les deux équipes et le Cameroun a dominé les débats pendant longtemps comme lors de cette victoire à la CAN 1984, cette victoire en demi-finale de la CAN 1986 (1-0)ou encore cette retentissante victoire (3-2) à Abidjan dans le cadre des éliminatoires couplées CAN/Mondial 2006 et ce triplé d’Achille Webo que les Ivoiriens ne sont pas prêts d’oublier. C’est dire que pour les Ivoiriens, la rencontre qui vient d’être disputée était une sorte de revanche à prendre.
Les joueurs Camerounais et le staff technique étaient-ils conscients de l’enjeu au moment de fouler la pelouse considérée par beaucoup comme un véritable champ de patates ? Rien n’est moins sur si on en juge par la façon timorée dont Aboubacar Vincent et ses coéquipiers ont entamé la rencontre. Comme s’il redoutait une déculottée par avance, l’encadrement technique des Lions a privilégié un positionnement trop bas, avec en prime un marquage lâche sur le porteur du ballon, un jeu haché fait de longs dégagements et desservi par un milieu de terrain incapable de nourrir une ligne d’attaque désespérément esseulée et stérile. Le fait qu’un attaquant expérimenté qui en plus était le capitaine du jour ait laissé traîner sa main en pleine surface lors du coup franc ivoirien ayant provoqué le penalty en dit long sur le manque de sérénité perceptible dans le camp camerounais.
Au-delà du manque d’engagement ou de motivation (c’est selon) perceptible chez la plupart des joueurs, c’est surtout l’inconstance du staff technique des Lions qui semble inquiétant. Il parait qu’on ne change pas une équipe qui gagne ou qui fait des résultats honorables. Il en va autrement chez les quintuples champions d’Afrique où le chamboulement des effectifs est une donnée permanente. A quatre mois de la CAN 2021, il est difficile de définir avec précision l’équipe-type des Lions indomptables. Entre la double confrontation contre le Nigeria en match amical (1 victoire et 1 nul), la victoire face au Malawi (2-0) et la récente déconvenue d’Abidjan, difficile de savoir les leçons tirées en vue de mette la Cameroon Team en totale confiance. A contrario, on continue à assister à une éternel recommencement, comme si l’éternelle reconstruction était une marque déposée. On aura du mal à faire comprendre comment le onze entrant qui avait fait ses preuve trois jours plus tôt face au Malawi ait été subitement bouleversé avec la titularisation d’éléments visiblement en cours de forme et visiblement peu aptes à disputer les 90 minutes. Jusqu’à quand allons-nous comprendre que les compositions et combinaisons expérimentales, surtout au milieu de terrain et en défense, sont surtout indiquées lors des matchs amicaux et non lors d’un match décisif de qualification pour la prochaine coupe du monde ? Remporter la CAN 2021 et qualifier le Cameroun pour Qatar 2022 sont les deux objectifs majeurs assignés au sélectionneur Conceicao et à ses adjoints. Même si le bilan plaide pour l’instant en leur faveur (6 victoire, 4 nuls et 2 défaite en 10 matchs), il semble difficile pour l’instant d’affirmer qu’ils disposent déjà d’une « armée » de métier pour les batailles qui s’annoncent. Au lieu de continuer de jouer à l’autruche, il faut avoir le courage de clarifier au plus vite certains points en suspens comme l’identité du onze entrant (qui n’exclut pas l’arrivée des nouveaux éléments), la désignation claire du capitanat pour éviter un malaise comme celui de 2010, le poste du gardien de but titulaire qui doit être mis en confiance, de l’attaquant en pointe, des paires en défense, etc. Les Camerounais, pour la plupart, souhaitent la victoire finale de leur équipe nationale à la prochaine CAN. Pour que cela ne soit pas un vœux pieux, il faut passer résolument de l’expérimentation à l’action. La CAN arrive à grands pas. Il n’y a plus de temps à perdre.
Jean Marie NZEKOUE, Editorialiste