Retournement de situation. Vendredi dernier, la CAF a publié un bref communiqué qui annonçait sans autre forme de procès sa décision de repousser sine die la mission d’inspection qui devait décider du sort de l’organisation de la CAN2019 par le Cameroun. C’est que l’institution africaine avait besoin d’un partenaire fort et mondialement reconnu qui devait lui donner les arguments pour retirer cette organisation au Cameroun pour l’offrir, comme promis, au Maroc.
Dans une lettre adressée à la Fédération camerounaise de football (Fecafoot) le 18 août dernier, l’instance faîtière du football africain explique que ce report est dû «au désistement à la dernière minute de la compagnie d’audit Price Watherhouse Coopers (PWC) qui devait accompagner la délégation de la Caf».
Clash
Si pour l’instant les deux parties restent officiellement muettes par rapport à ce retournement de situation, la sortie de Édouard Messou sur les ondes d’une radio française le 20 août 2017, fournit cependant quelques pistes de lecture. L’Ivoirien, président pour l’Afrique francophone de PWC, a souligné moins une position unilatérale qu’une réelle conjoncture ouverte entre Ahmad Ahmad d’une part et le cabinet d’audit londonien d’autre part. PWC reprocherait au Malgache de vouloir absorber et de dominer les intérêts privés et est seul juge de l’intérêt général.
«A Casablanca (Maroc) le 17 août 2017, lors d’une séance de travail avec le président de la Caf, le débat autour du cahier de charge de PWC en terre camerounaise a échappé à la sphère de la neutralité pour devenir, aux yeux de cette structure, un enjeu de mise à l’écart du Cameroun», affirme Édouard Messou. Ceci pourrait sembler anecdotique si les récentes déclarations d’Ahmad Ahmad n’étaient pas le cruel révélateur de la nécessité de «faire quelque chose et vite» pour barrer la voie au pays des Lions Indomptables.
«Permettez-moi de rappeler que la Caf a déjà souhaité organiser des missions d’inspection au cours des derniers mois, mais à chaque fois le Cameroun a sollicité un report», confiait-il le 17 août 2017 à l’hebdomadaire Jeune Afrique. Pour Édouard Messou, «ce propos, autant que les craintes sur la sécurité de la mission au Cameroun, est venu réamorcer inutilement la polémique sur l’incapacité du Cameroun à organiser la compétition».
«Dans l’histoire des controverses ou des conflits qui opposent, sur la longue durée, des acteurs dotés de représentations et d’intérêts divergents, il arrive que surgisse un argument qui contraint les protagonistes à une forme d’invention argumentative, soit pour consolider leur position défensive, soit pour déplacer le jeu des alliances et conquérir ou reconquérir l’assentiment du public», soutient une source à la Fécafoot.
Telle semble être la stratégie adoptée par Ahmad Ahmad qui, au nom de la Caf et de PWC, aurait émis des réserves sur la sécurité de la mission d’inspection au Cameroun. Relativement à cela, Tombi à Roko Sidiki a adressé une lettre au secrétaire général de la Caf le 18 août dernier. Dans ses écrits, le président de la Fécafoot a assuré que toutes les dispositions sont prises, balayant du coup toutes les déclarations erratiques du président de la Caf.
A Tsinga (Yaoundé), on conclut qu’il s’agit d’une fuite en avant. « En composant avec l’ignorance, en se livrant à des interprétations, en posant des hypothèses et de ces constructions intellectuelles sur la sécurité, il en ressort des croyances plus erronées», appuie une autre source. Celle-ci ajoute avant de s’interroger: «Nous savions que du 20 au 28 août prochains, la délégation de la CAF forte de six personnes serait dans nos murs. D’où vient-il que subitement, ces gens craignent une ambiance glaciale malgré l’implication personnelle du président de la République? ».
Jean-René Meva’a Amougou