Le premier match des Lions indomptables sous l’ère Seedorf aura laissé finalement un goût d’inachevé. Les nombreux supporters qui brulaient d’impatience de voir à l’œuvre le nouveau staff technique ont plutôt vécu en direct l’interminable calvaire des champions d’Afrique en titre face à une modeste sélection des Comores (134è au classement mondial Fifa) que l’on croyait pourtant largement à leur portée.
Par Jean Marie NZEKOUE
Compte tenu de la faiblesse supposée de l’adversaire, ils étaient nombreux à promettre un panier de buts aux Comoriens. Tous ces prophètes des jours sans pain en ont eu pour leurs frais, la réalité du terrain ayant déjoué tous leurs pronostics.
Les puristes diront certes que l’état lamentable de la pelouse et la pression psychologique exercé par un public massé tout le long des grilles entourant le stade n’étaient pas de nature à favoriser le beau jeu, contribuant par conséquent à dépayser davantage des joueurs Camerounais évoluant dans un environnement plus professionnel en club. Mais cet argument suffit-il à justifier la pâle copie produite par Michael Ngadeu (le capitaine du jour) et ses coéquipiers ? Rien n’est moins sûr, car la force des grandes équipes réside dans leur grande capacité à contrer l’adversité, à surmonter les obstacles qui se dressent sur leur chemin pour triompher de haute lutte. Le Cameroun l’a démontré à maintes reprises par le passé.
En dehors du fait que les lions pouvaient logiquement bénéficier d’un préjugé favorable du fait de leur stature et de leur palmarès reconnus, l’optimisme béat affiché avant le match de samedi dernier ne reposait en réalité sur aucune certitude, en l’absence de repère visible. On s’en est rendu compte en découvrant un onze entrant totalement chamboulé par rapport à l’équipe finaliste de la CAN 2017 (2 rescapés), la moitié étant constituée des joueurs qui ont disputé le match amical perdu en juin dernier contre le Burkina Faso, sans compter ceux qui effectuaient un retour (Bong, Mandjeck, Olinga, Banana) après une longue période d’absence. C’est donc une sélection presqu’expérimentale qu’on a vu évoluer avec beaucoup de peine sur la pelouse instable de Moroni avec un milieu de terrain destructuré, une défense trop fébrile, une attaque esseulée et peu lucide dans le dernier geste. On a eu de la peine à reconnaitre les nôtres, tant ils ont paru lourds, approximatifs, inconstants et surtout peu motivés.
Il était quelque peu osé, voire hasardeux, de composer à la va-vite une sélection inédite de joueurs n’ayant jamais évolué ensemble, pour la plupart, dans le cadre d’un match officiel. Les Camerounais ont-ils pris de haut un adversaire moins coté, mais surmotivé et décidé à marquer un grand coup ? On pourrait le penser, car à voir évoluer l’équipe, les carences sont vite apparues : absence d’automatismes, manque de liant entre les lignes, déficit de communication et de complémentarité entre les joueurs. Des larges boulevards laissés à des virevoltants attaquants libres de tout marquage, les multiples passes à l’adversaire, l’absence d’appui à l’attaquant, sont les symptômes d’un mal à circonscrire au plus vite. L’aisance technique et la vivacité aidant, les joueurs Comoriens se sont régalés et l’ouverture du score au premier quart d’heure fut largement méritée.
Une véritable humiliation pour les quintuples champions d’Afrique qui peuvent remercier le Ciel pour avoir décroché le point du match nul. Dans le petit archipel de l’Océan indien, les habitants se souviendront pendant longtemps d’avoir tenu tête à l’un des « grands » d’Afrique. Compte tenu du fossé abyssal qui sépare les deux adversaires sur le papier, ce match nul prend des allures de défaite pour les Lions. On peut néanmoins reconnaitre à Seedorf le mérite d’avoir osé, d’avoir pris des risques, même si un match officiel ne saurait constituer un banc d’essai. Il a encore des occasions pour se réajuster.
Vivement que toutes les enseignements utiles soient tirés pour mieux manager un effectif qu’il ne maîtrise pas encore. Le prochain match contre le Malawi pourra fixer davantage sur la capacité des uns et des autres à bâtir une équipe plus cohérente et conquérante ou pas.